Alain Duperey (Patrick Lassek) tournait en rond dans son bureau, jetant de temps en temps un oeil aux photos qui étaient épinglées sur le mur, mais rien ne lui venait à l'esprit. Voilà un mois déjà qu'il bossait sur cette enquête sans avoir réussi à trouver une piste. Déjà trois cadavres, trois victimes tuées selon le même mode opératoire, mais l'assassin semblait assez doué pour ne laisser derrière lui aucun élément pouvant faire avancer le dossier.  

"En général, ce genre de taré aime jouer avec nous, et attirer tous les flash vers lui. Il faut vraiment que je tombe sur le seul barjo du pays assez malin pour se faire discret quand il faut."  

Un mois sans avancer. Il allait devoir rendre des comptes à sa chef, et il savait d'avance que ça allait être très désagréable. Cette saleté de bonne femme, nommée à son poste grâce aux relations de son paternel masquait toujours son incompétence derrière une autorité excessive qui lui avait valu le surnom de "Bouledog" auprès des agents du commissariat, un surnom qu'ils se gardaient bien d'utiliser devant elle évidemment. Mais si jusqu'à présent, le lieutenant Duperey avait su faire le nécessaire pour avoir le moins souvent affaire à elle, il sentait que cette fois-ci il n'y couperait pas. Et comme il n'avait rien à avancer pour son enquête, qui piétinait depuis le début, il sentait que l'entretien allait tourner au vinaigre.  

"Un bouledogue, c'est déjà pas commode, mais alors un bouledog avec du rouge à lèvres..."  

Duperey souriait de son bon mot quand on poussa violemment la porte de son bureau. Ca y est, c'était l'heure, et il n'avait aucun os à donner à ronger. Jetant une dernière fois un oeil aux photos du mur, dans l'espoir d'avoir tout à coup une illumination le menant sur une piste, ou d'apercevoir un détail qui lui aurait échappé jusque là, il ignora une seconde la personne qui l'appelait sèchement dans son dos. Il se retourna finalement vers la porte en soupirant, prêt à affronter sa chef, lorsqu'il découvrit que celle qui l'appelait n'était pas le Bouledogue, mais Emilie Lafarge (Gwendolyn Henriksen), une collègue arrivée quelques mois plus tôt dans le commissariat.  

Le jeune lieutenant Lafarge était de la nouvelle école, de ces flics qui veulent que les choses aillent toujours plus vite qu'il ne faudrait. Grâce à ça, elle s'était tout de suite entendue avec "Bouledogue", et comme sa chef, la nonchalence de Duperey l'agaçait donc toujours. Pourtant, comme sa chef également, elle ne pouvait nier l'efficacité du bonhomme sur le terrain, mais malgré tout, elle ne pouvait pas s'empêcher de toujours vouloir pousser son collègue pour aller plus vite, et ce matin là, elle n'était pas prête à se comporter différemment de l'habitude. Le fixant dans les yeux, elle l'appela de nouveau d'un air agacé, lui annonçant que quelqu'un demandait à le voir.  

"Doucement ma grande ! Il va pas se barrer en courant ce type !"  

D'un pas tranquille, Duperey suivit sa collègue qui traversait les couloirs du commissariat au pas de course, faisant par moment des pauses forcées pour attendre son collègue qui trainait derrière, saluant de temps à autres les collègues qu'il n'avait pas encore rencontré depuis son arrivée. Losrqu'ils furent arrivés à l'accueil, elle présenta Clara Lamal (Ayesha Kapoor), une jeune femme à la peau mate qui s'était présentée au commissariat et avait demandé à parler à celui qui s'occupait de l'affaire de cet assassin qui avait tué une troisième fois la veille. Elle disait avoir des éléments qui pourraient intéresser le responsable du dossier.  

"C'est ça ma poulette ! Un mois qu'on n'a aucun élément, et c'est toi qui va m'en apporter un sur un plateau."  

Duperey fit entrer Lafarge dans son bureau sans conviction. Il avait autre chose à faire que perdre du temps avec une greluche qui se croyait plus forte que la police. Mais s'il pensait s'être préparé à tout, connaissant ce genre de "témoin", il fut malgré tout surpris par la déclaration de la jeune femme.  

Elle était animatrice radio, et d'après elle, elle avait eut le tueur au téléphone chaque soir où il avait commis un meurtre, en direct dans son émission. Duperey se retint d'éclater de rire, et regarda le lieutenant Lafarge avec un air de ne pas y croire, mais voyant que le témoin semblait on ne peut plus sérieuse, il demanda à entendre les enregistrements des conversations. Heureusement, Clara Lamal avait tout prévu, et sortit une cassette de son sac à main, que Duperey glissa immédiatement dans l'appareil qui trainait là dans son bureau.  

"Voilà que je suis payé à écouter une émission où des détraqués viennent déballer tous leurs maux devant des millions d'auditeurs"  

La voix qui retentit du magnétophone (Weston Jarred) ne trahissait aucun dérangement. L'auditeur au téléphone semblait serein, mais effectivement, comme l'avait annoncée l'animatrice, les éléments qu'il donnait au téléphone était plus que troublants. Evidemment, l'auditeur n'annonçait pas ouvertement qu'il allait commettre un meurtre. Il parlait sous forme de métaphore, à propos de sa vie, de ses souffrances, mais à travers celles-ci, on pouvait établir des liens avec les meurtres qui à chaque fois avaient eut lieu dans les heures qui suivaient l'appel.  

Lorsqu'il arrêta la cassette, à la fin du troisième extrait audio, Duperey resta longuement silencieux, repassant dans sa tête tous les détails des conversations radio qu'il venait d'entendre. Il n'en croyait pas ses oreilles, et lorsqu'il regarda sa collègue, il comprit quelle était son idée. Mais elle se trompait.  

"Je connais trop bien ces jeunes flics. Elle veut qu'on balance tout à la radio pour faire peur à ce taré qui croit toujours qu'on ne sait rien de lui, pour le pousser à la faute. Mais au contraire, le mieux est de continuer de le lui faire croire, et de le laisser se livrer à nous. Il n'y a que comme ça qu'on arrivera à le coincer.  

Finalement, ce taré ne vaut pas plus que les autres. On a trouvé sa faille. Le tout maintenant est de le faire assez vite pour éviter une nouvelle victime..."