2122. L'humanité presque toute entière se retrouve désormais sous la protection de l'Empire, une institution centrale qui exerce un contrôle absolu sur le développement technologique en échange d'une pacification planétaire. Cette paix relative n'empêche pourtant pas les grandes cités du monde de sombrer dans le chaos. Laissées à elles-même, les villes sont sous le contrôle d'une pègre tentaculaire tolérée par l'Empire.  

Indigné par cette criminalité sans cesse croissante, des groupes de protestants organisent une révolution visant à anéantir l'Empire et restaurer l'idée de gouvernements responsables au service du peuple. À bout de ressource après plusieurs batailles perdues, les révolutionnaires jouent leur dernière carte en capturant l'Empereur lui-même, espérant être enfin pris au sérieux. En réponse à cet acte de guerre, l'Empire met sur pied une opération secrète exceptionnelle faisant appel à ses meilleurs éléments. C'est ainsi qu'une bande hétéroclite de voleurs, de tueurs et de contrebandiers est réunie et lancée contre les forces révolutionnaires. Leur mission : tuer tous les terroristes et remmener l'Empereur sain et sauf au bercail.  

Les flammes dévoraient la chaire de leurs camarades tombés au combat. On leur avait permis d'ériger un bûché funéraire tout près des limites de la gigantesque base militaire, tout en leur laissant l'intimité demandée. Les quatre survivants de l'opération Thelak fixaient les flammes en silence. Personne n'avait voulu prononcer de mots d'adieu. Seule Ellen semblait sur le point de craquer. Ses deux fils auraient dû se trouver là, parmi les héros, mais on n'avait pu retrouver leur corps. Gail posa une main sur son épaule. Elle n'avait rien de mieux à offrir comme réconfort.  

Les deux hommes furent les premiers à se détourner du bûcher et à regagner la voiture. Ellen et Gail suivirent peu après. La nuit tombait sur la base et il était temps pour eux de regagner des cieux plus cléments. Malgré leur triomphe, ils ne seraient jamais la bienvenue chez les Forces de l'Empire. Ils poursuivraient leur vie de paria, seulement cette fois, ils seraient libres. Mais pour combien de temps ?  

Nato les conduisit jusqu'au ghetto de Delmath, la mégalopole impériale, tellement surpeuplée qu'elle en devenait le meilleur endroit pour se faire oublier. Nato avait plusieurs contacts dans le secteur, dont un en particulier qui se proposait de les héberger le temps qu'ils pansent leurs plaies. Il ne se souciait guère de ternir ainsi sa réputation, en autant qu'il soit compensé financièrement, ce que Nato lui avait promis. Le quatuor abandonna la voiture dans une ruelle étroite, s'assurant ainsi qu'elle soit complètement démontée et revendue en pièces détachés par les gangs de rue. En quelque sorte il s'agissait d'une offrande faite au quartier en échange d'une certaine paix d'esprit. Je vous donne une voiture, vous ne me dépouillez pas à la première occasion. Dans le ghetto, la seule loi valable était celle du donnant-donnant.  

Le LImp se trouvait au coeur du quartier, coincé entre deux immeubles de vingt étages alors que l'auberge n'en faisait que quatre. C'était un bâtiment ancien, construit a une époque où l'Empire ne faisait que commencer à s'étendre sur le monde. Bien avant que la ville ne prenne le nom de Delmath. L'édifice échappait à la destruction car son propriétaire payait assidument les taxes et menait une entreprise légitime. Il avait lui aussi de bons contacts.  

