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Drexl Production présente
For Those About to Dig...

 

Dans les environs d'Hilbert City, ville isolée du Minnesota, de nos jours.  

 

"Je suis assistante dentaire, je travaille 35 heures par semaine, je gagne 15 dollars 25 de l'heure, j'habite au 37, Klondike Street, Hibbing, Minnesota. Je suis orpheline, célibataire et capricorne. J'ai 25 ans. Je m'appelle Cand... Non... Je m'appelle Sophia. Sophia Eller !"  

 

Candy répète cette litanie depuis plusieurs minutes, d'une petite voix fragile, brisée, troublant à peine le lourd silence de la petite pièce sombre où elle est entreposée. Violée à répétition, battue et défigurée, la jeune femme est prisonnière depuis aujourd'hui deux ans et neuf mois d'un groupe de barbares sadiques qui non seulement la traitent horriblement, mais s'obstinent à la garder en vie, allant jusqu'à l'empêcher de mettre d'elle-même fin à ses jours. Conservée bien à l’abri sous terre, probablement dans une grotte artificielle, Candy lutte tous les jours depuis son enlèvement pour ne pas perdre la raison. Alors elle se parle, récitant inlassablement cette même litanie lui rappelant qui elle était. Car Sophia Eller est morte. Enterrée vivante. Aujourd'hui, elle est Candy. Une friandise de choix pour des monstres sans âme.  

 

La jeune femme est interrompue par le grincement métallique de la porte qui la sépare d'une potentielle liberté. Armé d'une lanterne électrique et d'une caméra dernier cri, un adolescent malingre aux membres trop longs et à la moustache molle pénètre dans la pièce. Sans dire un mot, le jeune homme à la mine incertaine enregistre des images de la femme prostrée dans un coin, se contentant de zoomer pour montrer en détail ses blessures. Il est visiblement mal à l'aise à l'idée de s'approcher trop de la créature farouche que Candy est devenue. Il n'a pas tort. Candy n'a jamais vu ce gringalet auparavant et elle sent qu'elle pourrait lui en coller une dans la tronche sans trop d'effort. Elle se demande toutefois pourquoi le cinéaste habituel qui passe la voir tous les mois n'est pas d'office aujourd'hui. L'irrégularité l'intrigue tout en lui remontant le moral. Deux portes ouvertes se dressent désormais devant elle...  

 

Et voilà qu'une troisième se dessine. Au loin, probablement à l’air libre, un appel de cor à la tonalité claire et pressante se fait entendre. L'alerte glaciale se répercute sur les parois de la longue galerie qui mènent au cachot de Candy. Un frisson parcourt l'échine de la jeune femme. Sans même s'en rendre compte, elle fait dans sa culotte, ses pensées toutes orientées vers un seul but : s'enfuir enfin.  

Pendant ce temps, l'adolescent lui tourne le dos, avançant vers la porte puis reculant vers elle d’un air anxieux. Il ne sait pas comment réagir à ce nouveau stimulus auditif. Candy profite de son inattention. S'aidant d'une poussée des bras, elle bondit telle une lionne sur le gamin, lui tombant brutalement sur le dos. Candy n'est peut-être plus qu'un sac d'os mais elle a encore un peu de nerf. Le caméraman est déstabilisé par le choc et tombe sur le sol rocheux en râlant. Candy l'empoigne alors par le collet, le relève et lui fracasse le crâne contre la porte en fer, y mettant toute sa force et toute sa colère. Un craquement sinistre se fait entendre et l'adolescent s'écroule de nouveau mollement, la nuque brisée et la boîte crânienne ouverte. Une marre de sang se forme immédiatement autour de sa dépouille. Candy, satisfaite, crache au sol et saute prestement hors de la cellule qu'elle n'a pas quittée depuis des années. Aussitôt, elle s'engage dans le tunnel rocheux qui remonte en pente régulière vers la surface, courant à pleine jambe sans se soucier de la douleur occasionnée par ses blessures les plus fraîches dont les plaies se sont rouvertes dans l’action.  

 

Dix minutes plus tard, n'ayant rencontré aucun obstacle, Candy trouve la sortie vers le monde extérieur et elle émerge à l'air libre. La lumière aveuglante lui brûle les yeux tandis que le froid se révèle plus intense encore que dans le cachot, transperçant aisément ses vêtements légers et sa peau amochée pour atteindre ses os. "Minnesota, je vis au Minnesota", se remémore Sophia, un sourire aux lèvres. Les pieds nus dans le gravier, la jeune femme reste immobile quelques instants alors que ses yeux s'habituent lentement à la lumière du jour. Derrière elle se trouve la paroi rocheuse abrupte où le tunnel maudit a été creusé, visiblement de mains d’hommes il y a fort longtemps. Devant, il y a un grand espace dégagé formant un demi-cercle de deux cents mètres de rayon, tout gris et rocheux. Le paysage fait pitié à voir, mais pour Sophia, c’est une vision paradisiaque. Un peu plus loin se dresse une forêt aux arbres rabougris et clairsemés. Nulle trace de civilisation dans le secteur.  

Il faut plusieurs secondes à Sophia avant de réaliser qu'elle n'est pas seule à l'extérieur. À une cinquantaine de mètres seulement de l’entrée du tunnel où se trouve la jeune femme, près d’un amas de roches pointues, un groupe d'une dizaine d’hommes, visiblement les "gestionnaires" de l’endroit, sont rassemblés en caucus, échangeant vivement des paroles incompréhensibles et agitant nerveusement les bras. Aucun d'entre eux ne semble avoir remarqué la présence incongrue de leur détenue au grand air. Sophia profite du fait qu’ils soient occupés à se disputer et s'éloigne sans bruit ni mouvement brusque, prenant la direction de la forêt avant de disparaître derrière le couvert des arbres.  

Une brise froide soufflant dans ses cheveux filasse, elle court avec légèreté sur le tapis de feuilles mortes, mettant plusieurs centaines de mètres entre elle et la prison de l'horreur où elle a passé les trois dernières années de sa vie. Sophie sourit désormais à pleines dents. Elle ne ressent aucune fatigue, aucune douleur, aucune peur... Une seule pensée occupe son esprit : elle est libre !  

