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Les Flims Plalstique présente
L'extraordinaire Odyssée de Santa

Premières impressions : un silence de mort, une obscurité totale, un apaisement intense. Il ouvrit les yeux. Non, la lumière l'atteignit plutôt de plein fouet et il se rendit compte qu'il ne pouvait pas fermer ses paupières car elles étaient absentes. Autour de lui, de nombreuses silhouettes de gabarits divers se levaient lentement. Une fois l'éblouissement digéré, il put avoir une première vue d'ensemble du lieu dans lequel il avait... atterri. La pièce était grande, peut-être comme une église, et sobrement décorée. Quelques statues lointaines dont il ne parvenait pas à saisir les expressions, des draps pendants aux couleurs vives et une grande porte, une seule, qui s'ouvrait lentement face à eux. Mais son regard se posa plutôt sur les visages de ses camarades d'infortune. Ou plutôt sur leur absence de visage. Ils avaient tous la face blanche comme de l'ivoire. Des squelettes. Ainsi, on devenait un squelette dans l'au-delà. Mais la Mort, dans son infinie bonté, leur avait permis de garder des vêtements. La vision de cette danse macabre, avec tous ces squelettes qui marchaient vers la porte comme une horde zombie, était au mieux grotesque. Ainsi, il se leva à son tour et suivit la foule. Il comprit qu'il attirait davantage les regards. Peut-être parce qu'il portait un costume de père noël. Ou bien, peut-être parce qu'il l'était, le Père Noël.  

Les anciens vivants, ou les nouveaux morts, question de point de vue, arrivèrent dans une salle plus grande encore. De part et d'autres se trouvaient des bureaux derrière lesquels étaient assis des agents en uniforme, squelettes également. Ils semblaient contrôler les identités de tous les nouveaux venus qui se rangeaient en file. Le Père Noël se rangea dans le premier rang qu'on lui indiqua et attendit patiemment son tour, observant la cohue et le brouhaha qui contrastaient avec le silence religieux de la pièce précédente. Il fut néanmoins frappé par l'abattement qui animait chacune des personnes présentes. Ils acceptaient la fatalité avec une sérénité troublante. De son côté, le Père Noël sentait une boule de feu qui frappait dans sa poitrine et qui lui ordonnait de tout envoyer paître. Mais il avait un standing et une réputation à tenir. Le Père Noël ne pouvait pas se laisser emporter par la colère en public. Au bout d'une éternité - mais qu'est-ce que l'éternité quand on a tout son temps ? - il atteignit l'agent qui avait le nez collé à un écran d'ordinateur. L'employé leva à peine les yeux et s'adressa à lui d'une voix monocorde.  

- Nom ?  

- Père Noël.  

- Mmh. J'ai pas.  

- Oh. Attendez une seconde. Peut-être Santa Claus ?  

Pour toute réponse, l'agent attrapa une petite fiche sur laquelle était écrit le nom du nouvel arrivant et tamponna un gros "8" rouge sang en travers. D'un signe de tête fatigué, il indiqua au Père Noël qu'il pouvait prendre la carte et emprunter la porte qui se trouvait dans son dos.  

 

********** L'extraordinaire Odyssée de Santa *************  

 

https://www.youtube.com/watch?v=jT4A-MSQgoI  

 

Les arrivées étaient toujours un moment intense pour les enfants de la ville d'Octavo Ciudad. Ceux-ci piaffaient d'impatience devant la lourde porte en bois qui donnait sur l'avenue et quand celle-ci s'ouvrait et déversait son flot de nouvelles têtes, les gamins se mettaient à sauter dans leurs pattes afin de leur proposer leur aide pour leurs premiers jours dans le huitième monde.  

- Hey ! Poussez pas !  

