La lumière blafarde du plafonnier donnait à la pièce un air lugubre, auquel le lieutenant Duperey n'avait jusque là jamais fait attention. Assis au milieu de la pièce, sur une simple chaise en aluminium, Alain Duperey (Patrick Lassek) alluma une cigarette et tira nerveusement dessus. Ce n'était pas la situation qui le rendait nerveux. Il la connaissait bien assez pour ne pas s'inquiéter de la tournure que cela allait prendre, bien qu'il se trouvait cette fois-ci de l'autre côté. Ce qui le stressait, c'était le fait que l'homme face à lui soit ce bon à rien de Vincent Gabriel (Benjamin Ziller), un capitaine de police qui depuis son arrivée au commissariat avait eut Duperey dans le pif.  

Les deux flics avaient très peu de choses en commun. Car si Alain était réputé pour sa grande efficacité, les nombreux dossiers qu'il avait traité témoignant de ses qualités de flics, jamais il n'avait cherché à profiter de ça pour faire carrière, et grimper les échelons. Car ce qui l'intéressait, c'était le terrain. Rester derrière un bureau à donner des ordres, ce n'était pas fait pour lui. Le capitaine Gabriel était tout son contraire. S'il n'était pas le pire élément de la police, les affaires classées sans suite étaient plus nombreuses dans sa carrière que celles qui avaient fini par une arrestation sans aucun doute sur le coupable. Pourtant, cela ne l'avait pas empêché de grimper, et il comptait encore continuer.  

Et à présent, alors qu'il avait Duperey face à lui, il espérait bien profiter de cette affaire pour se faire remarquer, et gagner encore du galon. Vincent Gabriel se leva de son siège et contourna le bureau sur lequel il vint s'asseoir, face au lieutenant. Le capitaine se donnait un air sombre et sérieux, qui aurait fait sourire Duperey tellement il surjouait son rôle, si la situation n'avait pas été si compliquée pour lui.  

Cela faisait déjà plusieurs semaines que Duperey enquêtait sur une affaire que lui avait confié le commissaire. Une affaire a priori simple, le viol d'une étudiante, au cours d'une soirée d'intégration. Un de ces crimes qui faisait malheureusement partie de la routine pour un flic comme Duperey. Mais lorsque celui-ci était commis par un étudiant de la faculté de droit, fils de bonne et riche famille, cela compliquait les choses.  

Pour le capitaine Gabriel, les choses étaient plus simples. D'après le dossier qu'il avait consulté, tout accusait un jeune étudiant boursier, originaire des quartiers défavorisés de la ville. Fils d'immigré, il avait obtenu une bourse qui lui avait permis de poursuivre des études de droit. Mais les choses avaient mal tournées, et à présent, le coupable du viol siégeait à la morgue, où on l'avait remis après l'autopsie qui avait confirmé que la balle qui l'avait tué avait été tirée avec l'arme de service de Duperey.  

Duperey avait pris cette affaire trop à coeur, et avait craqué. C'était la conclusion que le capitaine Gabriel avait tirée. Mais le commissaire avait exigé que Duperey soit interrogé, afin de faire la lumière sur toute cette histoire. Voilà pourquoi les deux flics se retrouvaient à présent face à face. Intérieurement, Gabriel jubilait. Cette affaire lui permettrait sans doute de grimper encore les échelons de la police, et il fermerait enfin la grande gueule de celui qui, depuis son arrivée au commissariat, ne cessait pas de mettre en avant ses erreurs.  

Alain Duperey tira une nouvelle fois sur sa cigarette. Les deux hommes se fixaient silencieusement, attendant que l'autre démarre, mais rien ne venait.  

La voiture de Diane Scellier (Jessie Forden) s'arrêta sur la place au coeur de la cité. La flic sortit de son véhicule et se dirigea immédiatement vers le bâtiment où logeaient les parents de Saïd. A la demande du commissaire, le lieutenant Scellier menait sa propre enquête sur cette affaire. Le commissaire ne parvenait pas à croire cette histoire. Il ne comprenait pas comment Duperey aurait pu commettre cet acte. Pourtant, toutes les preuves étaient contre lui, et le commissaire ne pouvait rien faire pour empêcher son arrestation, surtout lorsqu'un de ses membres, tel que Vincent Gabriel, avait décidé d'utiliser cette affaire à son profit. Il avait alors demandé à Diane Scellier, une jeune flic qui avait commencé sa carrière aux côtés de Duperey, de découvrir au plus vite la vérité sur toute cette histoire.  

Pour commencer, elle avait donc décidé de se rendre chez les parents de Saïd, le jeune homme qui avait été retrouvé mort, et qui était accusé du viol à l'origine de l'affaire. La flic craignait cependant de ne pas être bien accueillie par la famille du défunt. Et après tout, elle comprendrait qu'ils ne veuille pas recevoir chez eux une flic, alors que tout disait que leur fils, dont ils étaient persuadés de l'innocence, avait été abattu par un policier. Pourtant, Diane devait à tout prix interroger ces parents. Elle devait reprendre l'histoire depuis le début, pour tenter de résoudre toute cette affaire. Mais le temps lui était compté.  

Assis sur sa chaise, Alain Duperey tira la dernière bouffée de sa cigarette. Le capitaine Gabriel saisit alors un cendrier sur le bureau derrière lui, et le tendit à son collègue. Duperey écrasa son mégot au fond de celui-ci, en sachant ce que cela signifiait. Il allait être temps de commencer à parler. La question de Vincent Gabriel ne traina pas. Il voulait tout connaître cette histoire. Duperey devait tout lui raconter.  

Sachant très bien que garder le silence ne ferait que jouer contre lui, Alain Duperey remonta alors au tout début de l'affaire, et commença à raconter son histoire. Tout avait commencé par le viol de cette étudiante d'origine asiatique...