 

Pas si vite, petite !  

Sans le moindre signe annonciateur, Candy se fait happer de plein fouet par un autobus scolaire roulant à 100 à l’heure. C’est du moins l’effet qu’elle ressent. En vérité, c’est un type costaud aux bras gros comme des troncs d'arbres qui lui est rentré dedans comme un bœuf enragé. Candy a le souffle coupé net et la tête qui tourne dans tous les sens. Prise de panique, elle commence à hyper-ventiler bruyamment, étendue au sol, mal en point.  

L'homme qu'elle reconnait immédiatement comme un des barbares l'ayant violée à de multiples reprises s’incline sans aucune grâce pour la saisir de ses mains sales et velues. S'en est trop pour Candy. Elle s’est rendu jusqu’ici, elle ne fera pas marche arrière maintenant. Sentant une poigne d'acier se resserrer autour de sa taille, elle explose subitement. Un cri de rage inhumain lui sort de la bouche, lui brûlant la gorge au passage. De ses petites mains féminines, elle forme des poings durs comme l’acier et commence à frapper avec l'énergie du désespoir le corps massif de l'homme. Sans savoir comment ni pourquoi, elle semble viser juste à plusieurs reprises. Son adversaire lâche prise sous la pluie d'impacts qui le touche aux zones du corps les plus sensibles. Tombant de haut, Candy heurte durement le sol, se fracassant une côte sur une pierre pointue dissimulée sous les feuilles. Mais l'adrénaline lui donnant une résistance inhabituelle à la douleur, plutôt que de perdre bêtement conscience, elle empoigne solidement cette même pierre et, bondissant aussi haut qu’elle le peut, frappe la brute à la tempe d'un mouvement puissant. Celui-ci s'écroule sur le coup, sonné pour la peine.  

 

Forte de sa victoire, Sophia reprend sa course sans trop savoir dans quelle direction aller. Faisant preuve de plus de prudence dans ses déplacements, la jeune femme déambule de nombreuses heures dans la forêt sans jamais baisser sa garde. L'effort qu'elle fournit pour continuer à marcher et rester éveillée malgré la douleur intense qui la tenaille est surhumain, mais il en vaut le coup. "La liberté est pour bientôt", se répète-t-elle désormais, remplaçant du même coup sa vieille litanie par une nouvelle, plus simple et plus engageante.  

 

Il fait nuit noire lorsqu’ayant parcouru plusieurs kilomètres dans les bois et même traversé une rivière glaciale à la nage, manquant de se noyer, Sophia rejoint enfin la civilisation, fièrement représentée par une route asphaltée. Il ne lui faut ensuite que peu de temps avant d'arriver en vu d'une ville qu'elle croit reconnaître comme étant Hilbert City, une localité mineure voisine d'Hibbing. Le soulagement de la jeune femme est grand. Elle recommence à respirer plus profondément et ses muscles se détendent pour la premier fois depuis sa confrontation avec la brute.  

Sophia aperçoit soudain sur la route devant elle les phares d'une voiture qui se dirige dans sa direction. Sa première réaction est de lever les bras pour signaler sa présence au conducteur, pour être enfin secourue, mais elle bloque son mouvement au dernier moment. D'instinct, elle s’accroupit, les yeux braqués sur les phares aveuglant du véhicule qui se rapproche lentement. Puis, sans crier gare, elle bondit dans le fossé et se dissimule sous les ronces. La Crown Victoria passe alors tout près sans que son conducteur n'ait remarqué quoique ce soit.  

Demeurée plaquée contre le sol, tous les muscles de Sophia tremblent avec violence. Elle est en crise. La terrible réalité vient tout juste de la rejoindre dans son petit corps de femme brisée. Sophia Eller est morte dans cette cellule souterraine, succombant sous les coups sans retenus de ces enfoirés de violeurs sadiques. Sophia n’est plus. Aujourd’hui et pour toujours, elle est Candy, une petite chose pathétique traumatisée à tout jamais.  

 

Quatre heures plus tard, Candy entre dans la ville, grelottante. Elle ne marche plus en pleine rue. Elle se faufile désormais d'ombre en ombre, coupant entre les maisons endormies et les haies de cèdres mal taillées, hors de vue. À l'affût de la moindre menace, elle cherche un endroit où son corps acceptera de se rendre sans protester. Elle trouve celui-ci dans une librairie où brille une lumière tamisée. En pleine nuit, quelqu'un, une jeune femme blonde, y lit un livre, confortablement installée dans un fauteuil de cuir, une tisane à portée de main. À bout de force, Candy s'effondre bruyamment sur le pas de la porte vitrée. Remettant entièrement son destin entre les mains de cette inconnue bouquineuse, Candy s'est évanouie.  

 

***  

 

7h00, ce matin là.  

 

Tout en se brossant les dents, Larry Maynard admire dans le miroir le reflet de son épouse qui, derrière lui, est entièrement nue sous la douche. Un sourire carnassier au visage, Larry a un début d'érection. L'envie de prendre sa femme là, au petit matin, alors que ses enfants prennent le déjeuner, est irrésistible. Mais il est interrompu dans ses pensées charnelles par la sonnerie de son téléphone portable. Il s'agit d'un message texte. Énervé, Larry jette un oeil sur le bidule électronique dont il ne peut désormais plus se passer. "Anliggende", dit le message. Mouais. Se regardant dans le miroir, Larry se demande bien pourquoi ils ont convenu du norvégien comme langue de communication. Il n'en accélère pas moins son rituel matinal, prenant à peine le temps d'embrasser ses deux enfants avant de quitter pour le travail, son fidèle chapeau de cowboy sur la tête.  

