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Deathstar

C’était un moment extraordinaire, de ceux qui forgent la vie d’un couple : la mort d’une étoile, sa douce désagrégation devant leurs yeux – disons plutôt leurs radars spectrométriques. Et ils en étaient les témoins muets. Muets par tant de beauté. Ce n’étaient que quelques dizaines de milliers de pixels sur leurs écrans mais ils leur parlaient, leur murmurant que l’univers était vivant, en mouvement, que son cycle était infini.  

L’étoile FR-e0456 n’était plus depuis des millions d’années mais le signal de sa fin leur parvenait aujourd’hui.  

 

On les avait envoyés ici, sur cette station avancée de Ranma Centauri, sur un des satellites d'une géante gazeuse, pour capter les signaux des vaisseaux d’exploration que la Terre avait commencé à envoyer à la conquête de l’espace il y a 50 ans. Si l’on avait eu peu de nouvelles de leur part depuis qu’ils s’étaient trouvés hors de portée il y a 8 ans de cela, cette rareté était tout à fait logique : les ordinateurs de bord des navires spatiaux envoyaient des messages automatisés tous les 13 mois et les distances parcourues entre-temps faisaient que chaque message mettait de plus en plus longtemps à leur parvenir.  

 

La Terre, du reste, ne s’en inquiétait plus trop : envoyés durant une époque de crises majeures, ces vaisseaux n’étaient plus une priorité. La planète bleue connaissait aujourd’hui un nouvel «âge d’or» scientifique, économique, politique et culturel. Une situation radicalement différente de celle qui avait présidé à l’envoi des navettes il y a un demi-siècle.  

 

Mais ces deux-là demeuraient fidèles au poste, vigies qui scrutaient sans répit les astres.  

Cela faisait 20 années terriennes qu’ils résidaient ici: scientifiques, mariés et «tunés» pour la vie dans l’espace, les Professeurs Myriam (Margot Broughton) et Benedict (Mickael Glau) Brisecombe envoyaient avec une régularité métronomique des rapports à Moscou, leur base de départ. A bout de quelques années, un train-train quotidien paisible et heureux s’était installé. Les drogues de synthèse que leurs machines produisaient et qu’ils s’envoyaient dans les veines toutes les 72h00 étaient pour beaucoup dans leur condition physique exceptionnelle et leur absence de stress.  

 

Ils étaient seuls sur un caillou désolé à des milliards puissance x de kilomètres de la Terre. Et ils avaient fini par aimer ça. Leur station produisait toute l’énergie renouvelable dont ils avaient besoin, leurs serres hydroponiques disposaient de plants suffisants pour nourrir une armée pendant 50 ans, et ils étaient dans un élément qu’ils adoraient. Ils n’auraient cédé leur place pour rien au monde.  

 

On leur avait fourni un support mémoriel contenant toute chose écrite et publiée des 25 derniers siècles, tout le cinéma, tout le théâtre filmé, toute la culture musicale enregistrée des 250 dernières années, des androïdes sexuels divers et une 'salle de déconnexion' qui leur permettait de visiter virtuellement plus de 35 000 lieux choisis de la Terre et les satellites habités. De quoi tenir la distance: ils s’étaient récemment offert un "pique-nique" sur les bords de la rivière Lys, en Belgique.  

 

Et voilà que FR-e0456 s’était littéralement éteinte devant eux, un spectacle dont peu d’humains pouvait réellement saisir la teneur mais qui les avait remués. Une sacrée bonne semaine !  

Cette nuit-là, ils furent réveillés par leur ordinateur de bord : une vague de radiations de type inconnue déferlait sur le système Ranma Centauri, une vague aussi soudaine qu’inattendue qui détraquait pas mal de capteurs. Parfaitement habitués à ce type d’opérations, ils remirent les systèmes d’aplomb en quelques heures et décidaient de ne pas se recoucher.  

 

Au petit-déjeuner, ils s’étaient déjà attelé à remonter la provenance de cette vague : Myriam s’intéressait aux raisons pour lesquelles leurs spectromètres n’avaient pu identifier la nature exacte de ce qui les avait touchés tandis que Benedict se fardait les enregistrements de la nuit passée (le concept de "nuit" étant relatif au cœur de l’espace, leurs ordinateurs de plaisance modifiaient l’éclairage en fonction de leurs rythmes biologiques propres – c’est à dire en journées de 32 heures).  

