En interprétant le rôle de Maeva, dans Cherche JH pour abuser de lui, Cécilia Luxure est devenue dès sa première prestation l’une des actrices les plus sulfureuses et les plus controversées de Gerardmerveille. Au point que sa photographie sur sa fiche d’actrice n’est plus visible car elle a été censurée par l’un des producteurs de la ville. Malgré des désaccords sur les choix artistiques et cinématographiques de Luxure Production – de nombreux producteurs soupçonnent cette dernière de faire du « pornographique déguisé » -, de nombreuses individualités ont pris leurs responsabilités en s’opposant à cette censure.  

Le célèbre réalisateur Stanley Kubrock a décidé d’en savoir plus sur Cécilia Luxure et par delà sur la politique de Luxure Production. Cette dernière a répondu favorablement à la demande de Kubrock de réaliser un documentaire sur cette artiste avec l’aide de Howard Huang se chargeant d’interviewer cette femme en marge des conventions.  

Issue d’une famille de la haute bourgeoisie de notre ville, rien ne prédestinait Cécilia Luxure à devenir l’égérie du milieu underground de Gerardmerveille.  

Après des études d’arts, elle construit rapidement sa réputation avec sa thèse de psychologie consacrée à La construction de l’identité sexuelle par le fétichisme : au-delà des concepts de déviance, de perversion et de normalité. En passant à la mise en pratique de sa théorie, Cécilia s’est construit un personnage excentrique afin de choquer la bienséance et de susciter un débat sur la normalité et la domination.  

Devenant l’idéologue de la mouvance du Fetish-SM art, elle travaille avec le photographe Ruan Stuart sur la scénarisation du fétichisme en mêlant l’univers du latex et celui du SM afin de créer un décalage avec les photographies des mannequins anorexiques et faussement désirables de la presse people. L’objectif est de remettre en cause le modèle dominant de la femme soumise et de la restriction du désir sexuel dans le cadre de la domination masculine. Réfutant que le fétichisme soit une perversion ou une déviance, Cécilia Luxure démontre qu’elle est une réponse à la richesse et à l’étendue du désir féminin et une arme contre la normalité dictée par la société qui nie la réalité des expériences amoureuses.  

La caméra de Stanley Kubrock la suit dans le milieu underground de Gerardmerveille, dans les soirées latex excentriques, dans son travail de contre-mannequin, dans celui de la construction d’une exposition d’art contemporain sur le fétichisme mais également dans sa nouvelle carrière d’actrice.  

Pas étonnant que Luxure Production qui aborde dans ses films le thème de la sexualité et des désirs féminins (la recherche des expériences solitaires face à l’indifférence masculine dans Jouissances intimes ; les ravages de la soumission des femmes à la domination masculine dans L’Avaleuse et La taspé ; la solution radicale d’une domination féminine sur l’homme dans Cherche JH pour abuser de lui) collabore avec Cécilia Luxure.  

En exposant sa vie, son œuvre et son cul, Cécilia Luxure éclaire les projets de Luxure Production : une politique qui vise par des films chocs - souvent détournés de leur sens par une critique restant sur la condamnation de l’évocation des sexes autrement que par le genre du teen movie ou de la comédie faussement sentimentale – à débattre autrement du poids de la sexualité dans notre société en mettant à jour les mécanismes qui conduisent des individualités à remettre en cause les normes en la matière qui représentent une pensée unique et définissent un totalitarisme broyant les désirs.  

Par ce documentaire, Stanley Kubrock ne juge pas du bien fondée – ou non – de la démarche de Cécilia Luxure et de Luxure Production mais permet aux spectateurs de se faire leur propre opinion à leurs sujets en ne se laissant pas enfermer dans les préjugées construits et relayés par une certaine critique.