Faisant route en direction des problèmes annoncés au volant de sa Crown Victoria, Larry s'arrête un instant pour embarquer son partenaire, un agent dans la trentaine en qui il a pleinement confiance. Le Shérif Maynard espère toutefois qu'il n'aura pas besoin de l'expertise de son collègue en cette froide matinée, et que les choses se placeront rapidement. Cette semaine, il a plusieurs chats à fouetter dans les cadres les plus officiels de sa fonction de chef de police d’Hilbert City. Il n’a pas de temps à perdre à régler encore les problèmes de ses amis…  

 

Vingt minutes seulement suffisent à Larry pour rejoindre les anciennes mines. C'est un lieu désolé et sinistre, tout gris et, en l’occurrence, parfait pour le rôle que lui ont destiné ses amis. Ceux-ci sont justement rassemblés à l'extérieur, formant un cercle nerveux de brutes épaisses armées jusqu'aux dents. Des armes gracieusement offertes par le Shérif local... Maynard et son partenaire sortent de la voiture de patrouille et vont à la rencontre du groupe. L'une des brutes, le plus velu d'entre tous, rompt alors le cercle en grognant des injures et en demandant ce que le jeune agent fait là. Maynard lui répond que c'est son homme et qu'il remettrait sa vie entre ses mains n'importe quand. Plus ou moins rassuré, le mastodonte qui présente une vilaine plaie à la tempe reprend les rangs, légèrement chancelant. "Alors, des problèmes ?" demande le Shérif d'un ton narquois.  

 

En effet. Les barbares nordiques racontent à l'officier leurs mésaventures de la nuit. Un couple de chasseurs inconscient s'étant aventuré beaucoup trop loin sur leur territoire aurait surpris une conversation compromettante et, résistant à leur mise à mort, aurait été jusqu'à tuer un des plus jeunes membres de la joyeuse fraternité avant de finalement rendre l'âme sous les coups du vaillant primate au crane amoché. En prenant connaissance de ce récit, l'humeur de Maynard s'assombrit. Il demande à voir le jeune garçon qui a laissé sa vie dans cette aventure, mais on lui rétorque nerveusement qu'il a déjà été mis en terre au cours de la nuit. Larry n'est pas très heureux de la situation et ses amis semblent partager en partie son état d'esprit.  

Pour le Shérif, une nouvelle opération nettoyage s'amorce. Avec son collègue, il passe donc l'avant-midi sur les lieux. Ils doivent récupérer les dépouilles des deux chasseurs et découvrir leurs identités ainsi que leur itinéraire supposé. Ensuite, ils pourront inventer une histoire crédible au cas où, mais surtout s'assurer que l'enquête leur soit confié quand les disparitions auront été signalées. En somme, le Shérif Maynard fait en sorte que la mort de ces chasseurs ne cause aucun ennui à "l'opération minière" dans laquelle il est plus que simplement impliqué. Une tâche devenue routinière avec les années.  

Le travail dûment effectué, le partenaire de Larry se voit même offert la chance de visiter une section des mines pour le récompenser de ses efforts, chance qu'il saisi à pleine main tandis que le Shérif Maynard attend patiemment dans sa voiture. D'un œil morne, l'officier regarde la paroi rocheuse où on a creusé plusieurs tunnels à une époque reculée pour extraire du minerai de fer. Abandonnés et oubliés depuis, la vocation de ces tunnels a changé radicalement. Maynard n'en connait pas tous les détails sordides, mais ce que quelques-uns de ses gars les plus fiables lui ont raconté après y être descendus et en être ressortis rassasiés est bien suffisant à ses yeux d'homme marié. Larry se contente de visionner les vidéos.  

 

***  

 

Pour Jin Grimsrud, la journée a encore été tranquille. Hilbert City n'est pas une ville réputée pour ses grands lecteurs passionnés, aussi son commerce n'est en général que peu fréquenté. Cinq ou six clients par jour, maximum. Jin a toujours apprécié cet état de fait, mais en ce moment, c'est même pour elle une véritable bénédiction. Car depuis cette fameuse nuit, Jin héberge dans l'arrière boutique de son commerce un petit brin de femme brisé, retrouvée inconsciente devant la porte de la librairie. Une semaine s'est écoulée et Jin n'a toujours pas appelé les services d'urgence. Candy le lui a formellement interdit. En voyant la lueur féroce dans ses yeux lorsque la jeune femme en lambeau lui a demandé de garder sa présence ici secrète, Jin a immédiatement acquiescé. Depuis, elle s'occupe personnellement de Candy en suivant à la lettre les enseignements d'un bouquin de médecine que personne n'a jamais voulu lui acheter.  

 

Le temps passant, Candy commence doucement à reprendre des couleurs, même si elle demeure toujours aussi effroyablement maigre aux yeux de Jin. Ses blessures, elles, cicatrisent bien, malgré quelques problèmes d'infection. Reste que la jeune libraire n'a rien pu faire pour réparer le visage défait de la mystérieuse survivante. Elle craint sérieusement que celle-ci ne reste à tout jamais défigurée, un comble pour une personne ayant visiblement traversé les pires épreuves de l'enfer et y ayant miraculeusement survécues.  

Dans ses temps libres, Jin reste donc assise au chevet de Candy. Celle-ci dort plus souvent qu’autrement, récupérant d’une fatigue hors norme. Son sommeil est toutefois constamment troublé de cauchemars, et les cris d’horreur qui lui échappent n’ont rien de rassurant. La jeune femme qui a sans aucun doute été torturée à de nombreuses reprises sur une longue période souffre d’un grave traumatisme. Ainsi, pour l'occasion, Jin a cru bon de ranger la collection d’armes blanches qu’elle conserve toujours près d’elle dans la librairie. Véritable passionnée des couteaux, la jeune femme a accumulé au cours des années un impressionnant jeu d’armes blanches de toute origine. Dans ses heures de pause, Jin s’amusait à lancer ses couteaux sur une cible de sa confection, développant une certaine habileté. Mais depuis l’apparition de Candy, la libraire a mis fin à ses séances de pratique. La dernière chose qu'elle veut, s'est que Candy se réveille sur l'image d'une blondinette un peu folle lançant avec une précision chirurgicale des lames ultra-coupantes sur une cible de forme humaine. Pour la santé mentale de la rescapée, les conséquences seraient désastreuses...  

