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MMP présente
Ghostkeeper

Jennifer "Jen" Kaminsky (Tracy Staite) est en sang, accroupie dans un coin de la pièce sans fenêtre délabrée, un morceau de papier à la main. Elle griffonne quelques mots avec un stylo cassé puis avale le papier. Ses vêtements sont déchirés, elle souffre de contusions sur tout le corps. A l'autre bout de la pièce, la porte cadenassée et bloquée par l'armoire commence doucement à se gondoler sous les coups de boutoir de ce qui la poursuit. Les murs suintent la colère de la chose et commencent à trembler.  

Jen regarde l'embout pointu du stylo - il serait si facile d'en finir maintenant...  

 

Tout avait pourtant bien commencé 24H plus tôt. Un week-end de Pâques prolongé, une invitation de son grand-père Patrick (David Kaine) à passer quelques jours de repos sur la presqu'île d'Iselune, sur la côte basque Française, la perspective d'un petit séjour tranquille et sensuel avec son ami Jon (Christopher Ferguson), rappeur irlandais de son état.  

 

Patrick Kaminsky avait été gardien de phare dans une vie antérieure, avant que la profession ne disparaisse totalement à l'aube des années 2010. Il avait écrit ses mémoires avec l'aide de Jennifer, correctrice chez un éditeur espagnol. L'ouvrage plein de bon sens et de nostalgie avait remué la fibre marine européenne qui en avait fait un best-seller. "Papi phare" comme elle l'avait toujours surnommé n'avait ainsi plus à se soucier de sa retraite misérable. C'était juste grande peine que "mami" ne soit plus là pour partager ce succès. De retour sur terre, Kaminsky avait renoué avec une famille jusqu'à présent observée de loin.  

 

Le vieil homme dans son invitation avait sous-entendu qu'elle pourrait enregistrer sur son dictaphone un "chapitre final" de ses mémoires. Jen, qui pensait avoir fait le tour de la question à travers les 500 pages de leur livre commun, se demandait avec intérêt ce qu'il aurait à ajouter.  

On arrivait sur Iselune en traversant un petit pont inauguré récemment par les politiciens régionaux. L'endroit était reconnu pour sa flore et sa faune, on évoquait une prochaine classification au patrimoine de l'Unesco et en ce Printemps 2020, l'île se couvrait de mille fragrances et teintes. Le paradis sur terre.  

 

Patrick résidait dans une belle bâtisse qu'il était en train de retaper avec ses voisins. L'endroit avait appartenu autrefois à un notable local et les prestations étaient pour le moins rustiques. Une fois le couple installé dans la maison d'ami attenante, le maître des lieux les invite à dîner dans sa cuisine.  

C'est lui-même qui lance le sujet du "chapitre final", en présence de Jon (qui avait trouvé dans ce bonhomme l'inspiration d'un nouveau titre).  

"- Il y a quelque chose que je n'ai jamais évoqué lors de nos entretiens. Quelque chose que chaque gardien de phare doit transmettre avant de disparaître…"  

 

Patrick ne se voyait pas "bouffer les pissenlits par la racine" de sitôt, il avait encore "la frite" mais le ton restait angoissé - il avait impérativement besoin de se confier. La disparition de ses pairs au profit de machines et d'automatismes activés à distance entrainait de terribles conséquences pour les anciens gardiens.  

Jon essaya de comprendre : avait-il peur que l'on oublie ce qu'avait été leur profession et leur importance, depuis le phare d'Alexandrie ?  

Patrick sourit - il se lève, ouvre une belle armoire ouvragée et en sort un coffret en bois sur lequel a été gravé le mot "velum".  

"Le voile ?" interroge Jon en observant le coffret.  

Patrick leur explique qu'il a reçu ce présent des gardiens qu'il avait remplacés au milieu des années 80. Eux-même l'avaient reçu dans les années 50 des précédents occupants et ainsi de suite… Chaque phare, leur expliquait Patrick, avait toujours eu ce type de coffret.  

 

Il était incapable de dater l'objet et ne souhaitait pas s'en séparer.  

"- Les gens ont souvent dit de nous que nous étions sujets à la folie du fait de la solitude qui était notre lot quotidien. Personnellement, je n'ai jamais eu à souffrir de troubles. Comme tu le sais Jen', je suis plutôt un vieil ours solitaire - je l'étais déjà à 20 ans, ça devait me prédisposer à ce métier." Un sourire : Patrick avait compensé l'absence de compagnie par l'étude, la lecture, la littérature, s'évadant dans de nouveaux mondes. Il avait longtemps médité devant l'océan Atlantique.  

"- Tu ne pouvais pas laisser ce coffret dans le phare quand il a été évacué ?"  

Non, il ne pouvait pas : chaque gardien était tenu à la préservation de cet item. Car à travers lui, il protégeait la mémoire des morts.  

 

Un long silence dans la petite cuisine, à peine interrompu par le ronron du réfrigérateur et de l'éclairage au néon.  

Jen avait du mal à comprendre : la mémoire des morts ? C'était ça, le chapitre manquant des Mémoires ?  

Devant le regard perplexe du couple, il reprend : "Je ne m'attendais pas à ce que vous compreniez - moi-même, je me suis longtemps interrogé. Je ne pouvais pas abandonner le coffret car il est lié à moi, comme une promesse. Cela remonte à tellement longtemps."  

Sa profession avait eu ses traditions, ses superstitions et peurs ancestrales : ce coffret était le socle qui, disait-on, empêchait ceux qui regardaient la mer trop longtemps de devenir aliénés. La mer n'était ni bonne ni mauvaise, elle était juste différente et incompréhensible : comme tout Elément, elle ne serait jamais domestiquée par la science et les techniques de l'Homme. Or, tout ce que l'Homme ne comprenait pas le rendait fou, le coffret "attrapait" cette folie sans jamais la relâcher.  

 

En échange de quoi celui (ou ceux) du phare devait protéger le coffret, une "mémoire" qui détenait l'âme de ceux qui avaient disparu au large des côtes. Ceux que le phare n'avait pas sauvés.  

Patrick savait peu de choses sur le coffret, sinon qu'il n'avait jamais été ouvert. On le lui avait interdit et cela faisait aussi partie de "la promesse".  

 

Tandis qu'il terminait leur dessert en discutant de l'objet de manière de plus en plus passionnée, le trio n'avait remarqué ni la tombée de la nuit ni l'étrange manège d'une puissante berline alternant allers-retours sur la petite route cantonale qui bordait le terrain. A son bord, trois criminels aguerris, des "professionnels" du braquage qui pestaient devant l'occupation de la bâtisse.  

"- Tu crois que les nouveaux proprios ont trouvé le fric ?  

- Ca m'étonnerait."  

La maison n'avait pas été habitée durant de longs mois. Les aigrefins avaient trouvé pratique d'en faire une planque pour un butin bien mal acquis, un cambriolage avec violence qui avait valu la taule à l'un d'entre eux et le cimetière pour un Gardien de la Paix qui avait eu le malheur de sous-estimer leur force de frappe. Les passagers de la Peugeot étaient désormais aux abois : il était impératif pour eux, pour tout un tas de raisons personnelles, de récupérer l'argent ce soir, de gré ou de force.  

Ensuite, ils disparaîtraient à nouveau dans la clandestinité comme ils en avaient l'habitude.  

 

(Script original)

Scénario : (3 commentaires)
une série B fantastique de Jack Adih

David Kaine

Tracy Staite

Christopher Ferguson

Lisa Gould
Musique par Erik Badalamenti
Sorti le 18 juillet 2020 (Semaine 811)
Entrées : 20 346 623
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