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MMP présente
Fulcanelli

"Le secret de l'alchimie, le voici : il existe un moyen de manipuler la matière et l'énergie de façon à produire ce que les scientifiques contemporains nommeraient un champ de forces. Ce champ de forces agit sur l'observateur et le met dans une situation privilégiée en face de l'univers. De ce point privilégié, il a accès à des réalités que l'espace et le temps, la matière et l'énergie, nous masquent d'habitude. C'est ce que les alchimistes appellent le Grand Œuvre : la compréhension universelle de l'univers."  

Fulcanelli  

 

Munich, 1935.  

 

Les lourdes cylindrées de l'Abwehr (service de renseignements de l'état-major Allemand) viennent de faire crisser leurs pneus sur le gravier de la petite cour de l'Académie des Sciences. Des hommes patibulaires en complet noir en sortent et bloquent immédiatement les accès et sorties de l'immeuble C. Une seconde équipe y pénètre, monte le grand escalier qui mène aux laboratoires. Dans les couloirs, quelques cris, quelques biologistes rétifs à l'intrusion. Quelques étudiants curieux sortent de leur classe, y retournant vite à la vue des agents.  

 

Au second étage se trouve le laboratoire du Professeur Eugène Canseliet (William Merzi). La femme qui dirige les opérations, l'Oberstleutnant Monika Wermus (Shannon Green) ne prend pas la peine de toquer à la porte et l'ouvre à la volée.  

Au milieu de grandes tables ont été disposés des ouvrages d'alchimie, bouchons cellulosiques, précipités, table d'ondes, spectrophotomètre et divers ustensiles échappant à la connaissance du béotien.  

Il y a aussi un homme en blouse blanche et grosses lunettes : Canseliet, un Français des colonies qui vit de ses subventions, ici, au coeur de la Bavière.  

 

Wermus ne s'embarrasse pas d'étiquette, attrape le pauvre Wermus violemment par le col et le fait asseoir pendant que ses hommes fouillent la pièce :  

"- Où est Fulcanelli ?!?"  

Canseliet répond qu'il doit être chez lui - cela fait plusieurs jours qu'il ne l'a plus vu à l'Académie. Il aurait visiblement contracté un mauvais rhume et à son âge, il faut être prudent.  

"- Prud… ? Embarquez-le."  

On emmène le scientifique sans ménagement. Redescendue, Wermus est avertie : Fulcanelli, l'alchimiste Français, n'est pas chez lui.  

 

Sur le chemin qui la ramène à la caserne, elle relit avec attention le pedigree de l'occulte personnage. Date de naissance inconnue - des témoignages évoquent autour de 1839-40. Il aurait donc pas loin de cent ans. Aucun document iconographique pour étayer l'info : ni photo, ni peinture. Domaines de compétences : physique des particules (transformation du plomb en or), biologie du vivant (secret de la vie éternelle), chimie. L'homme est une énigme, personne ne se souvient l'avoir vu. Seul Canseliet son disciple, pourra les orienter.  

Quelque chose, en particulier, a troublé la Wehrmacht : dans les ouvrages qu'il a rédigés, l'ésotérique personnage a prétendu que l'usage militaire de l'atome - sur lequel Fulcanelli travaille de son côté - a déjà eu lieu, et que cela s'est avéré "une catastrophe".  

 

L'enquête sur la franc-maçonnerie n'a rien donné non plus : malgré la concordance de l'architecture et le mystère des cathédrales qu'il n'a cessé de tenter de décrypter, Fulcanelli n'est lié à aucune loge. Il continue à leur glisser entre les mains, cela l'énerve au plus haut point. Paradoxalement, l'homme a beaucoup écrit sur ses travaux - préfacé à chaque fois par Canseliet. Un tissu de fariboles, pense Wermus, mais son generalleutnant de supérieur a été très clair : il est l'homme à retrouver avant que les Schutzstaffel (SS) se chargent de lui.  

"- Récupérez Canseliet par défaut, il pourra nous mener à lui. Il sera plus en sécurité avec nous qu'avec eux."  

