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Studios Nanoyo présente
Trois sourires pour Lucie

/!\ Texte à contenu sensible /!\  

 

 

 

 

La tête inclinée vers le bas, le regard légèrement sur le côté, Lucie (Sharon Molchany) se tenait adossée au mur en brique rouge du Collège Saint-Antoine. Les cris des enfants et adolescents s'estompaient lentement dans la cour de récréation, de l'autre côté du mur. Quant à elle, elle se tenait le coude et jouait avec une mèche de cheveux blonds de son autre main aux côtés de madame Zarra (Nathalie Hubbard), l'éducatrice principale. Le regard dur de la femme de quarante ans s'aiguisait à la vue du jeune homme qui sortait de la twingo tricolore. Un véhicule dont l'apparence rafistolée semblait à l'image de l'entourage de la jeune Lucie. Le jeune homme (Hiromi Knight), la vingtaine sûrement, n'était pas à l'aise, pourtant son premier réflexe en s'approchant fut de demander à la jeune fille comment elle allait. Il n'eut que le silence pour réponse.  

 

- Monsieur Van de Graaf je suppose ? Siffla l'éducatrice.  

- Quentin Van de Graaf, oui. Qu'est-ce qui s'est passé ?  

- Je crains que nous devions expulser Lucie quelques jours.  

Tout en répondant, elle prit le jeune homme par le bras afin de l'éloigner de l'adolescente de 11 ans. Elle baissa le ton en commentant le caractère inacceptable, inapproprié, impropre et de nombreux autres mots commençant par la racine « in » qui signifiaient tous à quel point Lucie leur posait des problèmes.  

- Il arrive que nos élèves les plus âgés aient une approche de la sexualité, car c'est de leur âge, mais Lucie est une jeune fille de onze ans et nous ne pouvons accepter qu'elle soit émettrice d'idées trop... libérées.  

- Sexualité ? Qu'est-ce qu'elle a fait ?  

- Des élèves nous ont fait savoir qu'elle effectue des fellations dans les toilettes contre de l'argent. De la prostitution monsieur Van de Graaf, c'est grave.  

Le visage de Quentin se décomposa lentement, comment Lucie pouvait en venir à vendre son corps alors qu'elle est si jeune et douce. Il n'arrivait pas à le croire.  

- Ce n'est pas possible, Lucie nous communiquons très bien dans notre famille et elle n'est pas intéressée par ces choses-là.  

- Votre famille justement. Relança l'éducatrice en appuyant d'un ton cinglant. Lucie a perdu ses parents et vous vivez avec sa soeur sous le même toit. Notre psychologue suggère que l'entourage et les pratiques de celui-ci influencent certainement son comportement.  

Quentin marqua un temps de pause et fronça les sourcils.  

- Que sous-entendez-vous ?  

L'éducatrice raffermit sa poigne autour du bras du jeune homme.  

- J'estime qu'un couple n'est formé que de deux individus, pas trois.  

 

La phrase était tranchante, affreuse, inacceptable. Pourtant Quentin ne pouvait rien y faire. Quentin, Laura (Maude Lester) et Matthieu (Enzo Kenno) vivaient sous le même toit, dans le même lit. Leur relation polyamoureuse, malsaine aux yeux d'autrui, avait sauvé ces quatre jeunes d'une situation de misère. Isolé de leur famille respective pour diverses raisons, ils étaient parvenus à garantir l'éducation de Lucie. Hélas, les enfants parlent et cette situation est venue aux oreilles des enseignants.  

Quentin fit monter Lucie dans la voiture, toujours silencieuse, et lui demanda de parler. Elle restait muette, scrutant le vide extérieur. L'expérience polyamoureuse lui avait appris que le plus important se situait dans le dialogue, que c'est ce dialogue qui éduquait. Le jugement, la critique et l'opinion n'éduquaient pas, ils réprimaient. Il préféra donc se taire durant le trajet, réfléchissant à la manière d'aborder le sujet à ses deux conjoints. Le psychologue de l'école n'avait peut-être pas tort.  

 

- N'importe quoi ! Grogna Matthieu qui jeta le torchon de vaisselle sur la chaise dans un claquement vif. Leur maison minuscule ressemblait à un débarras dans lequel s'empilaient de nombreux souvenirs. Sur deux étages, il n'y avait que deux chambres à l'étage et un salon-cuisine au rez de chaussée. De quoi se marcher sur les pieds dans un espace aussi étroit, pourtant les choses se passaient généralement bien.  

- C'est le psychologue qui a dit ça ? S'inquiéta Laura en mordant sur son ongle.  

- Oui, elle est expulsée pour le reste de la semaine.  

- Mais qu'est-ce qui lui est passé par la tête... soupira la jeune femme.  