 

Dans les semaines qui suivent l’arrivée de Candy, Jin tente tant bien que mal de s’improviser psychologue, mais sans grand succès. Candy est maintenant plus éveillée et alerte. Ses réflexes de chat apeuré sont revenus, mais son moral est au plus bas. Elle souffre d'une grave dépression post-traumatique et refuse toujours de sortir de la boutique. N'accordant sa confiance à personne d’autre qu'à Jin, Candy lui raconte progressivement son histoire, depuis son enlèvement jusqu'à sa fuite épique, en passant par les séances de tortures et de viols pratiquées par des monstres à forme humaine. Pour Jin, cela ne fait pas de sens. Elle ne comprend pas comment des hommes peuvent être aussi cruels et sadiques. À mesure que Candy partage son récit d'horreur, Jin bouille d'une rage de moins en moins contenue, ruminant des idées noires de meurtres. Bientôt, elle presse de questions sa nouvelle amie, lui enjoignant de faire l'effort de se remémorer l'endroit où opèrent les salauds qui l'ont violée et tenue captive pendant trois ans. Mais rien à faire. Candy a refoulé ce souvenir profondément. Elle ne se souvient que du cachot où elle était entreposée, mais pas du reste. Que des murmures vagues à travers une porte close.  

 

Dans la tête de Jin Grimsrud, un projet ambitieux prend forme concernant l'avenir de Candy, et s'est plutôt candidement qu'elle commence à imposer ce projet à la jeune femme dans toutes leurs conversations. Cette dernière, sans vraiment s'en apercevoir, s'y raccroche finalement comme à une bouée de sauvetage, y voyant une sorte de lumière au bout d'un long tunnel de l'horreur. "La liberté est pour bientôt", se répète-t-elle de sa voix douce aussitôt seule dans la boutique.  

Elle accepte finalement la proposition de Jin. Elle rencontrera un médecin. Un italien nommé Antony Rivelli. Plus précisément, il est un chirurgien esthétique de renommée nationale. Ayant un bureau à Hilbert, il accepte d'opérer Candy pour lui réparer le visage, affirmant être capable de lui redonner la plus grande partie de sa beauté d'avant. Antony est un homme d’apparence sombre mais il a un cœur d'or. C'est en tout cas ce que prétend Jin, qui lui a fait promettre de garder le secret concernant Candy.  

 

La jeune femme subit donc une opération reconstructrice du visage dans la plus grande discrétion, et celle-ci s'avère une franche réussite pour le médecin tatoué qui se permet même d'afficher sa joie avec un sourire. Dans les jours suivants, Antony reste en contact étroit avec Candy, touché par le courage et la force de caractère de la jeune femme. Mais alors que les deux se rapprochent et commencent à éprouver des sentiments l'un pour l'autre, Jin ferme la porte de sa boutique au visage du médecin italien, l'empêchant de revoir Candy mais surtout de profiter d'elle alors qu'elle est toujours sous l’effet d’un traumatisme mental et physique.  

 

La deuxième partie du projet de Jin se met alors en branle. La jeune libraire offre à Candy de lui apprendre à manier ses couteaux, pour qu'elle puisse à l'avenir se défendre contre tout assaillant. C'est avec joie que Candy accepte la proposition, elle qui se sent beaucoup plus forte qu'elle ne l'a jamais été et prête à opérer d'elle-même la justice des hommes par le sang! Les deux amies passent donc quelques semaines supplémentaires à s'entraîner rigoureusement, allant jusqu'à se procurer des sabres japonais qu'elles ne savent même pas manier convenablement, la preuve étant faite lorsque Jin se coupe accidentellement l'auriculaire gauche. Mais à la fin, les filles en viennent à se considérer relativement compétentes et prêtes pour le combat réel. "Je me frotterais sans trop de crainte à une gardienne de camp de la mort nazis ", déclare fièrement Candy dans un de ses beaux jours.  

 

Les filles décident finalement que le temps est venu. Armées de la tête au pied, Jin et Candy se rendent dans un bar d'Hilbert City nommé "La Caverne", dont la réputation est peu flatteuse. Ils ont un but bien précis : interroger le propriétaire et obtenir des informations sur les barbares sadiques qui ont torturé Candy. Celle-ci en effet est parvenue à faire le tri dans sa mémoire, et elle se souvient avoir entendu le nom de ce bar malfamé sortant de la bouche d'un de ses tortionnaires. Il était alors question d'un certain trafic d'armes ou de drogues.  

 

Pénétrant dans le bar d'une démarche assurée, Candy et Jin attirent l'attention des clients avec leurs tenues de cuir et leurs redingotes noires sous lesquelles sont dissimulées leurs panoplies de couteaux. Un sifflement approbateur se fait entendre dans le fond de la salle mal éclairée, où se trouve une table de billards, mais la majorité des visages sont durs et peu accueillants. N'y prêtant guère d'attention, les filles prennent place au bar, commandant chacun un simple whisky au barman crasseux et édenté qui tient l’endroit. Jin lui demande alors où est le proprio, et à sa grande surprise, le barman lui répond qu'il est là devant elle. Jet Svenko, qu'il s'appelle, mais ses amis le nomment "The Boss". Son sourire satisfait est peu engageant. Alors qu'il verse sans grâce le breuvage commandé, Candy observe l'homme attentivement. Étrangement, il n'est pas aussi vieux que son apparence générale le laisse croire. Il est même plutôt musculeux sous ses vêtements déglingués. "Il faut qu'on parle", déclare Candy d'un ton peu amène, ce à quoi Svenko ne réagit pas tout de suite. Calmement, la barman leur tourne le dos et se sort une bière du frigo, de laquelle il prend une longue lampée. Puis soudainement, il se retourne d'un mouvement à la Elvis et, amusé, répond : "Parlons!".  

 

L'homme refusant visiblement de quitter l'arrière de son bar, les filles se rapprochent pour éviter d'être entendu des clients un peu trop silencieux à leur goût. Lorsqu'elles font allusion à la possibilité d'un certain trafic de drogue ayant lieu dans la Caverne, Jet Svenko retrouve un air plus sérieux. Il n'aime pas ce sujet de conversation et le laisse bien paraître. Subtilement, l'une de ses mains se déplace sous le bar où une arme est probablement dissimulée. Candy ne se laisse pas impressionner. Elle réitère ses questions sur le sujet, alors que Jin, elle, s'est retournée pour faire face à l'ensemble des clients.  