 

Tandis que les véhicules s'engagent dans Marienstrasse, ils passent devant un homme d'une quarantaine d'années qui sort du tailleur. Fulcanelli, rajeuni, qui s'est avisé de la présence des services secrets à son domicile au retour du marché. Il a alors bifurqué pour se fondre dans la foule.  

Il ne reviendra plus chez lui, il le sait. A la terrasse d'un café, son exceptionnel intelligence fait le tri mental des éléments que le gouvernement va possiblement récupérer chez lui : une belle bibliothèque - mais ses pièces les plus précieuses sont restées en Suisse. Quelques ouvrages ésotériques rares - qu'ils ne pourront pas exploiter de toute manière. Ses propres notes : plus gênant, mais il est doté d'une mémoire absolue (dite "photographique") et tous ses écrits étaient codés dans un symbolisme extrêmement hermétique - même Eugène serait incapable de les relire sans devenir fou.  

Pauvre garçon… Il subodore que les véhicules qu'il a vu débouler à l'Académie n'avaient pour seule mission que de le coincer, lui. Son apprenti en fera les frais à sa place, un bien faible tribut finalement.  

 

Il se rend à la gare et achète un billet pour le premier train en direction de la France. Il récupère la presse du jour et patiente. Un bail qu'il aurait du quitter le pays, pourquoi a-t'il fallu qu'il s'entiche de cette femme, cette jeune baronne veuve, Frau Vistul (Alexandra Dolby) ? Parce qu'au-delà d'une plaisante compagnie, cette dernière finançait ses travaux et voyages ?  

Heureusement pour lui, l'édition de ses ouvrages en 1926 et 30 et ses bienfaiteurs lui ont permis de se mettre un pécule de côté - de quoi voir venir en ces temps troublés. Car il y aura la guerre. Einstein est parti d'ici en 33 et c'est grand bien : il ne faudrait pas que les dirigeants actuels aient trop de grands esprits scientifiques compétents autour d'eux.  

 

L'alchimiste n'avait pas atteint son objectif ultime, la découverte de la Pierre Philosophale, la substance qui lui permettrait d'acquérir l'immortalité et de transformer tout métal en or. Il ne s'agissait pas que d'un fatras de légendes et de pseudo-mysticisme scientiste à la cosmogonie douteuse. Fulcanelli savait pour l'avoir étudié que le secret résidait dans les messages des siècles passés. A leur propre insu ou dirigés par la main Divine depuis plus de trois mille ans, les plus grands architectes avaient laissé des indices derrière leurs grandes oeuvres - tel un puzzle passionnant décrivant les différentes phases d'élaboration de la Pierre. Il appelait cela l'Esotérisme Architectural  

Certains édifices avaient été détruits par les guerres, la folie des hommes ou tout simplement le temps ; c'est ainsi de précieux indices qui avaient totalement disparu. Mais le puzzle était mondial : chapelle Sixtine au Vatican, Notre-Dame de Paris, Temple du Cheval Blanc en Chine, Gunung Wukir à Java… Tant de lieux de dévotion qui possédaient bien plus que ce que l'oeil en percevait.  

 

En première classe dans le train qui le ramenait en sécurité, il avait à nouveau sorti son carnet et griffonnait - remettant sur papier ce que les allemands peinaient à décrypter (ils n'y arriveraient pas de toute façon). Il travaillait en fait sur son troisième ouvrage. Il demanderait à Canseliet de le mettre en forme… si jamais ce dernier survivait. Il eut un court instant un petit pincement au coeur.  

 

A quelques dizaines de kilomètres de la frontière, le train s'arrêta brusquement. Un camion avait été disposé en travers de la voie. Il posa son carnet et s'intéressa à la rumeur, dressant l'oreille.  

"SS…" - une dame témoignait avoir vu quelques "beaux jeunes hommes en noir, quelle prestance, quelle élégance !". Oui, et ils étaient coiffés de près aussi. Il se leva tout doucement, dérangeant à peine son voisin profondément endormi et fit semblant de se rendre à la voiture de restauration. Il essaya de sortir entre deux wagons mais les portes restaient bloquées.  

 

"- Par ici."  

