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MMP présente
Recordar

Un soir de pluie, sur une route Départementale de Bourgogne, une petite Fiat garée sur le bas-côté.  

 

La voiture, tous phares allumés, ne démarre plus. Le véhicule a stoppé d'un coup, comme ça, en plein milieu du chemin qui mène Gazelle (Cécile du Psykopatland) à la maison. Flûte, flûte, flûte : Gazelle ne connaît rien, ou pas grand'chose à la technique automobile, à la différence de son mari Sam (Barry Lynch). Seulement Sam, il n'est pas là - et ne manquera pas de se moquer d'elle quand il apprendra ça...  

Prenant son courage à deux mains, elle attrape sa petite lampe de poche, sort de la citadine, ouvre le capot, vérifie les bougies, l'état de la batterie.  

Et puis, elle tique sur un cadran gris-blanc situé à l'extrêmité du moteur, un drôle d'objet qu'elle n'avait jamais vu sur sa Fiat - peut-être un système d'alarme que son Sam lui aurait installé sans le lui dire ?! Une loupiote rouge clignote sur le cadran, signalant - signalant quoi ?! - il n'y a rien de marqué dessus. Ou plutôt si, une inscription quelque peu cachée par la graisse et la poussière. Elle frotte le cadran, rapproche la lumière, distingue des lettres...  

"recordar"  

La jeune femme ne comprend pas. Recordar ? C'est de l'italien, de l'espagnol ? Machinalement, elle referme le capot.  

Quelqu'un la dévisage sur le siège passager. Une jeune femme (Stacy Chapelle) dont elle a du mal à percevoir les traits à travers la pluie qui maintenant fouette le pare-brises, mais dont elle sait qu'elle la regarde fixement.  

 

Gazelle se réveille en sueur dans son lit, son mari ronflant bruyamment à ses côtés. La Fiat ne s'est jamais arrêtée au bord de la route, elle n'a jamais eu de panne. Elle sait où ils se trouvent : plus en France, non - en vacances chez sa soeur Cassandra (Kerrilyn McCole). Elle se lève rapidement. Sam grogne quelque chose. Le carrelage frais sous ses pieds la rappelle à une douce réalité : l'été sera bientôt là. Cassandra tient un hôtel ici, dans le Golfe de Valence. Elle va se désaltérer dans la salle d'eau.  

 

Aaron (Conor Hartnett) se promène seul sur un tracé de randonnée du côté de Château-Chinon, au milieu d'une végétation luxuriante - il a énormément plu cet hiver et le soleil printanier darde particulièrement fort, histoire de rattraper son retard... Le jeune homme croise régulièrement d'autres marcheurs et touristes qu'il salue chaleureusement : son enfance, il l'a passée ici avec ses deux soeurs Gazelle et Cassandra, ce sont des enfants du pays attachés à "leur" terre. Ensemble, ils ont fait les quatre-cents coups. Comme il restait le "petit dernier", leurs grands-parents lui ont toujours épargné les corrections qu'il méritait pourtant. Il repense souvent à cette époque avec bonheur. Poussé par le vent, il reprend le petit sentier qui l'amène à "LA" cabane, un lieu de leurs jeunes années où ils avaient trouvé d'anciennes revues ("Paris-Match", "Détective", "Point de Vue") avec lesquelles ils refaisaient le monde et jouaient aux journalistes, aux présentateurs TV...  

La cabane est toujours là, abandonnée après tant d'années, éloignée des sentiers et cachée par de grands feuillus - toujours debout, c'en est même étonnant.  

Pas de signe de vie, aucun autre enfant, cette cabane est restée la leur : machinalement, il pousse les gonds rouillés de la vieille porte vermoulue et se prépare à revoir la petite pièce telle qu'ils l'ont abandonnée il y a quinze-vingt ans, avec les revues, la petite table, le seau...  

A la place, il surprend une jeune femme aux cheveux de jais en train de peindre un mot inconnu sur le mur du fond.  

Recordar  

Elle se retourne et le fixe intensément. Aaron lui fait un petit signe de la main...  

"- Euh... Salut."  

 

"- VALENCIA, último paro - terminus !"  

Il se réveille en sursaut dans sa couchette wagon-lit quand le contrôleur signale aux voyageurs leur arrivée à Valence. La bouche pâteuse, il rassemble ses affaires et essaye de faire passer ses douleurs dorsales - il a très mal dormi, et en plus ce rêve... Ce visage étrangement familier.  

Il retrouve Cassandra, l'aînée, à la gare. Les salutations sont glaciales. Elle lui dit qu'il est en retard, que Gazelle et son mari sont arrivés depuis deux jours. Il lui répond qu'il s'en cogne, qu'il a sa vie à côté, que c'est sympa qu'il les ait invités mais que si c'était pour les accueillir comme ça... Elle se reprend, lui assure qu'il aurait du prendre ses dispositions... Le reste du trajet se déroule dans un silence de plomb. Une demi-heure de route plus tard, Aaron a eu le temps d'admirer le paysage grandiose de la région et siffle à la vue du bel hôtel racheté une bouchée de pain par sa soeur. Sans la crise de l'immobilier qui a durement frappé le pays en 2009-2010, il est probable que jamais elle n'aurait pu concrétiser ce rêve. Bientôt cinq ans qu'elle est arrivée ici, cinq années d'efforts et de sueur mais qui ont fini par payer : le statut "quatre étoiles" de l'établissement est désormais officiel. Le moral d'Aaron se pare tout-à-coup des teintes ensoleillés des murs de l'établissement.  

 

Le jeune homme a peu de bagages : il s'installe très vite dans sa chambre, attenante à celle de Gazelle et s'en va retrouver le reste de la famille sur la terrasse couverte du restaurant pour un petit-déj' "à la Française" copieux. Pendant qu'ils devisent de tout et de rien, Aaron se tourne vers Cassandra :  

"- 'Recordar', ça veut dire quelque chose en espagnol ?"  

Gazelle avale de travers, tousse, s'essuie rapidement et jette à son frère un regard halluciné.  

Cassandra les regarde tous les deux en silence tandis que Sam s'est brusquement arrêté de manger. Il les observe en train de se dévisager pendant un instant qui semble durer ...  

... trop longtemps, il répond :  

"- C'est un verbe espagnol - ça se dire "se rappeler" - de quelque chose. C'est un transitif." Toujours la précision du prof de fac, quel que soit le sujet abordé - Sam ne pouvait s'en empêcher.  

La propriétaire des lieux trouve tout d'un coup son verre de jus de fruits fascinant et semble perdre ses pensées dedans... C'est vrai, de quoi devraient-ils tous "se rappeler" ? Elle-même a vécu un songe étrange : elle était infirmière dans un hôpital et regardait des jeunes filles partir en obstétrique. Et soudain, elle croise cette gamine sur un brancard qui part aux urgences : elle vient d'écrire le verbe avec son sang. Sur son ventre.  

Cassandra, Gazelle et Aaron finissent par échanger des regards lourds.  

Cassandra sait - du moins croit savoir. Cette jeune fille, c'est leur mère.  

Leur mère qui les a abandonnés.  

 

(Script original)

Scénario : (1 commentaire)
une série A fantastique (Psychologique) de Gregory Tilford

Conor Hartnett

Cécile du Psykopatland

Barry Lynch

Kerrilyn McCole
Avec la participation exceptionnelle de Stacy Chapelle, Carrie Tager
Sorti le 26 juillet 2014 (Semaine 499)
Entrées : 13 547 916
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