La tension monte, la température également. Le juke-box qui jusque là jouait une musique de Bassnectar s'est arrêté, comme s'il avait la capacité de sentir le pouls de la salle. Mais soudain, Svenko éclate d'un rire gras, qui détend aussitôt l'atmosphère. "Dis donc, poulette, combien tu le vends, ton beau petit cul ?" demande-t-il à Jin, matant délibérément son postérieur. Quelques clients se joignent au Boss dans son hilarité. Mais Candy, elle, ne rit pas. D'un geste vif, elle sort de sa redingote un poignard bien affuté et, saisissant Jet Svenko par ses cheveux gras, elle lui tranche la gorge d'une oreille à l'autre. En quelque seconde seulement, le pauvre type se vide de son sang et meurt.  

 

La réaction des clients est instantanée. Deux types se jettent sur Jin, lui laissant à peine le temps de dégainer ses couteaux. Luttant férocement, elle parvient néanmoins à leur infliger quelques blessures, ce qui lui donne le temps de se relever et d'adopter une position plus offensive. Pendant ce temps, un autre homme sort un revolver et tente d'abattre Candy, mais celle-ci est plus rapide. D'un lancé franc, elle atteint le colosse d'un couteau en plein cœur, le tuant sur le coup. La bataille qui s'en suit est d'une rare violence. La plupart des clients de la Caverne se révèlent être les hommes de main de Svenko, et leur férocité est grande. Mais Candy et Jin sont bien entraînées et d'une détermination sans égale. Tailladant la chair avec violence, elles se retrouvent bientôt couvertes du sang de leurs ennemis. En quelques minutes seulement, l'affaire est pliée. Dans le bar, hormis les deux femmes, il ne reste plus que le client qui, plutôt, a sifflé son approbation à leur égard. Visiblement, cet homme n'a rien à voir avec Svenko et ses affaires. Mais pour Jin, enivrée par les joies du meurtre, cela ne fait pas de différence. D'un pas rapide, elle gagne la table de billards et plante son sabre dans le bide de l'homme qui pousse un râle sinistre, la surprise dans les yeux.  

 

Debout sur le bar, Candy observe la scène en silence. Elle est épuisée et écœurée. Tout autour d'elle gisent les cadavres ensanglantés des hommes qu'elles ont tués sans en tirer le moindre profit, et le spectacle est sinistre. Pour Candy, c'est un avant-goût de l'enfer dans lequel elle a l'intention de se jeter, et la perspective ne l'enchante guère. Jin prendra ainsi le contrôle de la situation. Après avoir lâché un coup de fil à son père, Norman Grimsrud, un avocat criminaliste local connaissant bien son affaire, elle décide qu'il faut brûler la Caverne jusqu'aux fondations. C'est donc la mort dans l'âme que Candy aide son amie à réduire en cendre la preuve de leur méfait. Cette nuit, les pompiers de Hilbert City auront un feu à combattre et des cadavres calcinés à extirper des décombres.  

 

Candy, elle, fera faux bond à sa partenaire avant l'aube. Elle se réfugiera dans l'appartement d'Antony Rivelli et lui fera l'amour avec passion, des larmes lui roulant sur les joues.  

 

***  

 

8h00, ce matin-là.  

 

Larry est sur les lieux du crime en compagnie de son partenaire qui pour le coup affiche un air songeur. Douze cadavres noircis sont alignés devant eux, sur une grande toile bleue. Le Shérif est près à parier que l'un de ces cadavres est Jet Svenko, le dealer contrôlant le marché de la drogue d'Hilbert. Un peu plus loin, de la fumée s'échappe toujours des débris de son bar, La Caverne. En soit, il ne s'agit pas d'une grande perte. Il y a quelques années, le Shérif Maynard se serait réjoui de la mort de ce malade schizophrénique. Mais aujourd'hui, cela lui cause de sérieux ennuis. Grâce à Svenko, à qui il revendait illégalement la cocaïne accumulée par les services de police des comtés voisins, Larry touchait un montant d'argent conséquent à tous les mois. Cet argent sale lui servait ensuite à se procurer des armes et des munitions non-enregistrées auprès des HelleBikers, un groupe de motards criminalisés installé à Hibbing. Ces armes étaient ensuite utilisées pour couvrir les activités des barbares violeurs de femmes installés dans les anciennes mines. Une bonne partie de l’arrangement de Larry est donc partie en fumée au milieu de la nuit, au grand désarroi du Shérif.  

 

Trois ans se sont écoulés depuis que sa fille bâtarde qui vivait à Hibbing a été enlevée par ces barbares. Elle s'appelait Sophia. Sophia Eller. Sa mère morte à l'accouchement lui avait tout donné de sa beauté et de sa personnalité. Avec nostalgie, Larry se remémore ce visage souriant et espiègle qui a autrefois fait de lui un homme heureux et complet. Mais s'il espère revoir sa fille vivante un jour, il sait qu'elle ne sera plus jamais la même jeune femme accomplie qu’elle était. Bien qu’elle ne le connaisse pas, ignorant son existence, l’amour que Larry éprouve pour sa Sophie est bien plus grand que celui qu’il a pour ses deux enfants légitimes. C'est d’ailleurs uniquement pour cet amour que, depuis trois ans, il obéit à tous les ordres qu'on lui transmet par messages textes dans une langue qu’il ne comprend même pas.  

Aujourd'hui encore, Larry Maynard regrette d'avoir effectué avec tant de zèle son travail d'officier de police. C'est en enquêtant sur la disparition d'une jeune femme en visite à Hilbert City que Larry a suivi une piste hasardeuse qui l'a conduit trop près des mines et des atrocités qui s'y tramaient. L'attention des barbares s'est alors tournée vers lui et, Dieu sait comment, ils ont découvert son secret de jeunesse et capturé Sophia pour s'en servir comme d'un moyen de pression sur le Shérif. Inutile pour lui de tenter un assaut sur les mines avec ses amis flics, car sa fille est constamment gardée par des hommes près à l'exécuter au moindre accroc. Depuis, à chaque fois que Larry ne suit pas à la lettre les ordres transmis, Sophia subit des séances de tortures dont le Shérif reçoit ensuite les images en HD sur son portable. Et quand tout va bien, on lui transmet une fois par mois une vidéo de sa fille, accroupie dans un coin, récitant son identité encore et encore dans un effort vain pour ne pas perdre l’esprit. Cela fait d'ailleurs penser à Larry que la vidéo de ce mois-ci n'est toujours pas arrivée...  

