Une chaise vide était posée dans un jardin à l'herbe touffue. La terre était humide, souple, le ciel était dégagé, seulement couvert ça et là de quelques frêles nuages blancs. Une femme marchait lentement dans l'herbe, pieds nus. Margaret (Kellie Ciani) avait les yeux bandés. Pourtant, c'était comme si elle connaissait le chemin qui la séparait de la chaise. Comme si elle était habituée...Elle se laissa tomber dedans, croisa les jambes et rajusta les plis de sa robe beige. Alors que derrière elle, des fils barbelés s’élevaient, donnant au lieu un air sinistre, Margaret sortit de nulle part une cigarette et une allumette. Margaret commença à fumer. Elle laissa s’échapper dans l'air une première bouffée, qui monta, monta, rejoignant les cieux.  

Alissa (Ezra Monet) ne reconnaissait pas cette vieille maison dans laquelle elle se trouvait. Elle ne se souvenait pas y avoir jamais mis les pieds. Elle avançait pourtant à taton dans le noir, ses mains délicates effleurant les murs défoncés. Elle put saisir enfin ce qui ressemblait à une poignée de porte et ouvrit cette dernière. Un mince filet de lumière pénétra dans la pièce, et Alissa se sentait déjà un peu mieux. Elle pouvait voir où elle allait, désormais. Elle aperçut un miroir ancien dans la pièce d'à côté. Elle s'en approcha timidement, de peur sans doute que l'objet ne se mette à bouger. Il était sale ; on ne pouvait voir son reflet dedans. Alissia l'essuya avec ce qu'elle trouva ; un pan de rideau, en l’occurrence, puis elle poussa un cri d'effroi. Elle était habillée comme une prisonnière.  

Ses pieds nus se déchiraient sur le parquet ancien et épineux. La mine triste, Alissa traversait la baraque, à la recherche d'une quelconque sortie. Les lieux étaient vastes, mal éclairés, et en piteux état, ce qui rendait cette tâche encore plus ardue. Un vieil escalier de bois se dessinait alors devant elle. Des voix, à peine audibles, se faisaient entendre à l'étage, lorsque l'on tendait l'oreille. Alissa rassembla tout le courage qu'elle pouvait trouver en elle et monta lentement les marches, une à une, en espérant fortement qu'on ne l'entende pas.  

Alissa avait presque gravit totalement l'escalier. Désormais, elle pouvait apercevoir deux hommes (Stjepan Boksic et Derek Band) qui lui tournaient le dos dans la pièce voisine. Ils semblaient en plein débat assez houleux.  

La dernière marche grinça. Les hommes se retournèrent.  

Le visage déjà meurtri, Alissa était prostrée au sol. L'un des deux hommes l'attrapa par les cheveux et la força à se redresser. Une nouvelle gifle partit. Cette pièce aussi était mal éclairée ; pourtant, Alissa faisait tout son possible pour identifier les durs visages de ses agresseurs.  

- Qu'est-ce que tu fous là, salope !? Réponds !  

Alissa regarda l'homme dans les yeux. Dans ses yeux, on pouvait lire la haine qui émanait de toute sa personne. Elle ne savait pas non plus se qu'elle faisait ici.  

- Je ne sais pas.  

- Menteuse !  

Nouvelle gifle. Plus forte, plus sonore que la précédente.  

Son corps ensanglanté, torturé, gisait au sol. Aux gifles avaient succédés les coups, de poing, de pied,...La torture avait commencé, féroce. Alissa avait subit tout un tas d’atrocités. Tout un tas de choses que l'on ne pouvait jamais oublier. Jamais. Pourtant, elle était bien toujours vivante. Elle reprenait peu à peu ses esprits, ses yeux clos trompant les hommes, qui la croyaient évanouie. Alissa parvenait aisément à entendre ce qu'ils se disaient.  

- Il ne faut pas qu'elle soit au courant.  

- Ceci doit rester un secret connu de notre chef seule.  

- Supprimons-là.  

Alissa avait à peine eu le temps de se relever, et de se mettre à courir...  

C'était toujours ce même jardin herbu. Le ciel avait changé ; il s'était chargé de lourds nuages gris, qui ne présageaient rien de bon. Margaret demeurait seule assise sur sa chaise. Elle observait le ciel qui s'assombrissait de plus en plus, le regard curieux ou impatient.  

Elle se demandait bien qui. Qui. Margaret expira une dernière bouffée de cigarette, puis écrasa cette dernière, encore brûlante, dans la paume de sa main. Elle se leva, et quitta le jardin, un sourire en coin. Margaret se demandait bien qui. Car quelqu'un quelque part venait de partir en fumée. Définitivement.