La plus menue de la bande avaient la triste habitude de se faire bousculer par les plus grands et de ne jamais parvenir à proposer assistance à qui que ce soit. Elle s'appelait Maricruz et si elle était réputée pour avoir un caractère bien trempé, elle avait également un handicap physique qui lui empêchait de se faire une place parmi les autres. De sa mort, dont les circonstances lui étaient inconnues, elle avait gardé une hanche brisée qui lui donnait une démarche boitillante et traînante. Ainsi, comme toutes les fois précédentes, les cibles potentiellement intéressantes lui passèrent sous le nez et elle dut se résigner à abandonner. Une fois de plus. Elle baissa lentement son petit visage blanchâtre qui arborait fièrement une tignasse qui tombait en deux longues tresses. Mais au moment de prendre la poudre d'escampette, elle aperçut une grosse silhouette qui portait un costume rouge et qui semblait un peu perdue.  

 

Santa Claus, puisque c'était visiblement cette identité qu'on avait retenue pour lui en ces lieux, contemplait de tous côtés. L'avenue était longue et large mais elle était encaissée entre de nombreux bâtiments colorés qui avaient l'air de tomber en avant. L'ensemble était festif et joyeux, mais Santa Claus ne put s'empêcher de ressentir une certaine oppression. La foule était dense et de la musique mariachi résonnait dans ses oreilles. Des rues étroites partaient dans toutes les directions et il dut interpeller un passant afin de savoir s'il exister un quelconque bâtiment officiel qui pourrait le renseigner. L'homme lui sourit de toutes ses dents en or et lui indiqua un grand palais vert cactus qui dominait la ville. Alors qu'il s'apprêta à rejoindre celui-ci, Santa Claus heurta une petite fille qui s'était glissée devant lui.  

- Pardon petite.  

- Hey ! Si vous avez besoin d'aide, n'hésitez pas à demander à Maricruz. Maricruz connaît tout Octavio Ciudad et saura vous renseigner sur...  

- J'ai pas le temps, petite. Va jouer.  

Le ton autoritaire, bien que non agressif, de Santa Claus cloua le bec de la gamine qui le laissa s'éloigner, les bras ballants.  

 

Cependant Maricruz n'allait pas lâcher une si belle opportunité. Ainsi, aussi discrètement qu'elle le put, elle se mit à filer le train du gros bonhomme. D'ailleurs, son allure générale ne lui était pas inconnue. La progression était difficile à travers la foule bariolée et sa hanche lui fit perdre plusieurs fois du temps. La fillette frémit quand elle comprit que le nouveau venu se dirigeait droit vers le palais du gouverneur. Il y entra et après un instant assez bref, il fut reconduit à la sortie par deux mastodontes. L'homme en costume rouge se mit à hurler.  

- VOUS N'SAVEZ PAS QUI J'SUIS ? JE N'AI RIEN À FAIRE ICI ! RIEN ! ON A BESOIN DE MOI, LÀ-HAUT ! JE SUIS SANTA CLAUS ! C'EST UNE ERREUR MONUMENTALE !  

- Ouais, ouais, ils disent tous ça... Maintenant, j'te conseille d'aller visiter un autre quartier, avant que je commette vraiment une erreur monumentale...  

L'espèce d'agent de la sécurité pointa une arme automatique sur l'homme en rouge. Maricruz, dissimulée derrière une carriole, frissonna. Que pouvait-on finalement risquer lorsque l'on était déjà mort ? Il fallait être bien stupide pour chercher à le savoir. De sa cachette, la fillette écarquilla les yeux à l'évocation du nom du bonhomme. Était-ce possible ? Ce qui était certain, c'était qu'elle n'était pas la seule à observer la scène avec un intérêt prononcé. Au coin de la rue, un dénommé Pancho se lissait imperceptiblement la moustache. Il arborait un large sombrero, une tenue de révolutionnaire militaire et un sourire immense.  

