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MMP présente
Rock Doll

Kyoto - Japon, dans le futur.  

 

Kobe Uazaki (Jason Byrne), 24 ans, s'est offert pour son dernier anniversaire la "petite amie parfaite", une Rock Doll, comme une real doll mais avec les raffinement de l'ingénierie et des technologies nano-robotiques / informatiques de cette fin des années '30. Car à la différence des modèles précédents, celui-ci peut se tenir debout, marcher, discuter, transporter des objets aussi lourds qu'elle et - bien sûr - "plus si affinités". Car ces modèles ont non seulement la texture de la peau mais désormais la chaleur qui leur manquait.  

 

Il faut dire que Kobe a les moyens - la miss de silicone et fibre optique lui a coûté au bas mot plus d'un demi-million de dollars (un des rares luxes qu'il s'est offert), mais ce modèle est parfaitement configurable : il l'a donc pris caucasienne (ici les "locales" sont reconnues surtout pour leur frigidité) avec un corps parfait et un apetit sexuel vorace. Kobe travaille dans une grande société d'import-export chinoise, il revient tard du bureau et ce à quoi il aspire le plus à son retour, c'est un bon repas et une bonne séance de "ça va-ça vient" avec une nana qui ne lui posera pas de question. Il a nommé sa nouvelle acquisition Lucy (Joanna Lawrence), parce qu'il aime bien les Beatles et surtout Paul McCartney.  

 

L'avantage des poupées parlantes à taille réelle, c'est qu'elles s'intègrent à merveille avec votre vie culturelle et sociale : vous sortez voir un film ? Emmenez-là, vous en discuterez avec elle après la séance : elle vous dira ce qu'elle en aura pensé et sera allé chercher pendant la séance les infos sur le tournage. Les joies du réseau sans fil. De même si vous la présentez à vos amies, ceux-ci pourront lui transmettre toutes sortes d'informations sur eux. Et mieux encore, s'ils disposent d'une Rock Doll, vous verrez ces deux-là papoter comme deux jeunes femmes ordinaires. On les dit même sexuellement compatibles pour des jeux à plusieurs - mais Kobe, lui, y tient à sa Lucy - et s'avère assez possessif avec elle. Il sait néanmoins qu'il ne doit "pas trop" la violenter sous peine de faire tomber la garantie (10 ans standard - pièces et main d'oeuvre).  

 

Au 26ème étage de sa petite tour qui ne paye pas de mine, il rêve de réussite sociale, de prestige et de voyages. De temps à autre, perdu dans ses pensées le week-end, alors que la pluie à l'extérieur a pris une étrange teinte verdâtre, il se tourne vers Lucy pour lui demander ce qu'elle en pense. Les questions philosophiques et de réussite ne sont pas au programme de son Intelligence Artificielle, mais elle adopte toujours un profil neutre et compréhensif avant de lui proposer une gâterie, histoire de lui remettre le moral au beau fixe.  

 

"La petite amie parfaite", c'était bien ainsi que son constructeur décrivait ce modèle. Pourtant, un soir, alors qu'il est repu, il décide de sortir de l'appartement, réclamant à Lucy de se mettre confortable sur le lit et l'attendre, les cuisses ouvertes, à son retour.  

Il passe par les quartiers chauds de la grande métropole, s'arrête dans un bar à Patchinko, commande un verre et attend qu'une hôtesse l'aborde. En attendant, il observe les grappes d'étudiants saouls se faire raccompagner tantôt par leurs amis, tantôt par leur domestique informatisé. A aucun moment, il ne voit de signe de tendresse, une attention pour les représentants du sexe opposé : les filles sont là pourtant, également en groupe, en train de baver et de rigoler sottement sur les holo-scans des derniers strippers à la mode : ils sont noirs, viennent des USA, sont "100% naturel" - en rapport évidemment à cette mode de l'allongement du pénis dont ses collègues raffolent. Il sourit tristement et replonge dans son verre. Il en commande un second au comptoir.  

 

Quand une des employées l'aborde, ce n'est pas pour lui proposer ses tarifs de backroom : la fille sait qu'elle ne peut concurrencer les modèles cybernétiques actuels ; elle se contente donc de lui glisser un flyer l'informant des robo-escorts disponibles. Kobe s'en fout - il a ce qu'il faut à la maison, les escorts, c'est vraiment pour les losers et comme le disait un publicitaire récemment "si vous n'avez pas votre Rock Doll avant 50 ans, vous avez raté votre vie". Lui a 24 ans, il a donc réussi sa vie. Cette dernière pensée lui laisse curieusement un sentiment d'inachevé. Il commande un troisième et dernier verre pour la route.  

 

Dans le métro aérien, l'ambiance bleuâtre et tristounette accompagne mal la musique pop synthétique sautillante délivrée par les haut-parleurs de la rame. Il y a encore beaucoup de monde à cette heure tardive... A ses côtés, une Rock Doll réconforte un jeune homme en train de pleurer. Les Rock Dolls ne connaissent pas la notion de compassion, elles déterminent votre humeur par l'analyse de vos traits faciaux et du spectre de votre voix et accèdent au bon sous-programme. Là, c'est "neutralité et compréhension" - avec bras autour de la taille et fourniture du kleenex.  

 

L'ascenseur qui le ramène à l'appartement fait un drôle de bruit - ou bien c'est lui qui n'est pas bien dans sa peau ce soir - difficile à dire. Il a drôle de goût amer dans la bouche. Sa Lucy l'attend à l'endroit et la position exacts qu'il lui avait réclamées. Elle a profité de son absence pour recharger ses accus et mettre à jour ses programmes. Il lui dit qu'elle est très bien mais qu'il va directement dormir. Il est fatigué. Elle le comprend. Dans la nuit, elle lui posera la main sur le bras. La compréhension, toujours - même s'il sait qu'elle ne dort pas. Peu avant le réveil, elle se lèvera pour préparer le petit-déjeuner, lui demandera s'il s'est bien reposé, l'informera des appels éventuellement reçus et de ses réunions de la journée. Il partira sur les coups de 07h00.  

 

Le métro aérien, à nouveau. Au milieu de la foule, il détaille d'un oeil torve deux lycéens main dans la main - elle rougit et lui glousse. Kobe sourit : dans quelques années, lui préfèrera des modèles moins capricieux et coûteux sur le long terme, et elle un modèle moins chiant qui la comprendra et restera performant au lit toute sa vie. Oui, la technologie devait donner à l'Homme ces Prince et Princesse qui ne vieilliraient jamais. Ainsi, l'humanité moderne urbaine et fortunée pourrait se désintéresser de l'angoisse de sa propre mortalité pour se consacrer au seul bonheur de sa vie. Les Robots étaient là pour nous libérer de l'angoisse et simplifier les choses. Est-ce qu'en passant, ils ne nous avaient pas retiré notre capacité à comprendre nos semblables ?  

 

Kobe secoue la tête - voilà qu'il philosophait au petit matin. Pas une attitude très productive.  

En entrant dans les locaux de l'entreprise, il décidait que ce soir, il se rendrait à la bibliothèque, avec Lucy : il voulait comprendre cette impression d'avoir grillé des étapes de sa propre vie...  

 

(Script original)

Scénario : (2 commentaires)
une série Z de science-fiction (Asimov est vivant) de Oria Fitch

Jason Byrne

Joanna Lawrence
Musique par Adrienne Band
Sorti le 16 septembre 2017 (Semaine 663)
Entrées : 15 392 020
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