Le groupe pénétra l'auberge et fut accueilli par une petite femme asiatique derrière un pupitre sur lequel reposait un registre de taille impressionnante. Elle demanda d'une voix timide le type de chambre requis et une pièce d'identité pour confirmer la location. Nato pris sur lui de s'improviser leader de la compagnie. Il exigea deux chambres doubles reliées entre elle par une porte de service ainsi qu'un repas pour quatre servi dans l'heure. Il ne donna toutefois aucune pièce d'identité à la commis, se contentant de lui glisser à l'oreille un mot dans sa langue natale qui fit son effet. La femme s'inclina et glissa deux clés dans la main de Nato d'un geste nerveux. Elle n'offrit aucune indication au groupe pour trouver leur chambre, disparaissant plutôt avec empressement derrière un panneau coulissant conduisant dans l'arrière-boutique. Nato haussa les épaules et s'engagea dans les escaliers. Ils seraient au troisième étage, chambre 3A et 3B.  

De tout le groupe, seule Gail resta éveillée tard dans la nuit, bien qu'elle soupçonna Ellen Mage de feindre le sommeil. La jeune femme quitta la chambre en catimini et referma la porte à clé. Au rez-de-chaussé, elle tomba sur un vieux chien de garde famélique qui ne fit même pas mine de la considérer lorsqu'elle lui passa sous le nez pour sortir à l'extérieur. Peut-être n'était-il entraîné que pour s'attaquer à ceux qui entraient dans le bâtiment. Gail devrait faire attention en revenant.  

Dehors, il faisait une chaleur écrasante. Delmath était recouverte d'un épais nuage de pollution atmosphérique qui produisait un effet de serre considérable. La ville courrait à sa perte. Gail s'engagea dans une ruelle dénuée d'éclairage d'un pas décidé, bien qu'elle garda une main en permanence sur le poignard accroché à sa ceinture. Elle croisa plusieurs vagabonds fouillant dans les poubelles mais aucun ne se retourna à son passage ni n'entreprit de la suivre. La jeune femme poursuivit sa route en évitant soigneusement les rues principales, optant pour un trajet certes long mais surtout sécuritaire. Elle arriva finalement devant un escalier lugubre qui descendait au sous-sol d'une bâtisse en bois à l'abandon. Elle descendit les marches et frappa trois coups rapides à la porte qu'elle aurait facilement pu défoncer d'une simple pression de la main. Gail s'arma de patience. Cinq minutes plus tard, et sans qu'elle n'ait refrappé à la porte, celle-ci s'ouvrit enfin. De l'autre côté, un enfant qui ne devait pas avoir plus de huit ans se dressa sur son chemin, l'empêchant de faire un pas en avant. Il tenait un pistolet dans la main droite et dans la gauche un sac de papier chiffonné. Il travaillait fort sur son attitude, tentant vainement de se donner l'air d'un videur de boîte de nuit expérimenté. Gail réprima le sourire qui aurait pu lui valoir une balle dans le crâne. Elle tendit une poignée de billets au gamin en échange de quoi celui-ci lui laissa le sac de papier. Il cracha au sol d'un air méprisant et referma la porte au visage de la jeune femme. Celle-ci n'en croyait pas ses yeux. La jeunesse à la dérive...  

Lorsqu'elle regagna l'auberge, Gail avait l'esprit complètement apaisée. Tellement qu'elle passa bien près d'oublier le clébard qui gardait l'entrée. Elle opta à la dernière minute pour une entrée en douce par l'escalier de secours. Son exploit de gymnastique achevé, elle entra dans sa chambre sur la pointe des pieds. Elle tentait de regagner son lit sans heurter quoique ce soit dans la noirceur totale lorsque la lampe de chevet s'alluma. Ellen Mage était assis sur sa couchette. Dans son regard, Gail pu sentir toute la désapprobation de la vieille dame, et elle fut bien forcée d'en ressentir une honte profonde. Nul besoin de se justifier. Gail connaissait bien l'opinion d'Ellen sur les drogues et elle ne souhaitait pas entamer un nouveau débat sur la question. Elle se contenta de baisser la tête et de gagner son lit. Elle se glissa sous les couvertures toute habillée, le poignard toujours à sa ceinture et le sac de papier enfoui au fond de sa poche. Ellen éteignit la lumière mais Gail sentit bien qu'elle restait en position assise, la fixant toujours sans toutefois la voir.  

