7h38, Station de métro d’Iéna, Paris 16ème  

Entendant le son annonçant le départ du métro, Marc bouscula dans la précipitation une vieille dame peureuse, ainsi qu’un Maghrébin d’une trentaine d’année en costard cravate. Le jeune homme n’aurait manqué pour rien au monde cette rame… Le garçon est un fier gaillard d’un mètre quatre-vingt-cinq, aux épaules carrés, aux cheveux châtains et aux yeux verts noisette, ou « vert automnal » comme il aime tant se le répéter. L’étudiant en polytechnique devait prendre chaque matin, depuis trois mois déjà, le métro pour se rendre à la station de Saint-Ambroise, à quelques pas de son Université. Originaire de province, il n’avait pas encore totalement pris l’habitude de l’empressement Parisien, de la foule permanente, d’un stress assez nouveau pour lui… Mais il se faisait peu à peu à cette nouvelle situation… Entré dans la navette, il scrute autour de lui, et constate avec un certain soulagement que sa place usuelle était libre aujourd’hui. Il s’assit, apaisé, relève les yeux et regarde la banquette à trois rangées devant lui. Le jeune homme sourit alors, souffla doucement avant de saisir son quotidien.  

Il était heureux car la banquette, située à trois rangées devant lui, était libre. Elle n’était pas encore là, et pourrait s’asseoir à cette place, « sa » place à elle aussi quelque part… Cette personne était une jeune demoiselle, ayant approximativement le même âge que lui, qui prenait la rame à la station de Saint-Augustin. Elle a les yeux marron, les cheveux assez longs, châtain sombre. Un visage doux, une bouche souriante, des lèvres roses, des traits harmonieux… Toujours plongée dans un livre lors de son voyage, un Dan Brown vraisemblablement, ces deux là se croisaient presque tous les jours. Marc la voyait entrer, mais il devait à chaque fois partir avant elle, à chaque fois écourter une entrevue qu’il voudrait tant faire durer. Dès que le regard de l’étudiant en polytechnique pouvait croiser celui de la jeune femme, un sourire gêné venait arborer leurs deux figures. Le jeune homme sentait son pouls s’accélérer, ses joues rosir, ses yeux se troubler… Etrange sensation, pouvant sembler presque désagréable, et pourtant… Pour rien au monde, il n’aurait manqué un tel rendez-vous. Lui se trouvait tout idiot à chaque fois, mais ne s’en lassait jamais. Elle, peut-être était-elle amusée, peut-être simplement distraite, ou alors…  

Bien entendu, Marc en avait parlé à ses amis. Ces derniers s’amusèrent tout d’abord de la situation, puis ils le motivèrent pour le forcer à aller vers elle, à engager un dialogue, ou bien à dire quelque chose, ne serait-ce qu’un simple mot, aussi con soit-il… Mais le jeune homme, têtu, n’écoutait que son fort intérieur. Il ne voulait surtout pas que de tels instants s’arrêtent par sa faute. Il ne voulait pas « tout gâcher » comme il le dit… Mais gâcher quoi ? De simples échanges de regards ? Lui-même avouait qu’il n’avait pas grand-chose à perdre, et pourtant, ce « pas grand-chose », il y tenait, et y tient encore…  

Le métro s’arrête une nouvelle fois, Saint-Augustin sera le prochain arrêt… Enfin se disait-il… A peine était-il là depuis quelques minutes qu’il s’impatientait de la voir, de rougir de son regard amusé. La rame exécute un ultime virage, et arrive enfin à la station tant attendue… Marc regarde les portes s’ouvrir, observe nerveusement la foule se hâter à sortir tout comme à entrer. Il attend crispé, lorsque l’annonce du départ retentit… « Pas déjà » se dit-il, mais les portes se ferment à l’instant, et l’engin reprend sa route. Il se lève, excité, anxieux. Il scrute tout autour de lui, mais ce qu’il craignait se confirma : elle n’était pas là… Peut-être était-elle arrivée en retard ? Il y avait peu de chance, car il devinait la demoiselle comme étant plus que ponctuelle… Absente tout simplement ? Sans nul doute oui… Déçu, il se rassit d’un coup, frustré d’un voyage qui allait devenir trop long à son goût.  

En de nombreuses occasions, en cours ou même dans ce fameux métro, il se plaisait à imaginer ce qu’elle aimait. Elle aimait lire, cela ne faisait pas l’ombre d’un soupçon… A la regarder toujours souriante, elle devait aimer rire, s’amuser… Elle devait sans nul doute avoir une vie tranquille d’étudiante rangée, un peu comme lui, pensait-il, ou espérait-il… Il se perdait une fois encore dans ses pensées, à tel point qu’il en lâcha son journal. Ses yeux se fermèrent, peu à peu, puis il sentit le sommeil s’emparer progressivement de lui.  

Le métro sonna brutalement, il s’arrêta. Marc leva les yeux, et constata qu’il était déjà arrivé à Saint-Ambroise. Il se leva lourdement, puis sortit de la rame, d’un pas vacillant. Sa journée commençait mal, il ne lui restait plus qu’à espérer qu’elle ne se poursuive pas de la sorte. Il regarda une dernière fois la rame s’en aller, se frotta les yeux, puis bailla avant de monter les escalier menant à l’extérieur. Apercevant une poubelle sur son passage, il y glissa son quotidien, puis prit le chemin de son université, comme chaque jour depuis trois mois… Secrètement, il espérait encore la croiser plus tard, en soirée, dans ce même métro…  

Après tout, sans doute n’avait-il pas vu qu’à la page sept de son journal, la rubrique « faits divers » rapportait le suicide d’une jeune fille, qui une fois sortie de la station de métro, s’est jetée du haut d’un pont…  

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Raphael Berger signe ici son nouveau film dramatique ou il met en scène la passion d'un homme pour une belle inconnue et un espoir qui ne sera jamais comblé.  

Avec Jonathan Buchanan, Virginia Lillard, Howard Maher et Cecilia Troughton.  

Durée du film : 1 heure 55 minutes