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Les Films du Corbeau présente
Contrôle

Film interdit en salle aux moins de 16 ans  

 

 

Bien gaulée, à l’évidence. Rigide. Perfectionniste. Sa jupe n’a pas un pli, elle moule son cul rehaussé par les talons aiguilles. Sûre d’elle, du moins en apparence. Faussement aguicheuse. Sans doute une façade. Ne se laisse pas approcher facilement.  

C’est ce que pensa Ali Nataf (Younes Guerram) lorsqu’il regarda Maude Winckler (Brume) pénétrer dans son loft.  

La jeune femme avança dans la pièce spacieuse dont les baies vitrées surplombaient Zurich. L’appartement était rempli d’œuvres d’art moderne, la plupart jouant sur des effets d’optique. Le salon design s’allongeait jusqu’à un studio photo où plusieurs projecteurs coûteux encadraient un espace de shooting noir. Maude inspecta d’un coup d’œil rapide les œuvres d’art et en reconnu plusieurs auteurs. Curieusement, Ali Nataf n’avait rien exposé de son travail. Les photos qui l’avaient rendu célèbre n’étaient pas au mur. Par contre, des books énormes remplissaient une bibliothèque entière. Sur la tranche des ouvrages, des noms, des sujets, des lieux.  

Ali Nataf n’avait jamais entendu parler de la galerie de Maude Winckler avant qu’elle le contacte. Un ami l’assura du sérieux de la jeune femme. Elle voulait connaître son travail, qu’il n’exposait que rarement. Il lui proposa un verre, qu’elle refusa. Visiblement, elle était là pour une chose et une seule. Aussi sortit-il quelques uns de ses books des rayonnages et les étala sur la grande table, devant elle. Elle compulsa les ouvrages, distraitement. Les photos étaient tirées en 3 par 4, noir et blanc, et montraient des vues urbaines, des morceaux de rues, des figures géométriques perdues dans les buildings… Maude s’y attarda peu.  

« Vous travaillez les corps, je crois ? Je n’expose que de l’humain. »  

Ali lui sortit alors un autre ouvrage. Dans celui-ci, des femmes s’exposaient nues, noir et blanc toujours, dans des figures artistiques. Ali Nataf ne photographiait jamais les visages. Maude s’y attarda davantage. Mais elle ne fit à nouveau aucun commentaire. Au contraire, elle plongea son regard dans celui de l’artiste.  

« On m’a parlé d’autre chose. De plus… radical. »  

Les yeux d’Ali se firent plus perçants.  

« De quoi parlez-vous ?  

- On m’a parlé de clichés plus transgressifs. Ceux-ci ne m’intéressent pas », dit-elle en refermant le book.  

Ali fit quelques pas dans le salon, silencieux. Il regardait Maude comme s’il la jaugeait. Il alluma tranquillement une cigarette. Maude détourna le regard pour le plonger sur les toits de Zurich. Alors, lentement, Ali ouvrit une autre armoire, où étaient rangés d’autres books. Sur ceux-ci, seuls des noms de femmes étaient inscrits sur la tranche. Il posa l’un d’entre eux, fermé, sur la table, puis il s’éloigna. Il s’assit sur le canapé et regarda Maude s’avancer, ouvrir l’ouvrage.  

Maude se crispa peu à peu à mesure qu’elle découvrait ces nouveaux clichés. Une femme y était exposée dans des positions provocantes et dures, soumise, tenue en laisse, courbée à s’en faire souffrir les hanches, recouverte de plastique comme un morceau de viande froide. Les photos ne cachaient rien de l’intimité de cette femme, si ce n’était son visage. Maude ne put masquer une expression de dégoût, qui fit sourire Ali.  

« Comment peut-on se laisser humilier de la sorte ? »  

Ali ne répondit pas. Il l’observait toujours silencieusement, fumant sa cigarette, un discret sourire sur les lèvres.  

Malgré sa gêne, Maude continua pourtant de tourner les pages du book, lentement, méthodiquement.  