Le lendemain matin, Ethan Dark se permis l'affront de passer sa main dans le visage de Gail qui ronflait comme si l'Empereur lui-même lui en avait donné l'ordre formel. Elle se réveilla donc de méchante humeur, ce qui ne manqua pas d'amuser le rouquin qui, lui, semblait équipé d'un moral à toute épreuve. Il esquiva un coup de poignard asséné sans conviction et tendit à la jeune femme un déjeuner de roi : deux rôtis froides tartinées d'un dérivé de beurre et une vieille banane noircie. Gail se résigna à avaler en vitesse ce repas offert gracieusement par l'auberge. Elle avait une faim de loup. Les effets de son médicament s'étaient complètement dissipés durant la nuit, la laissant avec un estomac complètement vide et un mal de crâne dantesque.  

Ethan semblait se moquer éperdument de l'état de la jeune femme puisqu'il ne cessait de jacasser d'une voix forte, relatant une histoire improbable à propos d'un vaisseau dont il aurait activé le système d'auto-destruction avant de le lancer vers le campement d'une troupe de mercenaires lancée à sa poursuite, lui-même n'échappant à l'explosion atomique que grâce à une capsule réfrigérante dans laquelle il s'était enfermé. Nato écoutait le récit d'une oreille distraite par pure politesse. Ellen Mage semblait considérer sérieusement la possibilité de prendre une chambre simple au deuxième étage. Gail quant à elle prit les grands moyens. Elle interrompit Ethan dans sa tirade passionnée et, se tournant vers Nato, elle lui demanda quelle était la suite du plan. L'atmosphère de la chambre devint aussitôt plus pesante.  

Personne n'avait réellement songé à la suite des choses jusqu'ici. La question était délicate et elle en apportait de nombreuse autres. Nato y alla pour une réponse temporaire, déclarant qu'il n'avait aucun plan en tête pour le moment, hormis celui de faire profil bas. Gail poussa un soupir désappointée. Ethan Dark se laissa tomber sur un lit, lui aussi déçu mais pour d'autres raisons. Seule Ellen Mage n'eut pas de réaction visible. Son deuil commençait à peine et elle n'entrevoyait certainement pas de se relancer dans une nouvelle aventure si tôt après la perte tragique de ses fils. Personne n'osa évoquer la possibilité d'une dissolution du groupe. Même Ethan Dark ne pouvait espérer meilleure compagnie que ses camarades des deux dernières années. Tous les quatre avaient été soudés ensemble par les épreuves et rien ne pourrait les séparer malgré toutes les différences qui les opposaient.  

Ethan se releva soudain et proposa une ballade en ville pour détendre l'atmosphère. Gail accepta la proposition immédiatement. Elle avait besoin de prendre l'air et de trouver un restaurant digne de ce nom. Pas question pour elle de rester enfermée toute la journée dans cette chambre miteuse et humide. Ellen Mage, de son côté, ne prit même pas la peine de répondre. Elle ne sortirait pas. Nato, lui, déclara qu'il devait rencontrer le propriétaire de l'auberge et régler certains arrangements avec lui. Il ne pouvait donc les accompagner en ville. Gail se montra déçue, surtout parce que cela signifiait qu'elle allait passer la journée seule avec Ethan. Elle quitta pourtant la chambre avec un large sourire, ne prenant même pas la peine de coiffer un peu sa tignasse pour se donner un air décent.  

Nato descendit à son tour au rez-de-chaussé et, après avoir glissé à nouveau un mot à l'oreille de la dame à l'accueil, il emprunta le passage derrière le panneau coulissant. Nato était un homme calme et serein, mais il ne faisait confiance qu'à moitié à ses vieux contacts. Beaucoup de choses avaient changé depuis son enrôlement dans l'opération Thelak et plusieurs de ses anciens amis lui avaient fait comprendre qu'il n'était plus le bienvenu chez eux. Certains avaient même tenté de l'abattre en lui envoyant des assassins-mercenaires, mais sans succès. Nato ne leur en tenait pas rigueur. À une époque, il aurait fait la même chose et même pire si l'un de ses complices s'était mis au service de l'Empire, quelque soit la cause. Le propriétaire du LImp, lui, se fichait pas mal du passé de ses clients. Seul l'argent lui importait.  