 

Les rues commençaient à se vider et une certaine obscurité gagna la ville. Santa Claus sentit un léger tremblement le parcourir. Il était clair qu'il n'allait pouvoir compter sur personne ici. Malgré la chaleur dégagée par Octavio Ciudad en apparence, il comprit que le chacun-pour-soi était la règle numéro un. Pourtant, il remarqua la petite fille rencontrée plus tôt qui s'approchait à nouveau.  

- Tu lâches rien, toi. Hein ?  

- Vous êtes Santa Claus ? Moi, je crois en vous. Et je peux vous aider. Mais la nuit va bientôt tomber et il ne fait pas bon rester dans les rues à cette heure ci.  

Et sans discuter, le Père Noël suivit aveuglément la fillette qui l'emmena dans un labyrinthe de ruelles pour terminer dans une cour entourée de hauts immeubles sombres. Là, elle souleva une trappe et pénétra dans une vieille cave abandonnée qui lui faisait office de planque. Des squelettes de rats se mirent à décamper à la vue de la faible lumière. Santa Claus et Maricruz s'installèrent sur un fétu de paille et à la lumière d'une bougie, ils discutèrent toute la nuit. Le sommeil n'étant qu'un loisir comme un autre, ils s'en passèrent aisément. Santa révéla qu'il ignorait pourquoi il se trouvait ici. Il se souvenait seulement de s'être couché, comme tous les soirs, et de s'être réveillé ici, inexplicablement. Mais il savait qu'il était suffisamment indispensable pour que ce fut une erreur. Le Père Noël ne pouvait pas mourir. Maricruz, elle, eut encore plus de choses à raconter. Elle expliqua à Santa Claus tous les rouages du fonctionnement du huitième monde et notamment de sa capitale, Octavia Ciudad. Elle ignorait si l'on pouvait revenir parmi les vivants, mais le but des citoyens d'Octavio était autre : rejoindre le neuvième monde. Quand elle le décrivit, ses yeux se mirent à briller. Elle évoqua un jardin éblouissant, royaume de la paix, de la félicité et de la joie. Un vrai monde de rêve. Mais seuls les plus méritants y avaient droit. C'est pourquoi, comme la plupart des autres enfants de la ville, Maricruz tentait de rendre service pour accumuler les bonnes actions et ainsi atteindre ce neuvième monde tant espéré.  

 

Le lendemain matin, la fillette emmena Santa Claus rendre visite au professeur Gabriel. Le vieux squelette à la barbe grisonnante était réputé pour son érudition et ses connaissances occultes du huitième monde. Ainsi, il était le plus souvent assimilé à un vieux fou gâteux. Mais les enfants, et Maricruz la première, lui vouaient un véritable culte. Le vieil homme les reçut chez lui, un sombre appartement où des fétiches aussi inquiétants que poussiéreux les dévisageaient en silence. Le professeur Gabriel écouta patiemment l'histoire du Père Noël et se mit à remuer lentement la tête de gauche à droite d'un air navré.  

- Regagner le monde des vivants... J'ai bien peur de vous apprendre que cela soit impossible. Il n'existe aucun moyen de faire le voyage à l'envers. Je suis désolé.  

- Oh. Je vois.  

- Toutefois... Toutefois, les lois qui régissent l'ordre des choses ne sont jamais immuables. J'aime à croire qu'il existe toujours un moyen pour contourner les règles. S'adresser à la plus haute autorité du huitième monde pourrait être une idée intéressante. Diaboliquement dangereuse, certes, mais intéressante.  

- J'ai essayé de contacter le gouverneur mais...  

- Le gouverneur ? Ha ha ha ! Quelle bonne blague ! Ce bon à rien ne serait même pas capable de vous guider jusqu'à la sortie de la ville ! Non, je pensais à celle personnifiée en la mort elle-même.  

Maricruz se mit à bondir.  

- SANTA MUERTE ???  

