Le cadre n'est pas tellement intimidant. Il est même assez modeste, voir étroit. Son agencement n'est pas, lui non plus, particulier. Deux fauteuils noir embaumant le neuf, le genre de meubles qui ne sont jamais cher, jamais rembourré de plumes précieuses mais qui restent étonnamment les plus confortables. Quatre murs entourent la scène, d'un noir plus discret que les fauteuils mais non moins influents sur la luminosité. D'ailleurs, la lumière de la pièce naît via une lampe murale puissante, crachotant légèrement des nuages ambrés. Posés sur une table basse, à quelques longueurs des fauteuils, des mets de substitution, une télécommande et quelques ustensiles divers attendent que l'attention humaine s'attache à leurs contours familiers. Derrière la jeune femme, assise dans une position loin d'être régalienne mais plutôt détendue, un écran plasma allumé diffuse en boucle les bandes annonces d'ancien film de la compagnie Umbre Communauty, ainsi que le premier essai d'Umbre Legacy. Elle sourit - sincèrement lui signale son instinct de journaliste - et c'est parfait. L'entretien n'en sera que plus aisé. Après un traditionnel raclement de gorge, le journaliste posa son stylo sur sa feuille et enterra l'ancre de son regard dans l'iris de sa cliente.
Journaliste : Bonjour, Pauline Umbre, et merci de nous accueillir. Je vais aller droit au but, cet interview est prévu pour durer assez peu de temps, mais j'espère que vous pourrez nous en dire assez long sur votre compagnie. Bien, allons-y. Vous êtes donc la fille du producteur sans visage, Umbre, décédé à Fundance ?
Umbre Legacy : Oui. Mon père a travaillé plusieurs années dans cette ville et il a obtenu une fois le titre, à une époque où la ville était légèrement plus active et dotée d'une culture intéressante. L'époque des Films du Cyborg ou de Misterdada, aujourd'hui à Gérard Merveille.
Journaliste : Vous étiez à l'époque réalisatrice pour la compagnie de votre paternel, comment avez vous réagi à sa disparition ?
Umbre Legacy : Oh, eh bien, très mal. Tout allait plutôt bien, tout commençait à aller bien, la politique de mystère autour de mon père n'avait pas été inquiétée par les journalistes, même si beaucoup se posaient des questions et les films commençaient à prendre forme, sans être bien bons pour autant. Mais, cette nuit là, il travaillait sur le scénario d'un nouveau film après une petite absence des studios de Fundanse et quelques semaines sabbatiques loin du studio, et il a disparu. Quand je suis arrivée chez lui pour travailler, sa maison avait prit feu et son corps était trop brûlé pour y comprendre quelque chose. Mais depuis, l'enquête à été ouverte et je ferais tout pour savoir ce qu'il lui est arrivé. En tant que réalisatrice et productrice, je serais bien placée pour faire découvrir cette vérité au monde.
Journaliste : Votre père avait ouvert une branche de sa société sur le sol de Gérard Merveille non ?
Umbre Legacy : Oui, News from Arkham. Il y travaillait beaucoup moins et les quelques films lancés étaient en quelque sorte des sondes. Mon père avait toujours eu beaucoup de respect pour Gérardmerveille. Cette ville est la capitale du Cinéma de Ciné Island, sans concurrentes et elle rayonnait largement jusqu'à Fundanse. Les producteurs qui y officiaient avaient beaucoup de talent et mon père n'avait pas osé s'aventurer sur ce terrain pendant longtemps, jusqu'à quelques semaines avant sa mort. Depuis, News from Arkham a été supprimée, ainsi que la Umbre Communauty, par mes soins mais je suis de retour et l'héritage d'Umbre a décidé de poser ses graines à Gérardmerveille cette fois, dans plusieurs buts évidents. Umbre Legacy sera un studio dans la continuité de Communauty et je vous ferai signe à chaque fois qu'un de nos films sortira. Le tout premier, dont je ne suis pas très fière, Rekindled, sera disponible en salle dès le 29 de ce mois. Nous comptons avancer lentement, mais nous espérons avancer sûrement.
Journaliste : Merci de vos réponses, et au plaisir de vous laisser vous imprégner de notre ville.