Nato descendit ainsi une série d'escaliers qui le firent aboutir dans une petite pièce nue à l'exception d'une caméra surplombant une porte blindée. L'homme se plaça devant celle-ci et attendit, impassible. Il s'attendait à ce qu'on le laisse languir un moment par simple cruauté. Ce ne fut pas le cas. Nato entendit un lourd levier être soulevé et la porte pivota. Un homme noir de forte stature et portant des lunettes fumées s'approcha de lui et procéda à une fouille bâclé, oubliant de vérifier les jambes du visiteur. Nato ne portait aucune arme de toute façon. Il suivit le portier qui le guida dans une pièce beaucoup plus grande avec des murs en béton décorés de toiles surréalistes datant du vingtième siècle. Un tapis à motif complexe couvrait l'entièreté du sol, donnant un brin de chaleur à ce bunker improvisé. Au fond de la pièce, un homme au cheveux longs était assis derrière un grand bureau sur lequel reposait de vieux téléphones à cadran. Il semblait tenir plusieurs conversations en même temps qu'il notait à une allure ahurissante des informations dans un livre de compte géant. Nato remarqua que plusieurs autres livres semblables étaient empilés dans un coin où se trouvait aussi un coffre-fort bon marché. Une télévision à écran cathodique minuscule était posée sur le coffre, diffusant l'image statique de l'antichambre par laquelle Nato était passé.  

Le type derrière le bureau lui fit signe de s'approcher alors que le grand noir refermait la porte derrière lui, laissant les deux hommes seuls. Nato s'exécuta et le propriétaire de l'auberge coupa court à ses conversations téléphoniques, raccrochant sans dire au revoir. Il regarda Nato comme on regarde un cheval de course avant d'en faire l'acquisition. Il le jaugea ainsi quelques secondes puis il hocha la tête, visiblement satisfait de ce qu'il avait sous les yeux. Il se pencha vers sa table de travail et d'un reniflement, il fit disparaitre une ligne de poudre blanche étendue devant son livre de compte. "Tu ne vas pas croire ce que j'ai à te raconter", lança-t-il d'un ton surexcité.  

***  

Ethan Dark fumait une clope à l'extérieur du restaurant, tandis que sa compagne s’empiffrait d'un second petit déjeuner. C'était à se demander comment elle conservait sa taille de guêpe. Sous couvert de taquineries immatures, Ethan appréciait de plus en plus Gail. Au-delà du fait qu'elle lui ait sauvé la vie deux fois, elle était la seule du groupe avec qui il pouvait discuter sans se sentir diminué. Il n'avait rien contre Nato mais les deux hommes ne partageaient pas beaucoup de points communs. Ethan Dark était issu des basses castes de Shelak et il avait grandi en tant qu'orphelin à l'intérieur d'une bande de voleurs à la petite semaine. Nato, lui, était le fils d'un industriel de Delmath. Son enfance, il l'avait passé avec une cuillère d'argent dans la bouche, jusqu'à ce qu'il décide de se rebeller. Mais au-delà de ça, la vraie différence entre les deux hommes était leur tempérament. L'un était d'une froideur morbide mais ne prenait que peu de risque. L'autre était un hyperactif trop sur de lui qui n'hésitait pas à mettre sa vie et celle des autres en danger pour parvenir à ses fins.  

Ethan n'avait pas beaucoup d'affinité non plus avec Ellen Mage. Il ignorait tout de son passé sauf le fait qu'elle avait été libéré de prison pour participer à l'Opération Thelak, en compagnie de ses fils. Avec Nato, elle avait décimé plusieurs dizaines de rebelles dans les derniers instants de la mission. Même l'asiatique en était ressorti secoué. Ellen Mage était une véritable machine à tuer.  