 

Leur intelligence décuplée et l’extrême avancée de leur matériel (un dernier cri vieux de 20 ans pourtant) permirent de fonder de solides conclusions : cette vague d’énergie était fluctuante et provenait de feue-l’étoile FR-e0456.  

 

En soi, ce n’était pas étonnant. La distance parcourue, elle, demeurait inhabituelle pour un étoile-naine assez peu brillante : aucune supernova ne s'était ensuivie, encore moins de trou noir - juste cette masse d'énergie bizarre.  

Le parcours de l’onde était fascinant à plus d’un titre : émise il y a des millions d'années à partir de l'effondrement de FR-e0456, elle n’avait jamais décru, se "nourrissant" des quasars rencontrés en chemin. Elle avait zigzagué ainsi durant des siècles, à la recherche de nouvelles sources d’énergie ! On se rapprochait de la forme de vie intelligente qui satisfaisait les besoins vitaux de sa survie !  

 

A y réfléchir, ils avaient eu de la chance d’être encore en vie : la station aurait du tout simplement rendre l’âme ! Techniquement, ils n’auraient jamais eu le temps de l’évacuer.  

Décroissance énergétique de la masse qui les aurait sauvés ? Rien ne l’indiquait.  

La vague d’énergie s’était abattue sur le système entier et faisait à présent route dans une direction inconnue. Le couple mit tout en œuvre pour avertir la Terre – devinant que leur message arriverait probablement trop tard si d'aventure l’onde arrivait jusqu’à la planète bleue.  

 

La semaine qui s’ensuivit fut régulièrement perturbée par des incidents liés à l’électronique de leurs appareils. Myriam, qui était la biologiste / généticienne du couple, fit également une découverte assez spectaculaire quoique attendue : tous les organismes vivants avaient été affectés par les radiations – eux inclus, bien évidemment.  

 

Devaient-ils se mettre en quarantaine? Ou considérer qu’ils étaient à présent condamnés à rester isolés de leur planète natale ?  

Ils choisirent de s’auto-analyser, se firent passer une impressionnante batterie de tests avec le matériel dont ils disposaient. Sur eux, mais aussi les plantes et autres organismes cellulaires à leur disposition. Ils enregistraient chaque expérimentation.  

 

Stupéfiant : la présence d’une souche ADN supplémentaire révélait une mutation, chez eux et au sein de tout organisme vivant sur la base.  

S’il y avait de la vie qu’on avait pas encore trouvée dans ce système, même microcellulaire, on ne tarderait pas à la repérer du fait de cet élément signifiant très particulier qu'ils portaient en eux. Leurs corps, déjà massivement modifiés génétiquement par le programme spatial ChinaVerse, avaient parfaitement assimilé les nouvelles informations.  

Etait-ce hostile ?  

 

Au dixième jour qui suivit le passage de la vague d'énergie, Benedict constata une densification de son iris tandis qu'un appendice caudal naissait à l'extrémité de la colonne vertébrale de Myriam. Les deux scientifiques n'en furent que plus excités par ce qui les attendait. Ils décidèrent de concert de faire une pause dans leur recherche consacrée aux astres pour se consacrer à eux.  

Au quinzième jour, ils remarquèrent qu'ils ne prenaient plus leur drogue - ou moins régulièrement.  

Ils passèrent les seizième et dix-septième jours à baiser. Pas à faire l'amour, non : à se prendre brutalement à tout moment pour des étreintes de plusieurs heures.  

 

C'est d'ailleurs après ce marathon de libido que Benedict le premier commença à s'inquiéter sérieusement des modifications psychologiques qu'ils commençaient à sentir chez eux : durant les 35 ans qu'avait duré leur mariage heureux, ils avaient fini par développer une relation extrêmement fusionnelle : ils n'avaient que rarement besoin des mots pour se comprendre et ce qu'ils vivaient actuellement, ce n'était pas eux !  

 

Et si ce n'était pas eux, qu'était-ce donc ? Une forme de régression animale ? De retour aux origines mutagène ? De disparition de leur personnalité ? Finiraient-ils par oublier qui ils étaient pour s'entretuer ?  

Il fallait lutter contre cela mais n'était-ce pas déjà trop tard : en avaient-ils vraiment envie eux-mêmes ?  

 

(Script original, filmé dans les Studios A de Luxure)

Scénario : (2 commentaires)
une série Z d'horreur (cellulaire et SF psychologique) de Jack McClean

Mickael Glau

Margot Broughton
Musique par Barclay Buffett
Sorti le 22 janvier 2022 (Semaine 890)
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