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MMP présente
Billy Boy est revenu

Manchester, 1985  

 

Dans les premières lueurs de l'aube, dans ce beau quartier résidentiel anglais, on peut déjà apercevoir la petite silhouette de l'enfant qui marche au milieu de la route. Il est nu, blessé, contusionné, scarifié sur de nombreuses parties du corps qui laisse une mince traînée sanglante derrière lui. Il marche mécaniquement, sans vraiment savoir où il se rend. Et qu'importe : c'est la première fois qu'il voit les rayons du soleil, la première fois qu'il respire l'air "d'en haut" - le monde peut bien s'arrêter de tourner aujourd'hui. C'est fini.  

Il se met à aboyer quand il aperçoit le milkman.  

 

Hier, à Manchester (Royaume-Uni), une mère de famille de 23 ans a décapité son bébé âgé de trois semaines et demi et tenté d'assassiner l'ainé de ses enfants, un garçonnet de 7 ans qu'elle faisait vivre reclus du monde et qui a pu s'échapper du domicile familial avant de subir un sort similaire. L'enfant a été blessé mais ses jours ne sont pas en danger.  

Pour expliquer son terrible geste, la mère, chômeuse divorcée, a précisé aux policiers venus l’interpeller que le "diable lui avait ordonné de le faire".  

Au moment de son arrestation, la jeune femme se trouvait sur un canapé et hurlait qu’elle venait de tuer son bébé. Elle s’était également poignardée, tentant en vain de mettre fin à ses jours.  

Au domicile de la meurtrière, les policiers ont trouvé un troisième enfant, âgé de 5 ans et indemne de toute blessure.  

Joy Mann, porte-parole de la Police, a indiqué que les enquêteurs avaient trouvé au domicile un couteau de cuisine, une épée et une machette. "Quelqu'un ou quelque chose lui a ordonné de le faire : elle entendait des voix" a précisé Mr Mann.  

Tout en ajoutant : "cela nous conduit à penser qu'elle souffre de troubles mentaux".  

La jeune mère de famille a été transportée à l’Hôpital Universitaire de Coopperfield. Ses deux enfants survivants seront pris en charge par l'Assistance Publique après enquête sur les sévices qu'ils auraient pu subir.  

Getty Press  

 

20 ans plus tard.  

 

Une sale affaire.  

Le Professeur Ringlage (Hubert Dupontal) referme avec précaution le dossier de son patient, William "Billy" Forsythe (Joshua Kwiat), fils d'Annah Forsythe (Stephanie Gonçalves) décédée hier dans une chambre du Quartier de Haute Sécurité de l'Hôpital de Barker Hill, à une centaine de kilomètres d'ici. Relation de causalité ? Billy n'a pas arrêté de hurler cette nuit.  

Billy, Ringlage l'a pris en charge dès son arrivée ici, à Coopperfield. Un de ces cas d'enfants maltraités, brimés et battus à la puissance dix. Le traitement que sa mère lui avait infligé était au-delà des mots - la presse à scandales du Royaume s'était fait un plaisir d'en dévoiler tous les détails les plus nauséabonds grâce à des fuites policières distillées et cela avait distrait la foule un temps. Puis Billy et sa mère étaient ressortis de l'esprit des gens.  

 

Le second enfant de la famille n'avait rien subi de tout cela : jusqu'au jour du drame, il ignorait qu'il avait un aîné - Annah lui avait caché jusqu'à son existence, vivant deux vies parallèles : celle d'une marâtre et celle d'une jeune femme assez normale. Le gosse allait être scolarisé normalement quand sa mère a pété les plombs et décapité le petit dernier. Il vivait désormais en France (ou en Hollande peut-être) sous une identité seulement connue des services sociaux.  

 

La mère. Annah Forsythe : chômeuse, fille de chômeurs - comme si c'était une malédiction : violée par Gregory William F., son père alcoolique, dès l'âge de neuf ans. Tapineuse à douze, enceinte à quinze : elle avait prétendu plusieurs fois à la Police que son père était aussi celui de Billy mais certains indices ne concordaient pas. Ringlage n'avait pas suivi Annah, par conséquent il ne connaissait pas tous les détails du dossier. C'était dommage : visiblement, elle souffrait de psychose paranoïaque doublée d'épisodes hallucinatoires consécutifs à l'injection d'une impressionnante quantité de psychotropes dans le corps. Elle semblait aussi avoir développé une sorte "d'empathie haineuse" avec son premier fils, comme si elle voulait se venger de son père (décédé d'un cancer de la prostate peu de temps avant la naissance de Billy) en le maltraitant tout en le maintenant dans un stade de (sur)vie et d'aliénation atroce. Billy avait été élevé comme un chien battu, traité comme un chien - pour survivre, il avait du régresser au stade primal du règne animal. C'était ce qui l'avait sauvé.  