Gail finit enfin par ressortir du restaurant, clairement repue cette fois. Sans un mot, Ethan la guida de nouveau à travers les rues bondés du ghetto, marchant fièrement au milieu des jeunes membres de gangs de rue et de leurs recrus qui faisaient la loi sur les trottoirs du quartier. Plusieurs fois il se firent offrir des drogues nouvelles et géniales, mais ils refusèrent de se laisser tenter. Ils passèrent tout près d'une bagarre qui ressemblait beaucoup à un règlement de compte raté, mais Ethan ne s'attarda pas sur la scène pour lui sans intérêt. L'homme cherchait à mettre la main sur un individu en particulier, un prêteur sur gage qui lui devait une certaine somme d'argent soi-disant perdue dans la poste. Ethan avait une mémoire sélective concernant les arrangements financiers. Lui même avait probablement un prix sur sa tête dans une ville ou deux de l'Empire pour des dettes impayées, mais comme il se trouvait à Delmath pour le moment, il ne voyait aucune raison de s'en inquiéter. L'heure était à la récolte, et tant pis si cela signifiait de ne pas faire profil bas. Nato n'était pas là pour le réprimander.  

Ils trouvèrent enfin le bureau du prêteur sur gage en question. Il s'agissait en fait d'une simple fenêtre munie de barreaux au milieu d'une façade en brique. L'accès à l'intérieur se faisait par une porte barricadée à l'arrière. Gail accepta de jouer le jeu pour Ethan. Ce-dernier s'engagea dans la ruelle tandis qu'elle se présenta à la fenêtre en prétendant vouloir acheter un bijou. Le prêteur sur gage tomba rapidement sous le charme de la jeune femme et il sortie pour elle une petite boîte en métal remplie de breloques diverses, lui suggérant des boucles d'oreille en or pour quarante dollars. Gail étira la conversation jusqu'à ce qu'Ethan apparaisse derrière le vendeur, lui glissant une lame sous le menton. La jeune femme passa sa main entre les barreaux de la fenêtre et s'empara de la boîte de bijoux. Avec son plus beau sourire, elle remercia le commerçant pour sa gentillesse et elle se glissa dans la foule des passants pour disparaitre de sa vue. Quelques minutes plus tard, Ethan la rejoignit, une lueur de malice dans les yeux. Gail lui tendit le petit trésor non sans avoir préalablement confisqué quelques items.  

Sur le chemin du retour, ils furent attirés par une foule qui s'agglutinait devant le kiosque d'un vendeur de télévisions. Un bulletin de nouvelles était diffusé. Il s'agissait d'un événement en soi puisque l'Empire communiquait rarement par ce billet depuis la fin des transmissions satellitaires. Gail et Ethan s'intégrèrent à la masse des voyous, curieux et à la fois mal-à-l'aise. Sur l'un des écrans, un homme dans la quarantaine vêtu d'un complet gris apparut sur un fond blanc. D'un ton solennel, il salua les habitants de l'Empire et se lança dans la lecture d'une feuille qu'il tenait entre ses mains. Il déclara ainsi que, suite à une opération menée conjointement par les Force de l'Empire et les Services Secrets, opération nommée Thelak, l'Empereur avait été libéré des griffes de ses ravisseurs et replacé dans ses fonctions. Il n'y avait aucun survivant chez les terroristes, un groupuscule anarchiste visant la destruction des institutions de l'Empire et la fin du régime de paix instauré cinquante ans plus tôt. Le présentateur salua le courage des héros ayant permis la libération de l'Empereur adoré du peuple, un groupe de soldats d'élite composé d'hommes et de femmes hors pairs, formés depuis des années dans les unités d'intervention tactiques mises en place par le régime impérial. La suite du bulletin se composa en grande partie de messages vantant les mérites du système éprouvé et sans faille que constituait l'Empire, accompagné de propagande anti-révolutionnaire.  

