Note de mise en forme : merci de considérer l'usage des majuscules comme un effet de style.  

*** AVERTISSEMENT : Film muet à base de bruitages et musique ***  

Elle (Virginia Kosma) prend sa douche. Sourde-muette depuis l'enfance, Elle compense l'handicap par une hypersensibilité et une perception accrue de ses autres sens. Nous percevons ce qui L'entoure à travers Elle et Sa petite musique intérieure.  

Elle se caresse. Il (Klaus Krumholtz) rentre dans la pièce et vient La rejoindre. Il La prend comme un satrape, La plaque sur la vitre, La besogne violemment, se prend pour une star du hard, Lui fait mal sans s'en soucier.  

Il a fini son affaire. Se rhabille, sort de la salle de bains puis de l'appartement sans se retourner. Elle sait qu'Elle Le reverra dans peu de temps. Elle ne connait pas Son nom. Lui non plus. D'ailleurs, Ils n'ont nul besoin de plus. Un simple regard a suffi hier, pour se comprendre - quelques billets et le deal était conclu.  

Elle se nettoie une seconde fois, retire la fine seconde peau qu'Il lui a laissé sur le corps en souvenir. C'est l'esprit vidé qu'Elle sort à son tour du petit appartement bruxellois.  

Mais bientôt, ça Lui reprend : Elle ne peut s'empêcher de repenser à l'Autre (Ninna Miretto), son premier amour, son amie d'enfance, la femme de Sa vie. Son souvenir L'obsède. Elle n'arrête pas d'y penser. L'Autre L'a quittée il y a cinq ans au profit du jeune Coq, cadre dans une quelconque administration anonyme. Le Coq (Chris Kubota), ainsi qu'Elle l'a nommé, prêt à monter sur ses ergots au moindre signe de remise en cause de sa virilité. Bâti comme un bretzel mais arrogant du portefeuille. Il a une très grosse voiture.  

Elle préfère ne pas penser au Coq, préfère focaliser sa "partie de son cerveau encore disponible" à l'Autre et à Lui, son inconnu d'hier, étalon sulfureux dont elle connaît bien les habitudes.  

Elle arrive au travail tel un zombie rêveur. Prend son poste d'opératrice de saisie à mi-temps. Traverse l'après-midi dans une semi-torpeur.  

18h00 - sortie des bureaux, traversée de la moitié de la ville sous une voûte nuageuse menaçante. Fin d'été. Elle file directement chez l'Autre qui la reçoit en peignoir. Elle L'attendait. L'Autre est nourrie-logée-blanchie-entretenue par le Coq. Dès qu'Elles se frôlent, Elles sont emportées dans un tourbillon qui Les dépasse.  

On Les retrouve l'une sous l'autre dans la chambre à coucher, les sens embrasés. Elles ont tout le temps : le Coq travaille très tard.  

Plus tard, nues et ruisselantes sur le lit, encore traversées de spasmes, Elles se regardent, n'ayant nul besoin d'autre communication que celle qu'Elles viennent de vivre. A travers leur caresses et leur ivresse, Elles savent qu'Elles ne peuvent se passer l'Une de l'Autre. C'est vrai : Elles se sont quittées, l'Autre pour ne pas devenir folle tout simplement. Elle Lui a pardonné. C'est vrai aussi que depuis cette rupture, Elles se retrouvent toutes les semaines pour vivre des instants comme celui-ci. Pour Leur équilibre. La rupture pour ne pas devenir folles ; les retrouvailles pour ne pas devenir folles.  

Elles sont fusionnelles, se sourient, rigolent. Elles ne veulent personne sur leur chemin.  

Au loin, un téléphone sonne. Elle ne l'entend pas (pour ses propres besoins, son cellulaire vibre), l'Autre oui - se lève, décroche. Trop tard. C'est le Coq : Il laisse un message. Ne rentrera pas ce soir. Elle propose alors à l'Autre une petite soirée romantique puis un saut dans son établissement de nuit pour Le retrouver. Lui, son étalon. Et meilleur client.  

L'Autre est excitée par la perspective d'une nuit à trois. A l'heure dite, Elles prennent la direction d'un des petits clubs glauques de la périphérie - Elles sont sexy en diable : il faut que la marchandise Lui plaise.  

Il est là, au couloir, à user le skai de son tabouret attitré. Elles l'entourent, agressives. Ce soir, Il sera à Elles. Il n'a pas le moral : Il est "dans les affaires" et ça ne marche pas fort, Il ne pense pas vouloir passer une nuit de folie à Ses tarifs.  

Elle lui fait comprendre qu'Il en aura deux pour le prix d'Une. Et que l'offre est très limitée. Il cille.  

On Les retrouve chez Elle, saouls, à s'arracher les vêtements. L'orgie dure toute une nuit. Les corps s'épuisent, les souffles saccadées. L'aube pointe déjà au moment où Ils finissent de jouir de concert, transpirants, tremblants sous l'effort.  

Pantelants tous trois, Ils s'échangent Sa dernière cigarette sur les draps humides. Lui et l'Autre la laissent se reposer - peut-être quelques ébats supplémentaires dans la cuisine ? Elle est trop fatiguée pour être jalouse et elle prend Son service dans deux heures. Elle se repose et s'endort quelques instants.  

Au réveil, il n'y a plus qu'Elle dans l'appartement. L'Autre lui a laissé un message griffonné à la hâte sur les restes de leur petit-déjeuner : l'Autre a discuté avec Lui.  

"Retrouve-moi tout à l'heure ici. Il connaît le Coq !"  

(Script original)