 

Le diagnostic de Ringlage restait réservé à son sujet : l'enfant devenu adulte avait appris à parler, à domestiquer l'autre, mais il restait schizophrène à personnalités multiples, régressif avec des tendances masochistes à l'auto-destruction inquiétantes.  

Le faire sortir aujourd'hui n'était pas problématique pour les autres - Billy n'était pas dangereux - : c'était problématique pour la santé du jeune homme à jamais fragilisé. Sans un strict suivi médical, il risquait d'aller tout simplement dans le mur. Mais les nouvelles restrictions du Gouvernement Blair imposaient de profonds changements dans la gestion des maladies mentales, et en cela, Ringlage voyait une régression insupportable. Il s'était personnellement promis de suivre le "cas" Billy Forsythe tant qu'il le pourrait.  

 

Billy était sorti ce dimanche à 18h00 GMT avec son baluchon et l'adresse d'un centre social au sein duquel il trouverait asile pour un temps. Mais il lui faudrait s'adapter à son nouvel environnement et ne connaissait quasiment rien à la vie. Le jeune homme avait pris 100 kilos et avec son mètre quatre-vingt-dix, c'était une impressionnante masse de viande et de muscle de presque trente ans.  

Instinctivement, il reprit le chemin de l'ancienne maison familiale. Après le drame, elle avait été vendue au plus offrant, histoire de couvrir les frais induits par le traitement et l'entretien des enfants et de la mère. Il restait à Billy une petite somme sur un compte bloqué jusqu'à sa sortie.  

 

Plus de bus pour sa destination. Il fit un tour dans le centre-ville, récupéra un plan et marcha jusqu'en banlieue.  

Trois heures plus tard, il était sur place, en face de la demeure qui avait changé de propriétaire quatre fois. Les occupants étaient une jeune mère (Cristina Lillard) et ses trois jeunes enfants. Curieux : c'est la seconde fois seulement qu'il voyait cette maison - la première, c'était le jour de sa fuite - et il l'avait retrouvée comme s'il l'avait quittée hier...  

La boîte aux lettres indiquait "Miss King et Damien, Michael et Jason". Il n'y avait pas ou plus de père.  

 

Il reprit son chemin. Des gens du quartier sortis prendre le frais en grillant une dernière cigarette murmuraient derrière lui. Il ne voulait pas se faire remarquer. Il s'éloigna puis jeta un dernier coup d'oeil à ce qui avait été sa prison des premières années de sa vie. Il avait besoin de ça.  

 

L'image du lotissement était là, éclairé par les lampadaires. Sur sa rétine, une autre image venait de se former : celle du même lotissement vingt années auparavant. Cette seconde image avait des teintes plus saturées.  

Il voyait clairement les mêmes personnes qui l'avaient dévisagé discuter, chuchoter - mais avec vingt ans de moins au compteur... Ils devisaient alors entre eux sur les horreurs qu'ils soupçonnaient se commettre au 17 McFarlane Street, sur cette jeune femme "hippie" qu'ils ne voyaient pas d'un bon oeil.  

Ces gens savaient. Et ils n'avaient rien dit. Même pas à la justice.  

 

William "Billy" Forsythe reprit son sac et le chemin du centre d'hébergement. Quelque part au fond de lui, une voix de femme l'intimait de revenir en finir avec sa propre vie. Une autre voix encore plus sombre, lourde et menaçante, faisait écho à sa propre colère - sa force éclipsait même parfois la voix féminine : elle lui ordonnait de revenir. Mais pour punir les témoins aveugles de son supplice. Une troisième voix enfin, plus doucereuse et enfantine, faisait monter son désir pour "Miss King" et celui de ré-occuper définitivement les lieux de son enfance barbare.  

Le trio de voix - habituellement plus ordonnées dans sa tête grâce aux soins du Professeur Ringlage - commençait à lui donner mal à la tête et se confondait dans une cacophonie grotesque.  

Il accéléra le pas.  

 

(Script original, inspiré d'un fait réel)

Scénario : (3 commentaires)
une série B d'horreur (Sociale / Psychologique) de Colin Hartnett

Hubert Dupontal

Cristina Lillard

Joshua Kwiat

Stephanie Gonçalves
Musique par Lou Landau
Sorti le 27 mars 2015 (Semaine 534)
Entrées : 13 650 862
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