Gail et Ethan quittèrent le groupe et reprirent leur marche en direction de l'auberge, la tête basse. Ils resteraient des héros dans l'ombre, jamais mentionnés dans aucun rapport officiel. Leur seule récompense serait la liberté dont ils jouissaient et ce qu'ils décideraient d'en faire.  

Lorsque les deux aventuriers revinrent dans leur chambre, ils y trouvèrent Nato et Ellen Mage. Tout deux étaient assis face à face sur une chaise et discutaient à voix basse. Ils se tournèrent vers Gail et Ethan en parfaite synchronicité, ce qui avait de quoi effrayer. Lorsque l'asiatique et la dame se mettaient sur la même longueur d'onde, des événements dramatiques avaient tendance à survenir. Ethan saisit tout de suite la situation et il demanda quel était le nouveau plan, l'objectif et la façon de procéder. Gail se laissa tomber face la première sur son lit en poussant un gémissement colérique, mais elle se retourna aussitôt pour signaler à Nato qu'il avait certainement un don pour s'attirer des ennuis. Celui-ci se contenta d'afficher une expression énigmatique puis il s'expliqua. Quand il eut terminé, même Ethan ne trouva rien à dire tant il était sous le choc. Gail avait du mal à digérer l'information. "Si j'ai bien compris, l'homme que nous avons récupéré en risquant nos vies n'était pas l'Empereur ?"  

Ellen Mage se leva de toute sa hauteur. Elle dégageait la fureur. "Il n'était pas l'Empereur. Pas même un prisonnier. C'était un agent-double. Les rebelles n'ont probablement jamais compris pourquoi ont s'est jetés sur eux avec tant d'ardeur."  

Nato regarda tour à tour ses trois compagnons, seuls survivants d'une opération ayant coûté la vie à une cinquantaine d'individus qui, comme eux, avaient accepté de prêter main forte à l'Empire en temps de crise. À la base, ils étaient tous des criminels. Beaucoup d'entre-eux méritaient la mort, mais ils ne méritaient certainement pas d'être utilisé ainsi, sous de faux prétextes, pour débarrasser un Empire de ses ennemis. L'Empereur avait mis en scène son propre enlèvement pour diaboliser les révolutionnaires et les mener à leur perte. Quelles autres machinations servaient-il au peuple sur une base quotidienne ? Nato avait pu voir grâce à son père ce que l'Empire faisait pour contrôler le monde. Il avait retiré à celui-ci la possibilité d'évoluer, en bien comme en mal, le figeant pour toujours dans un état sous-développé, sujet à se détériorer sans cesse. Nato lui-même s'était laisser prendre au jeu. Il avait accepté de défendre cet Empire qu'il détestait, car il lui avait fait croire que les rebelles offraient un avenir plus sombre encore, dans lequel il n'y aurait plus de liberté. Mais en vérité, il n'en avait jamais eu. Personne n'était libre en ce monde.  

"J'avais prévu de me faire oublier après ce que nous avons tous vécu, déclara Nato. Maintenant, à la lumière de ce que j'ai appris, je vois les choses différemment. Mes amis sont morts là-bas en combattant des hommes et des femmes qui, je pense, menaient un combat juste. Je n'ai pas envie de m’apitoyer sur mon sort et de vivre dans le regret. Ce que je vous propose, aujourd'hui, c'est de rétablir nos tords et les tords de ce monde déliquescent. L'Empire nous a engagé car nous étions les meilleurs. On leur a déjà prouvé cela. Maintenant, il est temps de montrer au monde entier notre vraie valeur. Nous allons redonner à tous la chance d'accomplir leur destin comme ils l'entendent. Nous allons renverser l'Empire et éliminer ce traître d'Empereur."  

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Nato - Ayato Miyazaki  

Gail - Yaelle Fillion  

Ethan Dark - Erwan Roux  

Ellen Mage - Mylene Micoton  

L'aubergiste - D.D.Reynolds (caméo)