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MMP présente
Comtesse

Hongrie, région de Cachtice dans les Carpates. 1582.  

 

La jeune femme court dans la lande humide comme si sa vie en dépendait.  

En fait, sa vie en dépend. Concentrée uniquement sur sa survie, elle n'entend pas derrière elle le galop qui se rapproche. Son coeur bat la chamade, peut-être que si elle parvient à s'enfoncer dans la forêt elle parviendra à atteindre le village vois---  

Un carreau d'arbalète vient se ficher entre ses deux omoplates. Prise de court, le souffle coupé, elle s'étale blessée sur la terre humide. La mauvaise chute l'assomme.  

La silhouette du cavalier se rapproche. Ce dernier porte une robe de bure qui le rend massif et cache chaque pore de sa peau. L'individu pose pied à terre, regarde la blessure : la jeune femme halète toujours. Son pouls est irrégulier mais au moins n'est-elle pas morte. Tout va bien. Elle est arnachée avec difficulté sur la selle, attachée solidement pour ne pas qu'elle s'enfuie - à nouveau - puis reprend le chemin du chateau de la famille Báthory.  

 

Depuis le décès de son second bébé, la comtesse donne court à tous ses fantasmes les plus morbides. Elle s'est entourée d'alchimistes, d'occultistes, de bien mauvais conseils. Elle s'est lancée un temps à la recherche des livres et artefacts interdits : Nécronomicon du 8ème siècle de l'arabe fou Al-Hazred*, Lament Configuration**, Couronne Pourpre... En vain. Cet entourage - et l'absence de son mari tant aimé - n'arrange pas les propres affaires des gens du château. Des villages environnants, on commence à se poser des questions : d'abord, des étrangers qui disparaissent ça n'est pas anormal. Mais quand les filles vierges des environs en font autant, les regards se tournent vers le châtelain. Ou sa femme, Élisabeth (Elaine McClean). Une grande dame influençable...  

 

Le cavalier hâte le trot de sa monture - de retour au pied de l'édifice, on avise deux hommes d'armes qui récupèrent la jeune femme. Une catin certes, mais qui ne mérite peut-être pas le sort qu'on lui devine. Une fois dans les écuries, le cavalier relève le capuchon de sa cape, révèlant ainsi son visage - celui d'une jeune femme autrefois magnifique et désormais atrocement mutilée (Stephanie Jones). Elle murmure quelques mots à sa monture et glisse par-delà une des portes secrètes de la demeure... Ce soir, elle n'assistera pas à La Saignée : la comtesse se baignera toute seule dans ce sang pur - elle, elle est fatiguée, lasse de ce que la folie de sa maîtresse lui a fait commettre.  

Puisse Dieu, un jour, les prendre en pitié. Tous.  

 

Hongrie, Comté de Durzco, la même année.  

 

Le Dominicain Thomas de la Tour (Nathan Colloff) faisait les cent pas dans l'antichambre de la grande maison médiévale du Comte Sienkiewicz. Il avait de bonnes raisons de penser que le Pape Grégoire XIII l'avait envoyé ici en représaille envers ses libertés de ton durant l'adoption du nouveau calendrier par le Vatican. 1582 : la première année du calendrier "Grégorien". Un pape qui nommait un calendrier de son nom et sur lequel l'année se devait de débuter un premier janvier - tout cela était fondamentalement stupide ! De la Tour s'en était moqué. Et le voilà qui faisait le pied de grue au coeur de l'Europe de l'Est, dans le froid et une certaine appréhension de ce qui l'attendait. Au moins l'Inquisition n'était-elle pas présente ici... vu que les seigneurs du coin étaient renommés comme beaucoup plus cruels.  

 

Quand un valet le fit enfin entrer dans le cabinet du Maître, il s'attendait à voir un châtelain bedonnant pressé qu'on lui offre l'absolution et un précepteur pour laver les pêchés de toute sa famille - il n'en fut que plus désarçonné qu'on lui présente le Comte Volgan Thùrniej Sienkiewicz de Durzco (Bradley Erotas) sous les traits d'un bel enfant pas tout-à-fait arrivé à l'âge d'homme. Il eût grand mal à cacher son trouble.  

