C'est toujours pareil, le même procédé, la même écriture ramassée, minuscule, sèche et condensée. Comme une certitude, la lettre est déposée à la Poste, dument affranchie.  

Dans la ville de Dijon, les réunions se tiennent depuis un mois mais cela fait trois ans que cela dure. Le maire (Jonathan Lee), un petit con prétentieux, fils de l'ancien maire, tient la séance. Ces réunions sont censées répondre à l'inquiétude des habitants et à en finir avec le harcèlement. Des personnes dont la réputation est entachée à jamais se lèvent dans la salle. Ce soir, c'est la première fois que la collecte de toutes les lettres est effectuée, elles sont mises en commun pour y voir plus clair. Elles seront transmises à la gendarmerie. Plus d'une centaine de personnes déposeront plainte contre X.  

Mais X. n'est pas si inconnue car tous savent dans la salle qui est l'instigatrice de toutes ces diffamations. Le Maire tient dans sa main gauche des dizaines de lettres A4 dont l'écriture est irrespirable où des mots soulignés, des majuscules, des ratures, des mots en italique insinue le mal en permanence. "Et maintenant elle s'attaque à la mairie !". Des soulèvements de protestation n'en finissent plus dans la salle.  

"Il faut faire interner cette psychiatre", dit l'une des personnes dans l'assistance.  

Il y a cinq ans, une psychiatre de Dijon (Marie Caine) perdait son mari et ses trois enfants dans un incendie. En proie à une paranoïaque, sans scrupule, elle tague les portes, écrit, accuse sans relâche le moindre faux pas des habitants de Dijon. Mais pour les gendarmes, elle reste introuvable depuis la première plainte déposée. En effet, une enquête fut ouverte, puis elle fut refermée "pour déficience mentale", et depuis il n'y a que la plainte contre X. qui soit recevable. Pourtant, elle semble bien en ville, sous les traits d'une femme quinquagénaire. Elle scrute, elle épie et, implacablement, elle poste comme un corbeau sa dénonciation.  

"Elle doit mal comprendre pourquoi le destin lui a enlevé sa famille et son foyer. Elle cherche des réponses et des coupables qui, eux, auraient du payer".  

Depuis la tragédie, chaque petit commerce, boucherie comme boulangerie, notables comme gendarmes évoquent la psychiatre et son délire. 1148 lettres ont été signées de sa main, avec toujours cette en-tête fatidique :  

"Madame Louzin-Mara /  

Psychiatre /  

Ancien interne des hôpitaux psychiatriques de Marseille"  

Le maire décide de prendre le taureau par les cornes, absolument de se faire passer pour un héro. A l'unanimité, il prendra demain matin la route pour Marseille à la recherche de celle qui persécute une ville toute entière. L'angoisse est montée d'un cran lorsque les gendarmes locaux ont refusé d'enregistrer la centaine de procès verbaux sous prétexte que cela était inutile. Ils ne lèveront pas le petit doigt pour cette chasse à la sorcière que seul le moyen-âge a connu !  

"Il ne vous manquerait plus que le bûcher pour vous combler !", s'exclame l'Adjudant Mazinger.  

Les plaignants, débordés par les évènements, sont chassés hors de la gendarmerie.  

Le maire tint sa parole d'aller à Marseille.  

Trois mois après, il revient faire part de son périple pendant une assemblée exceptionnelle du conseil municipal. Les habitants sont effarés... C'est pourquoi le Maire se rendra de son plein gré à la gendarmerie. Il sera convoqué à la Cour d'Assise pour homicide involontaire.