Le trio continua de discuter au rez-de-chaussée et s'alluma un joint pour détendre l'atmosphère et relâcher la tension. Lucie, renfermée sur elle-même, n'avait pas quitté sa chambre depuis que Quentin l'avait ramenée. Ils en vinrent à l'hypothèse terrifiante que cette relation polyamoureuse n'offrait pas un foyer stable pour l'enfant. Matthieu, plus résistant en apparence, fut pourtant le premier à craquer dans les bras de Quentin. Leur rencontre mutuelle semblait faire partie du destin. Les deux hommes vivaient ensemble depuis deux ans, reniés par leur famille à cause de leur homosexualité affichée. Pourtant, tout deux s'accordaient à dire que leur relation ne durerait pas, il manquait – étrangement – quelque chose de féminin. C'est dans la salle d'attente de l'assistante sociale que Laura est apparue, tenant la main d'une petite fille de huit ans qui se cachait derrière elle. Ils ont commencé à discuter, échanger, s'amuser et de fil en aiguille se sont vus tous les jours. Quentin et Matthieu jouaient aux grands frères responsables avec Lucie, et aux amants lubriques avec Laura. Plus d'un an de longues réflexions plus tard, ils décidèrent d'emménager. De nombreuses crises avait croisé leur chemin, mais pour la première fois Lucie se trouvait au centre.  

 

- Peut-être ont-ils raison, peut-être que l'un de nous doit partir... souffla Quentin  

- Mais je ne veux quitter aucun de vous deux, moi !  

- Et tu crois que j'en ai envie ? C'est pour Lucie !  

La remarque lança un froid et Laura susurra :  

- Si je dois choisir entre l'un de vous deux... Je préfère ne pas choisir et tout arrêter.  

L'un après l'autre, ils se passèrent le joint et tirèrent dessus sans plus un mot. Ils ne se touchaient plus, imaginaient leur vie séparés les uns des autres et cette situation leur rappela à quel point ils seraient seuls, sans famille, sans ami.  

La nuit n'apporta pas sommeil mais le murmure constant de leur discussion. Ils devaient tout remettre en question pour envisager un meilleur avenir pour leur fille. Minuit approchait et Lucie descendit lentement les marches. Elle regardait toujours vers le bas et s'assit sur une chaise, devant le trio qui s'était tû.  

- J'ai... J'ai besoin de votre aide.  

- Mais bien sûr Lucie, nous sommes là pour toi, tu peux tout nous dire ma chérie ! Répondirent ils en complétant chacun la phrase à tour de rôle.  

Elle venait enfin de délier sa langue et se confia. Elle expliqua qu'une semaine plus tôt, un garçon qui lui plaisait l'avait accompagné dans les toilettes. Dès cet instant, Laura avait dégluti en imaginant ce qu'il pouvait s'y produire. Ce garçon savait qu'il lui plaisait et demanda qu'elle fasse une fellation.  

- C'est normal, tout le monde fait ça qu'il disait. Mais moi j'avais pas envie.  

- Bravo Lucie. Souffla Matthieu, mais la fille secoua la tête, les larmes aux yeux. Elle n'avait pas fini de parler.  

- Mais je l'ai quand même fait, il me bloquait... !  

L'atmosphère devint glaciale. Elle leur expliqua que ce garçon avait joui dans sa bouche, avait rigolé, puis s'en était allé en la laissant seule dans les toilettes.  

- Quand je suis sortie de là, tout le monde me regardait bizarrement. Je n'ai rien voulu vous dire parce que je voulais pas que ça se sache... Mais ce matin des garçons en parlaient et ils m'ont accompagné aux toilettes. J'ai eu si peur... !  

Quentin posa sa main dans le dos de Lucie et le lui frotta de manière rassurante.  

- Tu n'es pas obligée de nous dire ce qu'il s'est passé, on va t'aider.  

Pourtant, la jeune fille continua entre quelques soubresauts de sanglots.  

- L'éducatrice est intervenue et... et les garçons ont dit que... que je demandais de l'argent pour ça. Pourquoi ils ont fait ça ?  

 

A cet instant précis, le trio réalisa que leur instinct avait toujours été bon. Ce dont Lucie a besoin n'est pas de parents normaux, mais d'un soutien présent. Leur relation particulière devait être l'élément le plus stable dans sa vie et ils mettraient tout en leur pouvoir pour lui rendre le sourire.

Scénario : (2 commentaires)
une série A sentimentale (Dramatique) de Gwendolyn Coates

Enzo Kanno

Maude Lester

Hiromi Knight

Sharon Molchany
Avec la participation exceptionnelle de Natalie Hubbard, Raoul Yusef
Musique par Kerrilyn Emerson
Sorti le 08 juin 2035 (Semaine 1588)
Entrées : 24 258 221
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