Volgan n'avait pourtant pas l'air réjoui de voir cet homme d'église envoyé pour résoudre le secret de la disparition de sa soeur : il semblait pâtaud et bien peu représentatif des exploits qu'on lui avait contés. Thomas de la Tour, ancien inquisiteur aujourd'hui enquêteur auprès des plus hautes autorités religieuses : tel quel, ce gros homme ne paraissait pas différent des autres Romains, trop bien portant pour être honnête et pourri de vice jusqu'à l'os. Mais Volgan savait aussi qu'il ne pouvait demander qu'à un étranger d'enquêter sur cette si mystérieuse affaire.  

 

On expliqua à de la Tour que Maria Thùrniej Sienkiewicz, seule fille de la fratrie et pressée de trouver mari par feu-leur père parti à la guerre, avait choisi la voix du Christ. Elle avait noué avec la famille Báthory une relation épistolaire que Volgan voyait d'un mauvais oeil. S'il est vrai que la Comtesse Báthory, bien née et bien mariée, avait toute la reconnaissance de la cour de Vienne et qu'elle était considérée comme une femme remarquable - pieuse érudite parlant quatre langues - elle n'en avait pas moins dressé autour d'elle et sa famille une chape de secrets qu'il lui semblait malséant de vouloir approcher. Or, Vulgan n'avait pas su convaincre sa soeur d'éviter un voyage initiatique dans les Carpates. S'il n'y avait eu que lui à l'époque, elle aurait pris le couvent vite fait. Mais telle avait été la volonté de sa regrettée mère : Maria pouvait démarrer son apprentissage chez Báthory, personne n'y verrait d'inconvénient. Le problème est qu'elle n'en était jamais revenue. Et qu'en quatre mois, leurs parents étaient décédés, laissant à Volgan Thùrniej Sienkiewicz la charge pour laquelle il avait été élevé. La famille avait été éprouvée, il leur fallait une preuve du décès de Maria, Volgan ne pouvait se contenter d'une "disparition". Et Thomas de la Tour avait été dépêché dans ce but précis : retrouver un cadavre, lui offrir les saints-sacrements. Ou retrouver Maria vivante, et si elle était encore là-bas, il ne voulait plus perdre personne de sa famille.  

 

Thomas de la Tour avait entendu parler de la famille Báthory par des (francs-)maçons revenus de l'Est dans les années 70-75 - rien ne semblait avoir filtré : la fille avait été mariée à 15 ans au futur commandeur des troupes armées hongroises et la famille avait des ramifications profondes au sein des princes de Transylvanie... Mais il comprenait maintenant mieux la raison de sa présence ici : l'affaire était éminemment politique, impliquer les Báthory dans quoi que ce soit pouvait dégénérer violemment, et Volgan ne tenait probablement pas à retrouver sa tête désolidarisée de son corps trop rapidement... Il fallait procéder en douceur et ne pas faire de remous. En soi, un travail pour lequel il avait prouvé son efficacité - même si en général, c'était pour faire disparaître les gens, pas les retrouver.  

 

Une fois les aspects pratiques de la mission résolus, le jeune comte ajouta comme si de rien n'était :  

"- Au fait, je viens avec vous - vous ne connaissez pas le pays et ses gens : je serai votre guide. Vous n'aurez qu'à me considérer comme votre disciple."  

De la Tour se sentit rougir des bottes aux oreilles.  

 

(Script original partiellement inspiré d'événements ayant existé)  

* le Nécronomicon est une invention de H.P. Lovecraft : http://fr.wikipedia.org/wiki/Necronomicon  

** la Lament configuration est une invention de Clive Barker : http://en.wikipedia.org/wiki/Lemarchand's_box

Scénario : (3 commentaires)
une série B historique (Horreur) de Peter Bova

Nathan Colloff

Elaine McClean

Bradley Erotas

Stephanie Jones
Sorti le 26 octobre 2013 (Semaine 460)
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