« Vos modèles, ce sont des… Où les trouvez-vous ?  

- Vous alliez dire des putes ? », répondit Ali avec un soupçon de provocation. « Non, je ne prends jamais de professionnelles. Elles ont de la technique, ce que je ne veux pas. Je trouve mes modèles partout. Dans la rue, au supermarché, dans les petites annonces. »  

Maude regarda encore cette femme qui s’exposait à elle, engoncée dans un harnais comme un vulgaire canasson.  

« Comment faites-vous pour qu’elles acceptent tout cela ?  

- Je les paie bien.  

- Cela ne peut pas suffire à tout accepter. Une telle soumission…  

- Il est plus facile de se soumettre que vous le croyez. Ne plus rien décider. Se laisser faire. »  

Ali lisait le doute sur le visage de Maude. Et peut-être cette autre chose qu’il espérait. La curiosité. L’excitation déjà, peut-être.  

« Revenez demain si vous le souhaitez. J’ai une séance. »  

 

 

***** CONTRÔLE ******  

 

 

Ali avait tenu à ce que la jeune inconnue se présente à Maude. Elle était étudiante en comptabilité. Elle n’avait posé que deux ou trois fois pour un coiffeur, et un copain. Elle n’était pas particulièrement belle, mais elle avait de beaux cheveux roux et une peau blanche, laiteuse, légèrement potelée.  

Ali avait assis Maude juste à côté de l’objectif, sur un fauteuil qui faisait face au plateau de shooting. L’inconnue paraissait gauche et timide, mais elle n’avait pas rechigné quand Ali lui avait demandé, d’une voix froide, de se dévêtir. Elle avait d’abord gardé sa culotte. Dernier soupçon de refus. Mais le photographe l’avait poussée, d’une nuance de sa voix, à céder. Maude avait pensé que sa présence aurait davantage gênée la jeune fille. Mais au contraire, dans les moments de doute comme celui-ci, c’était Maude qu’elle regardait. Comme si elle trouvait une caution à ce qu’on lui demandait dans le regard de cette autre femme.  

Et alors les poses avaient commencé. La voix d’Ali était sans altération, sans compromis. Implacable et pourtant, respectueuse. Et la jeune femme acceptait tout. Se courbait, se pliait, se répandait sur le sol aux pieds d’Ali. Il noua ses mains derrière le dos et ficelait son corps comme un rôti pour lui faire prendre des postures douloureuses. Il resserrait encore les liens, et l’inconnue ne disait rien.  

Par moment, Ali jetait un regard sur Maude. Sa poitrine gonflait sous son chemisier en satin à mesure que sa respiration se faisait plus dense. Ses mains se crispaient sur ses cuisses. Elle ne détournait pas le regard de cette jeune femme. Elle était happée, électrisée.  

Il s’adressa à son modèle.  

« Maintenant, regardez Maude. »  

Cette dernière sursauta. La jeune inconnue poursuivait ses poses humiliantes en plongeant maintenant son regard dans le sien. Un regard parfois crispé par la douleur, mais reflétant toujours un abandon certain.  

« Approchez-vous d’elle. »  

Maude se crispa sur son fauteuil quand l’inconnue rampa vers elle.  

« Léchez sa chaussure. »  

Le visage s’approchait de son pied. Maude se redressa brusquement.  

« Je… Je suis en retard. »  

Elle sortit en fronde de l’appartement.  

 

 

Son téléphone vibra. Un message. C’était lui.  

« Une autre séance aujourd’hui. 21h. »  

Un pervers. Il était fou s’il pensait qu’elle se prêterait à nouveau à cette infamie. Elle n’irait pas. Sûrement pas.  

Pourtant, à 21h, elle sonnait à sa porte. Il lui ouvrit, toujours muni de son sourire calme. Elle le fixait de ses grands yeux, presque apeurés. S’il avait rit, s’était moqué d’elle, elle se serait enfuie. Mais il ne dit rien.  