 

L'attention du Shérif se reporte sur le cas du jour lorsqu'un expert scientifique anonyme lui explique que la cause du décès des deux premiers cadavres n'est visiblement pas liée au feu. Intéressant. Il s'agit donc bien d'un massacre en règle. Probablement perpétré par un groupe de tueurs chevronnés. Se tournant vers son partenaire, Maynard lit dans son regard qu'une pensée commune leur a traversé l'esprit au même instant : les HelleBikers. Dans les environs, ce groupe de motard dirigé par Isabella de Savini est le seul ayant la capacité et le motif de commettre un tel crime. "On ne retrouvera sans doute jamais les coupables", déclare Maynard d'une voix portante à l'attention de l'équipe d'investigation. "Car ils seront bientôt tous morts", finit-il pour lui même et son partenaire. Retournant à sa voiture, Larry compose le numéro de son conseiller juridique. Il a un rendez-vous important à planifier.  

 

***  

 

Quelques jours plus tard.  

 

Depuis le massacre de la Caverne, Jin n'a quasiment plus revu Candy. Celle-ci passe désormais le plus clair de son temps chez Antony Rivelli, qui est devenu son amant. Toute idée de vengeance semble avoir abandonnée son esprit. Elle est en paix, dit-elle, allant même jusqu'à se faire appeler d'un nouveau nom par le chirurgien : Sophia. Jin Grimsrud ne cache pas sa déception. Pour elle, les événements de la Caverne ne veulent rien dire. Jet Svenko était tout au plus un pauvre type un brin pervers, pas un violeur sadique. Justice doit toujours être rendue. Mais Sophia n'a plus le cœur à ça.  

Jin, elle, est resté en contact étroit avec son père depuis le massacre. Lui parlant sans cesse au téléphone, elle tente de lui arracher une information exploitable concernant le trafic d'armes et de drogues qui se déroule sous les radars de la police d'Hilbert City. Norman Grimsrud finit par lui révéler involontairement que des motards seront sur la route 15, jeudi soir, pour discuter affaire. Il déconseille toutefois fortement à sa fille et surtout à son amie de se rendre sur place. Ce monde est trop dangereux pour de jeunes femmes aussi fragiles qu'elles. Jin reçoit pourtant ce conseil comme une mise à défis. Elle bouille d'une rage meurtrière, sentant enfin une ouverture pour son plan de vengeance.  

 

Le lendemain, Sophia rentre dans l'appartement d'Antony pour retrouver celui-ci mort, assassiné dans son salon. Le cadavre, horriblement mutilé, fait remonter en Candy d'horribles souvenirs, ceux des jours suivant son enlèvement par les barbares. En route vers sa cellule, elle a pu voir dans des chambres mal éclairées le sort réservé à d'autres femmes comme elle, dont la date d'expiration était échue. Les blessures infligées à ces femmes et celles qu'a reçues Antony sont étrangement semblables... Le cœur de Candy saute un battement lorsque de cette constatation, elle passe à la conclusion : les barbares l'ont retrouvée !  

 

Après une course effrénée, Candy est soulagée de retrouver Jin en pleine forme dans sa librairie, conseillant à une cliente la lecture d'un roman de Laurel K. Hamilton. L'ayant trainé dans l'arrière-boutique, elle lui raconte la mort d'Antony et ce que ça implique pour elles. Jin ne semble pas outre mesure étonnée de ce récit, mais Candy n'a pas le temps de s'en formaliser. Elle s'effondre dans les bras réconfortant de son amie et s'y abandonne complètement pour le reste de l'après-midi.  

Après avoir donné libre cours de manière satisfaisante à ses tendances saphiques jusque là refoulées, Jin partage ses informations avec Candy, qui enfile déjà son pantalon de cuir moulant et sa ceinture de couteaux à laquelle elle a ajouté son sabre. "Ces barbares m'ont gardée enterrée vivante durant trois ans. Bientôt, ils creuseront devant moi leurs propres tombes", déclare-t-elle, solennelle.  

 

Jin ne peut s'empêcher de rayonner. Son projet est de retour sur les rails.  

 

***  

 

23h00, jeudi soir, sur la route 15.  

 

Le Shérif Larry Maynard a opté pour son habit d'apparat et son chapeau de cowboy. La nuit est fraîche, et la pleine lune illumine la route où le rendez-vous a été programmé. Quinze hommes ont accompagné Larry pour l'occasion. Chacun d'eux est un policier sous ses ordres. Par conséquent, ils se sont présentés sur place lourdement armés. Deux hommes ont des fusils d'assaut prêt pour l’action, tandis que d'autres tiennent des fusils à pompe ou simplement leurs armes de service. Derrière les flics, trois voitures de patrouilles font barrage, gyrophares allumés. Maynard est en colère. Il a décidé d'évacuer celle-ci cette nuit. On ne joue pas avec le Shérif d'Hilbert City, et encore moins avec la vie de sa précieuse fille. Cette nuit, il a l'intention de faire payer aux HelleBikers le massacre de la Caverne.  

 

Isabella de Savini est une femme particulièrement jeune. Fille de Roberto de Savini, elle a repris le contrôle des HellBikers lorsque celui-ci a été tué en prison par un membre de la famille mafieuse Rissoto. Depuis, Isabella a modifié l’appellation de sa bande de motards pour bien marquer sa prise de pouvoir au sein du groupe. Elle a une réputation de tyran, et un entourage dévoué. Mais ce soir, dix hommes seulement sont présents pour la supporter. Larry y voit la marque d'une petite prétentieuse pleine d'arrogance. L'idiote se croit plus forte que lui, et après les événements survenus dans sa ville, cela lui fout une grande rage. Mais en vérité, Isabela de Savini n'est pas responsable de la mort de ce dealer qu'est Jet Svenko. Son organisation n'a pas d'intérêt dans le marché de la cocaïne d'Hilbert et l'arrangement précédent lui convenait pleinement. C'est pour cette raison qu'elle a décidé de venir légère à ce rendez-vous, pour montrer sa bonne foi au Shérif et, idéalement, le raisonner. Elle sait toutefois qu'elle court un grand risque.  

