J'ai ressenti à peu de chose près la même chose qu'avec sa "Ligne Rouge", une sorte de bonne grosse gifle cinématographique qui vous fait comprendre que la plupart des autres films sont encore à un stade inférieur...
L'histoire est très simple à conter : mallick revisite la vie de Pocahontas et de la découverte des Amériques à travers la relation amoureuse d'une jeune indienne et d'un navigateur anglais mal dans son rôle, dans sa vie.
La poésie du film est envoutante et loin d'être classique pour le genre, le montage assez particulier du film repousse le principe d'ellipse temporelle classique et nous force à chaque instant à réfléchir sur ce qui se passe pour ne pas être perdu (on se retrouve dans le même état d'esprit que le navigateur). Un moment peut durer des heures, des années peuvent se réduire à soixante secondes. La musique de James Horner est extraordinairement envahissante (j'ai pensé à du Kubrick parfois) et quelquefois quasi inexistante, les acteurs sont dans la subtilité et la retenue la plus parfaite (mention spéciale à Colin Farrell qui signe de très loin sa meilleure performance), les clichés sont inexistants, la vie indienne étant décrite avec un mélange de fascination de la part du réa et d'incompréhension, ce qui accroit un mysticisme et un bonheur simple de vivre sur l'instant avec les éléments, les évènements. Une pluie, un orage, des odeurs enivrantes et on ressent un calme profond, une sagesse nouvelle. Je jalouse cette vie. La vie anglaise est bien sur montrée comme malsaine, pourrie, mais on est très loin des clichés cinématographiques sur l'homme blanc-méchant colonisateur. L'occidental est capable d'aimer et de comprendre, d'apprendre et de tolérer. Mais il ne peut abandonner le paradis qui s'offre à lui, ce fruit montré comme défendu, qui lui vaudra sa perte. L'obstination et la possession lui reste toujours collées à la peau.
Passer d'un monde à l'autre est pénible pour nous, spectateurs, car Mallick nous arrache d'un monde si paisible, si beau, qu'à chaque fois le retour à la réalité fait toujours mal et apparait sale. Il nous offre généreusement un magnifique voyage et nous prouve encore en fois qu'il est l'un des grands réalisateur de notre temps.
Je m'en vais fumer le calumet...