- Doucement petite. On ne crie pas son nom impunément. Mais oui, je parle bien d'elle. Elle existe, j'en suis persuadé et vit très loin d'ici. La route pour y parvenir sera longue et périlleuse. Il vous faudra affronter de nombreux obstacles : les pierres qui s'entrechoquent, les déserts du crocodile Xochitonal, le vent de pierres tranchantes d'obsidienne ou encore le serpent à plumes, le terrifiant Quetzalcoatl. Plus tous les dangers inconnus que je n'ai pas pu recenser. Vous sentez-vous capable, cher ami, de braver tous ces dangers ?  

Le silence qui suivit fut éloquent. À l'extérieur, Pancho avait l'oreille collée contre la porte du professeur et ne perdait aucune miette de la discussion qui y avait lieu. Le révolutionnaire pense que s'il s'agissait vraiment du fameux Santa Claus et que celui-ci parvenait à rejoindre le monde des vivants, il y avait peut-être un moyen de prendre sa place et ainsi finir ce qu'il avait commencé. Pancho lâcha un discret "Hasta siempre la revolucion, Caramba..." et décampa avant de se faire remarquer pour de bon.  

 

Le vent frappait la lande morte avec une violence déconcertante. Santa Claus observa ce visage désolé avec un mélange de crainte et de détermination. Le chemin allait être long mais il ne voyait pas d'autre alternative. Ainsi, il se mit en route et s'enfonça dans la brume. À ses côtés, on entendait une démarche claudicante. Maricruz était du voyage. Santa Claus n'avait pas trouvé d'argument suffisamment fort pour empêcher la gamine de l'accompagner. Malgré sa lenteur, il devait même avouer que son aide ne pouvait être négligeable. Et de son côté, la fillette se disait que si elle parvenait à conduire Santa Claus jusqu'à Santa Muerte, les portes du neuvième monde lui seraient forcément ouvertes...  

Les compagnons de route ne remarquèrent pas l'ombre qui les suivait. Le sournois Pancho, prêt à tout pour forcer son destin, suivait les deux aventuriers avec application et furtivité. Cette opération qu'il menait seul lui rappelait ses plus glorieuses heures lorsqu'il faisait le bonheur des guérillas dans toute l'Amérique Latine. Et il ne faisait aucun doute qu'il sauterait sur la première occasion pour prendre la place du Père Noël...  

 

***  

 

Dans le Royaume des Morts, la distance, comme le temps, était une chose toute relative. Mais la tour d'ivoire et de nacre dans laquelle s'ennuyait Santa Muerte était encore plus lointaine que pouvait le supposer n'importe quelle imagination. La Mort tuait le temps depuis déjà une éternité. Attraper les âmes ne l'amusait plus depuis des lustres. Même les mensonges qu'elle avait contribué à créer lui paraissaient terriblement insignifiants. Pauvres fous qui croyaient en ce neuvième monde illusoire et chimérique... Les humains, vivants ou morts, acceptaient si facilement les idées les plus extravagantes. Le crâne morbide et couvert d'un voile, posé au sommet d'un squelette fuselé qui l'accueillait temporairement, se mit soudain à capter quelque chose. Rien ne lui échappait et pourtant, un événement inhabituel s'annonçait. Que le vieux Santa Claus n'acceptât pas son destin, ce n'était pas étonnant. Il était pourtant bien écrit que son heure était venue. Mais il n'était pas seul. Et ça, ce n'était pas prévu.  

 

 

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Avec les voix de :  

- Laura Lee Land (Maricruz)  

- John Coleman (Santa Claus / Père Noël)  

- Leonard Berger (Pancho)  

et  

- Anastasia Quinlan (Santa Muerte)  

 

Scénario : (1 commentaire)
une série B d'animation (Conte (macabre) de Noël) de Pavel Brown

John Coleman

Laura Lee Land

Leonard Berger

Anastasia Quinlan
Musique par Tara Fox
Sorti le 17 décembre 2033 (Semaine 1511)
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