 

"La nouvelle de la mort de Svenko m'a beaucoup attristé", dit-elle honnêtement, ouvrant le bal. Maynard garde le silence. Ses flics ont un air féroce. Leur positionnement est révélateur de leur état d'esprit. Le groupe d'Isabella fait mauvaise figure dans ce duel de volonté. La femme aimerait pour le coup ne pas être venue à moto. Les voitures ont tendance à offrir de meilleures couvertures en cas de fusillade. Mais qu'importe, elle espère bien ne pas en venir là. C'est pourtant peine perdue.  

"Vous m'avez placé dans une fâcheuse position" déclare Maynard d'une voix rauque, s'avançant lentement vers les motards. "Dommage pour vous".  

"Attends!" s'apprête à rétorquer Isabella. Mais c'est trop tard. Le Shérif dégaine son pistolet et tire une balle entre les yeux de la femme. Plusieurs coups de feu éclatent dans les secondes qui suivent, puis le silence revient sur la route 15.  

Dix motards gisent maintenant mort sur l'asphalte. Du côté des flics, il n'y a pas de victime. L'avantage d'un entraînement professionnel.  

 

Le Shérif Maynard est satisfait de l'opération. Pourtant, il a un goût amer dans la bouche. Le père de famille a l'impression de perdre à chaque jour qui passe un peu plus de son identité.  

 

***  

 

Au même moment.  

 

Embusquées derrière les arbres bordant la route 15, Candy et Jin ont empoigné leur sabre dès que le premier coup de feu s'est fait entendre. La brièveté de la fusillade et l'efficacité du tir des policiers les ont cependant calmées. Elles ne sont pas de taille à affronter ces types, surtout qu'elles ignorent si ce Shérif patibulaire est impliqué d'une façon ou d'une autre dans les activités des barbares. Ne sachant pas trop quelle attitude adopter, les jeunes femmes se contentent de se rapprocher furtivement de la route pour entendre les mots échangés par les policiers. Si ça ce trouve, ce combat ne les concerne pas, et à première vue, c'est bien le cas.  

Pourtant, Candy est intriguée par l'officier costaud qui porte un chapeau de cowboy et qui donne des ordres d'un ton sec. Quelque chose dans sa façon de se mouvoir provoque en elle une sensation de déjà vu. Elle tente de se remémorer son passé, mais les seules images qui lui viennent en tête sont celle de sa captivité et de ses bourreaux. Le Shérif était peut-être l'un d'eux... Peut-être est-ce lui qui a tué Antony en essayant de la récupérer ?  

Désormais à quelques mètres seulement du charnier, Candy peut entendre distinctement la conversation qu'ont les policiers. Le Shérif donne l'ordre à deux hommes de se rendre aux mines pour discuter de la situation avec les norvégiens. Il insiste pour qu'ils se montrent courtois et rassurant. Il ne veut pas leur déplaire. Il leur demande aussi de s'informer au sujet de la vidéo. Les deux hommes acquiescent, prennent une voiture et s'éloignent en direction de la ville.  

Candy est sous le choc : le Shérif d'Hilbert City est de toute évidence un complice de ces salauds de violeurs sanguinaires ! Et la vidéo... Était-ce pour le plaisir malsain de cet homme qu’on l’a filmée dans sa cellule, prenant soin de montrer ses blessures en gros plans ?  

Une boule de rage se forme dans la poitrine de Candy, et s'est de justesse que Jin parvient à l'empêcher de se lancer à l'assaut, vers une mort certaine. Le Shérif, ne remarquant pas le léger mouvement dans la forêt près de lui, ordonne à deux autres policiers de rester en arrière et de faire le ménage. Puis, réunissant le reste de son équipe, il quitte la scène, aussi en direction de la ville.  

 

Candy et Jin reste planquées durant un moment, observant le travail des policiers qui, munis de pelles, creusent une fosse pour les onze cadavres de l'autre côté de la route. Une tâche considérable. Finalement lasse du spectacle, Candy quitte sa cachette et se dirige vers le trou, suivi de Jin. Se déplaçant en silence, les filles ne sont pas détectées jusqu'au moment où Candy passe son sabre au travers du thorax d'un des policiers, alors que Jin s'empare vivement de l'arme de service de l'autre et le lui braque sur la tempe. "N'arrêtes pas de creuser", lui dit Candy, autoritaire. "On a quelques questions pour toi".  

 

Plusieurs minutes plus tard, les filles sont en possession de l'information voulue : l'emplacement plus ou moins exacte du repère des barbares, là où Candy a été retenue prisonnière toutes ces années. Le flic, debout au fond du trou, au milieu des cadavres, les met toutefois en garde contre le Shérif. Jamais il ne permettra qu'on cause du tort aux norvégiens et à leur opération. L'homme est peut-être un bon père de famille, mais il est obsédé par les vidéos qu'on lui envoie régulièrement, montrant de jeunes femmes humiliées, torturées et violées avec la plus grande sauvagerie par des brutes sans âme. "On s'occupera du Shérif en temps voulu", lui assure Jin, avant de descendre le type d'une balle dans le cœur. Candy approuve silencieusement.  

 

Les deux filles regagnent leur voiture camouflée dans les bois un kilomètre plus loin, puis font route dans la direction indiquée par le flic. Le repère de l'horreur est situé dans une vieille mine de fer abandonnée, en retrait de Hilbert City, vers le nord. En voiture, ce n'est pas trop loin. Pourtant, Candy croit se souvenir qu'elle a mis de nombreuses heures à rejoindre la ville après avoir quitter sa cellule. Ce souvenir s'accentue d'autant plus lorsqu'elles franchissent un pont enjambant une petite rivière. De l'autre côté du cours d'eau, Candy gare la voiture sur le côté de la route. Elles continueront à pied à partir de là. Elle a confiance de pouvoir maintenant retrouver son chemin, à mesure que ses souvenirs referont surface. Et puis, pour l'effet de surprise, elle préfère attaquer les mines à partir des bois, plutôt que de la route.  

