C'était une méprise, une malheureuse méprise... Une erreur - si banale erreur humaine.  

4 février 2012, dans les souterrains de l'Armée Française, quelque part au-dessous de Vitrolles.  

Le Lieutenant Carmondy de la Croix de Castries (Ronald Caine) aurait pu décrocher le Nobel de Science : neurobiologiste de formation, ses travaux sur l'influence des psychotropes sur le comportement des individus lui avaient valu reconnaissance de la part de ses pairs, gros contrats auprès de prestataires pharmaceutiques privés et surtout intégration pour la moins rapide dans les sphères décisionnelles de l'Élysée.  

On lui avait alors assigné une mission d'importance critique pour la Défense Nationale : la réalisation d'une nouvelle arme biologique indétectable, non létale mais fatale pour les éventuels adversaires de l'État : une arme qui devait donner de l'amour.  

Tout individu à son contact (indolore, incolore) volatile ne devait plus développer pour son prochain que fidélité, amour, compassion, générosité et candeur. l'État Français - qui n'avait plus les moyens d'une armée puissante - comptait pallier sa relative faiblesse de nation désormais "moyenne" par un usage systématique de cette invention géniale sur ses théâtres des opérations extérieurs. Ou intérieurs.  

Autant dire que la pression élyséenne n'était pas légère... La Présidente en exercice, Lorie Belmont-Morrissey (Virginia Flanagan), avait été élue sur la réduction drastique des déficits publics - et surtout sur une "autre idée" de la France, celle d'une contrée apaisée dans laquelle l'Amour du Prochain devait devenir une fin en soi (Amour du Prochain était d'ailleurs le nom de son parti). Même si l'on devait imposer le "Vivrensemble" - c'était pour la bonne cause.  

Et voilà que tout était en train de partir en sucette.  

Tout avait commencé par un transport ferroviaire de marchandises anonyme au sein duquel l'Armée avait affrété un wagon pour entreposer ce que Carmondy et ses collègues avaient nommé le "HGF 04022/012". Le train devait arriver à l'Aéroport de Marignane et la cargaison partir pour un quelconque pays Orient-Oriental compliqué.  

Il y avait eu un problème : un des scellés des bonbonnes n'avait pas du faire l'objet d'un contrôle suffisant, un peu d'HGF s'étaient répandu dans l'atmosphère confinée du wagon.  

Carmondy avait eu vent des premiers effets peu de temps après l'arrivée du train en gare de Marignane... On avait vu des agents SNCF des deux sexes commencer à se déshabiller et se faire des papouilles au beau milieu des voies et tout cela s'était achevé en "partie fine" - expression consacrée qui avait pour Carmondy la valeur d'une catastrophe annoncée.  

Pire : l'Armée, qui avait depuis investi l'endroit avec les tenues adéquates, avait noté la disparition de plusieurs palettes de marchandise. Et les GPS greffés sur ces dernières avaient mystérieusement été retirés.  

Pour couronner le tout, voila que la Présidente le réclamait en visio-conférence pour lui montrer un feuillet issu d'un groupuscule terroriste se faisant appeler les "Holy Ganja Freaks" : le discours, d'obédience crypto-natio-marxisant était visiblement l'oeuvre d'un fou-furieux.  

Il appelait tout simplement à la sédition, à la désobéissance civique et à l'amour sans contrainte. Et annonçait qu'il projetait d'ors et déjà de répandre des extraits de l'arme militaire dans l'atmosphère des plus grandes villes du pays, afin que celui-ci retrouve "paix et harmonie blah-blah-blah..." Le "groupe" allait commencer par les banlieues dites "chaudes"...  

Ce qui aurait fait rire Carmondy s'il savait où se trouvaient les fûts manquants, et s'il ne commençait pas à soupçonner une magouille de sa bonne amie Lorie.  

(Script original réalisé dans le cadre du Concours "Fin du monde et utopie")