Une jeune femme (Diane Torres) habillée en garçon (pantalon, coupe au carré) lui avait murmuré à l'oreille - il tressauta : il ne l'avait pas entendue venir, lui d'habitude si prudent. Elle venait de le prendre par la main et lui fit traverser la voiture restaurant : les membres de la Gestapo étaient là et contrôlaient les identités. Elle s'approcha à nouveau de son oreille.  

"- Pas un mot. Je suis Karyn - laissez-moi faire et vous ne lâchez ma main que si JE vous l'ordonne." Elle resserra sa poigne, impérative.  

Il obtempéra et ils traversèrent tous les deux la rame, frôlant les agents. Arrivés à la porte, ils attendirent que quelqu'un l'active, ce qui arriva vite. Un officier monta, accompagné de deux séides. Ils en profitèrent pour s'éclipser du train.  

Dehors, une pluie fine commençait à tomber. Le couple marcha quelques instants le long de la voie puis sur la route, passant devant des soldats puissamment armés. Ils prirent un chemin de campagne après le hameau. Au bout d'un kilomètre, elle le lâcha et découvrit un véhicule neuf dissimulé des curieux. Elle récupéra une clé derrière une des roues.  

"- Comment… ?  

Ne posez pas de question Herr Fulcanelli : il y a des gens à Berlin qui veulent vous rencontrer - ils ne sont pas liés aux Nazis."  

 

Il se tut - lui ne travaillait avec personne : tant que ses recherches n'avaient pas définitivement abouti, il voulait continuer à choisir ses collaborateurs, pas le contraire. Circonstances ou pas, danger ou pas, il ne méfiait trop de la folie de l'Homme dès qu'il abordait le sujet de la Pierre Philosophale.  

La jeune femme fit démarrer le premier modèle d'Opel Kadett du premier coup.  

 

 

Pour le Gruppenführer Auswalder (Hugo Constantinescu) qui les avait croisés dans la voiture-restaurant, tout s'était déroulé comme prévu - même s'ils avaient bien failli le rater de peu : Karyn avait récupéré Fulcanelli, ses hommes avaient fait semblant de ne pas les voir partir - le Français était tombé dans le panneau et penserait qu'elle disposait d'un quelconque "pouvoir". Ils n'avaient eu de photo récente de lui que ce matin par le biais des Services Secrets de la SS. L'espionne le ramènerait dans la capitale et le convaincrait par tous les moyens de mettre ses talents au service des "communistes", une de ses cellules destinées à tromper l'ennemi invisible.  

La Wehrmacht l'avait dans l'os - c'était bien : ils avaient le disciple, eux le Maître. C'était plutôt profitable pour son propre avancement aussi.  

 

Auswalder était occultiste lui-même et "on" lui avait donné carte blanche malgré (ou à cause ?) de vagues origines roumaines qui ternissaient un peu son bagage Aryen. Issu de la basse-noblesse d'Europe Centrale, il avait tout lu de Fulcanelli et des alchimistes des deux derniers millénaires - et même s'il ne partageait pas sa philosophie (il trouvait en particulier son "Avez-vous réfléchi aux conséquences fatales qui résulteront d'un progrès illimité ?" particulièrement naïf), il restait admiratif de l'oeuvre de ce jeune centenaire qui en paraissait soixante ans de moins et se faisait passer pour son propre fils auprès de l'état-civil. Un esprit brillant qui, s'il avait incontestablement rajeuni, n'était pas encore parvenu à la quintessence de sa mission.  

La Pierre Philosophale - l'aboutissement des connaissances de l'Homme : comment, pourquoi vouloir la garder pour soi alors qu'elle pourrait servir à tant de choses extraordinaires pour le futur ?  

 

Peu de temps après que Karyn et Fulcanelli furent partis, Auswalder fit arrêter les contrôles. Il passa même dans les voitures pour excuser le dérangement occasionné.  

Il savait que ses hommes avait pris en filature la Kadett. L'étau se resserrait.  

 

(Script original)

Scénario : (2 commentaires)
une série A historique (Aventures) de Cristina Glass

Adrian Harland

Shannon Green

Hugo Constantinescu

Diane Torres
Avec la participation exceptionnelle de William Merzi, Alexandra Dolby
Musique par Emmannuelle Cage
Sorti le 30 mai 2020 (Semaine 804)
Entrées : 25 012 431
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