Elle entra dans le salon et vit que le plateau était éclairé. Il attendait son modèle.  

Le téléphone sonna. Il s’excusa pour aller répondre dans une autre pièce.  

Pendant ce temps, elle s’avança vers la fameuse armoire. L’ouvrit. Lit les différents noms qui s’alignaient devant elle. Suzanna. Petra. Angélique. Elle prit celui où était écrit Claire et l’ouvrit. Une jeune femme brune. Ses poses allaient encore plus loin. Le modèle caressait son corps nu avec une lame. Elle se blessait les jambes. Posait avec des rigoles de sang qui dégoulinait sur ses cuisses. Les doigts de Maude tremblaient et elle dut les crisper pour ne pas laisser tomber le book. Elle le rangea juste avant qu’Ali ne la surprenne.  

« Elle a eu un contretemps. Nous repoussons la séance à demain soir. »  

Maude ramassa son sac à main et se dirigea vers lui. Il ne disait rien, il la regardait. Il semblait attendre un mot de sa part. Maude tourna le regard vers les projecteurs. Avait-il vraiment fixé rendez-vous à un modèle ? Elle reposa son sac à main.  

Son cœur battait la chamade. Elle se positionna, debout, sur le plateau de shooting. Elle s’adossa au mur et déboutonna son chemisier, dévoilant sa poitrine. Puis elle releva les bras et croisa les mains au-dessus de sa tête, comme si on les lui avait liées. Sans un mot, Ali s’installa derrière son appareil.  

« Regarde ailleurs », lui ordonna-t-il.  

Elle tourna la tête et découvrit son reflet dans un miroir. Elle se regarda, et attendit ses consignes.  

 

 

Elle était revenue plusieurs fois. A chaque séance, ils n’échangeaient pas un mot en dehors des ordres qu’Ali lui jetait au visage. Maude allait, lentement, de plus en plus loin. Ce jour-là, elle saisit un coupe-papier qui était posé sur la table basse et s’entailla la paume de la main. Puis elle se frictionna les épaules, répandant une fine couche de sang sur sa peau blanche.  

Ali était proche de la transe et mitraillait la jeune femme à l’aide de son appareil. Il n’avait pas eu besoin de lui demander. Pour la première fois, un de ses sujets prenait des initiatives, devinait ses désirs avant qu’il ne se les formule à lui-même. Cette femme était le modèle qu’il attendait.  

 

 

Le lendemain, il tournait en rond dans son loft, attendant l’heure de la séance. Il était excité, impatient. Sa tête fourmillait d’idées. Et il savait que Maude les devancerait et en trouverait d’autres encore. Il n’était même plus sûr lui-même de savoir jusqu’où ils iraient.  

L’heure arriva, mais la porte resta silencieuse. A la place, ce fut son téléphone qui vibra. Un message, deux mots.  

« Pas aujourd’hui. »  

Alors il enragea. Il fit voler tout ce qui se trouvait sur sa table. Jeta un coup de pied dans un de ses projecteurs qui s’explosa sur le parquet. Il était dans un état de fureur et de frustration étincelants.  

 

De l’autre côté de la ville, Maude rangea son téléphone dans son sac à main et baissa le regard sur la tombe fleurie qui s’allongeait à ses pieds. Sur la dalle de marbre était gravé le nom de Claire Winckler. Sa sœur. Qu’on avait détruite. Et dont le suicide serait bientôt vengé, même si elle ignorait encore à quel prix.  

 

 

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Un film de Gary STRÖMER  

Sur un scénario du Corbeau, librement inspiré du film La Prisonnière d’Henri-Georges Clouzot  

 

Avec  

BRUME - Maude Winckler  

Younes GUERRAM - Ali Nataf  

 

Sur une musique de Gaia LAWS  

Scénario : (2 commentaires)
une série Z thriller de Gary Strömer

Younes Guerram

Brume
Musique par Gaia Laws
Sorti le 18 novembre 2039 (Semaine 1820)
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