À 22h 50, Paul commença par voir un reflet de lumière sur le mur de brique de la vieille ruelle. Il évalua rapidement le type d’éclairage de la voiture en approche, et s’aperçu qu’il ne s’agissait pas de la BMW 4 portes de son contact, Chris. Il se retira dans la pénombre, derrière un gros conteneur à moitié rempli de déchets domestiques. La puanteur le dérangeait, mais il ne pouvait régler le compte de tout ce qui le dérangeait dans le monde. Paul sortit son Walther P99, qui lui était plus cher que sa propre vie, et le chargea.

Une voiture noire, de marque Mercedes, s’engagea dans la ruelle, à très bas régime. Ses fenêtres étaient teintées, impensable de tenter d’identifier les individus à bord. Elle s’arrêta peu avant le conteneur. Trois portes s’ouvrirent, se refermèrent, et des gens commencèrent à marcher aux aguets. C’est à ce moment que Paul surgit de l’ombre, arme braquée, prêt à vider son chargeur. Ses vis-à-vis étaient trois grands gorilles, blonds, portant lunettes de soleil et pistolets 9 millimètres. Aucun coup de feu n’éclata. La quatrième porte de la voiture s’ouvrit, laissant sortir une magnifique jeune femme, vêtue d’une longue redingote en cuir et portant un sac de voyage. Elle avança doucement vers Paul, le dévisageant, comme pour évaluer sa force intérieure. L’homme soutint le regard sans broncher. Après tout, il avait fait face à de bien pire bougre, dans sa carrière de marchand de bombes miniatures.

La femme se présenta comme étant Nathalie Owens, fille du célèbre Curtis Owens, l’homme qui, par accident, s’était explosé la figure à la nitroglycérine, lui donnant un affreux visage, capable à lui seul de soumettre quiconque le voyait. Nathalie venait donner un avertissement à Paul, celui de cesser son commerce dans le secteur sud de la ville, qui appartenait depuis trois décennies aux Owens. C’est alors que l’homme au Walther tira trois fois la détente, et les trois gorilles s’effondrèrent lourdement, faisant plus de bruit que les coups de feu eux-mêmes. Nathalie ne s’enfui guère. Elle se pencha seulement pour ouvrir le sac de voyage qu’elle portait, duquel elle ressortit la tête de Chris, le fournisseur de Paul.

La femme jeta alors la tête dans le conteneur à déchet, tourna les talons, et reparti dans la Mercedes. Trois minutes plus tard, Paul roulait vers le QG de Curtis Owens, prêt à en découdre avec le plus grand vendeur de la ville, le mieux armé, le plus riche, et le père d’une véritable garce…