 

Alors que les deux filles marchent dans la forêt depuis un moment, elles sont alertées par le bruit d'une branche qui craque, derrière elles. Rapidement, elles se mettent à couvert, dégainant leurs sabres et attendant que l’intrus se montre. Bientôt, un homme apparaît dans leur champ de vision. D'apparence banale, portant des lunettes rondes, il semble suivre la trace des filles avec difficulté, visiblement mal-à-l'aise dans les bois. En le voyant, Jin n'en revient pas. C'est Norman, son père ! La jeune femme se montre immédiatement à lui, l'interpellant avec incrédulité. Norman affiche son soulagement. Il affirme avoir suivi sa fille pour la dissuader de s'engager dans un projet où elle ne gagnera que la mort. Une joute verbale s'engage entre le père et sa fille, à laquelle Candy assiste bien malgré elle, tandis qu'elle s'impatiente. Finalement, Jin l'emporte sur son père, mais celui-ci, plutôt que de rebrousser chemin et de les laisser aller à leur guise, décide de les accompagner, prétendant vouloir les protéger. Candy n'est pas convaincue. Cet avocat n'a rien d'un combattant. Il ne pourra que les ralentir ou, pire, les faire repérer, puis tuer. C'est pourtant en compagnie du père de Jin que les deux jeunes femmes poursuivent leur route, sabre au clair.  

 

Une heure plus tard, Norman Grimsrud s'arrête subitement, laissant sa fille et son inquiétante nouvelle amie prendre un peu d'avance. Derrière un arbre marqué d'un ruban rouge, l'avocat récupère un objet en bois. C'est un petit cor à l'ancienne, comme ceux qu'on voit dans les films médiévaux. Norman le place devant sa bouche et souffle plusieurs coups rapides, avant de le jeter au loin.  

Un peu en avant, Jin et Candy se retournent à l'unisson. Jin ne comprend rien, mais Candy, elle, a reconnu le timbre du cor. C'est le même que celui qui a retentit alors qu'un adolescent la filmait dans sa cellule. Le même son de cor qui lui a permis de s'échapper. Le même cor que les barbares utilisent toujours en cas d'alerte. Seulement cette fois, c'est le père de Jin qui a soufflé dedans.  

Comprenant aussitôt la trahison de l'avocat, Candy ordonne à Jin de fuir le plus rapidement possible, elle-même prenant la direction opposée. Candy sait que les brutes nordiques arriveront d'une seconde à l'autre, alerté par l’appel du cor. Leur seul espoir est donc de se séparer, pour ne pas risquer d'être prise ensemble. Courant à perdre haleine, Candy voit sa théorie se confirmer. Devant elle, six hommes d’allure sinistre viennent d'apparaître, l'un deux tenant un filet aux mailles serrées. La jeune femme ne ralentit pas sa course et fonce dans le groupe, engageant le combat. Bien vite, deux hommes tombent sous ses coups de sabre mortels, et alors que les autres reculent pas à pas, subjugués par la fougue de leur ennemie, Candy commence à croire qu'elle a des chances de s'en tirer indemne... C'est alors qu'un coup terrible à la tête lui fait perdre conscience. Norman Grimsrud, une grosse branche à la main, vient de l'assommer.  

"Tel que convenu" dit-il. "L'autre est ma fille. Vous ne lui toucherez pas". Les barbares acquiescent et sans perdre pas de temps emprisonnent Candy dans leur filet, la ligotant solidement avant de la transporter vers le nord sans même jeter un dernier regard pour leurs camarades tombés au combat.  

 

Au loin, Jin a tout vu de la scène, mais une partie d'elle refuse toujours de croire en ce qui vient juste de se passer. Elle accoure vers Norman, qui paraît désormais plus à l'aise, voir soulagé. "Rentrons, c'est terminé", dit-il à sa fille. Celle-ci éclate alors d'une rage sans nom, hurlant sa colère contre son père, qui a trahi sa confiance et conduit Candy à une mort certaine. Au bord de l'hystérie, Jin dégaine un couteau et le plante dans la cuisse de Norman, qui tombe à genoux devant sa fille. Malgré la douleur, l'avocat tente de s'expliquer, affirmant que Candy est un poison, qu'elle allait causer la mort de Jin, ou pire encore. Il baragouine aussi quelque chose d'incompréhensible à propos du Shérif et d'un contrat quelconque. "Si cette fille parvient à ses fins, je suis fichu. Nous serons tous fichus. Elle doit mourir. Tu comprends, Jin ?"  

Non, Jin ne comprend pas. Mais elle est dégoûtée. Jetant sur son père agenouillé un regard empli de mépris, elle exécute un mouvement semi-circulaire avec son sabre, lui coupant la tête net. "Maintenant, t'es fichu, p'pa", dit-elle au cadavre décapité.  

 

Éclaboussée du sang paternel, Jin se tourne vers le nord, la mort dans les yeux. Bientôt, de nouveaux trous seront creusés dans l'ancienne mine de fer, et la jeune femme sera là pour les remplir de cadavres ensanglantés.  

 

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Larry Maynard - Roy McAllister  

Sophia Eller, a.k.a. Candy - Mandy Faltermeyer  

Jin Grimsrud - Kaylee Cobb  

Antony Rivelli - Gianni Ratélavarape  

Norman Grimsrud - Thomas Gabriel (caméo du réalisateur)  

Jet "The Boss" Svenko - D.D.Reynolds (caméo du producteur)  

Isabella de Savini - Inara Della Rocca (caméo de la co-scénariste)

Scénario : (2 commentaires)
une série B d'action (Rape & Revenge) de Thomas Gabriel

Roy McAllister

Mandy Faltermeyer

Gianni Ratélavarape

Kaylee Cobb
Sorti le 05 janvier 2024 (Semaine 992)
Entrées : 20 146 306
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