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Les Films du Corbeau présente
Le Goût du venin

Carthage, Mississippi – 1943  

 

Le soleil disparaissait derrière la cime des arbres, nacrant le ciel de ses lumières roses et dorées. L’obscurité commençait à s’étendre dans les jardins et les néons de la rue n’allaient pas tarder à s’allumer. Une jeune femme (Linda Marshall) sortit sur le perron avec son bébé dans les bras. Depuis le porche en bois, elle fouilla la rue du regard. Elle s’avança dans le jardin et s’enfonça en direction du grand chêne centenaire. Un détail attirait son regard. A ce moment, l’enfant émit un gargarisme et elle se servit de son lange pour nettoyer la gorgée de lait caillé qui s’était répandue autour de ses lèvres. Sa tête cogna dans quelque chose. Elle leva la tête et, dans la pénombre grandissante, ne comprit pas de quoi il s’agissait. Quelque chose qui n’avait rien à faire là. Elle recula de quelques pas. C’était une paire de baskets. Qui se prolongeait en un jean élimé. Le corps d’un homme était pendu à une branche du chêne, au-dessus du vide. Elle resta figée un instant. Puis ses jambes se dérobèrent et elle s’écroula sur le sol. L’enfant chuta dans les herbes épaisses.  

 

 

************* LE GOÛT DU VENIN *************  

 

 

Carthage, Mississippi – 1954  

 

Mason (Gregory Rencoin) ouvrit le frigidaire et fouilla dans les placards. Rien, à part des crackers. Mais la boîte devait être ouverte depuis longtemps, car les biscuits s’effritaient dans ses doigts. Il claqua la porte du placard d’énervement et s’accouda au comptoir de la cuisine. Par la fenêtre entrouverte, il voyait les petits enfants de la vieille voisine courir en culotte dans le jardin. Ils s’arrosaient avec des jouets en forme de carabine sous le soleil de plomb.  

Amanda (Linda Marshall) entra dans la cuisine en trainant ses pantoufles sur le sol. Elle portait encore la marque de l’oreiller sur la joue et son vieux peignoir rapiécé. Il était pourtant près de 15 heures. Mason lui renvoya un regard noir.  

- Ca ne va pas, mon chéri ?  

- J’ai faim.  

Elle ouvrit le congélateur et en sortit un pot de crème glacée à la menthe.  

- Tiens, chéri.  

- J’aime pas la menthe. Je te l’ai dit cent fois.  

- Tu n’en veux pas ?  

- Je veux un vrai repas ! Avec une entrée, un plat et un dessert !  

Amanda soupira de lassitude. Elle posa sur lui un regard lourd, triste.  

- Tu me détestes ?  

- Arrête, maman.  

- Pardonne-moi mon chéri. Je suis une si mauvaise mère.  

- Arrête ! J’ai pas dit ça !  

Il se leva et sortit dans le jardin. Il en avait marre. Maintenant, elle allait encore broyer du noir et partira se recoucher jusqu’au soir. La même rengaine, toujours. Il n’avait jamais connu sa mère autrement. Il avait entendu sa grand-mère dire qu’avant la mort de Jackson, elle était si différente. Qu’elle n’arrivait pas à remonter la pente. Il y avait 11 ans. Elle ne changerait probablement jamais.  

 

 

Il avait grimpé l’arbre et se tenait assis sur la branche. A l’endroit où son père avait été retrouvé. 11 ans… Pourtant, si sa mère n’était pas partie se recoucher et qu’elle le trouvait assis là, elle en ferait encore toute une histoire. La marque de la corde avait disparu depuis des années, mais il se souvenait où elle était et promenait ses doigts sur son ancien emplacement. Il ne s’était pas pendu seul. Mais la police n’avait jamais trouvé qui l’avait tué. On avait interrogé tous les hommes de la ville, recherché tous les vagabonds du comté qui avaient pu passer par Carthage ce jour-là. Mais rien. Jackson Sullivan n’avait aucun ennemi, aucun problème. Un meurtre totalement incompréhensible. Et Mason avait grandi à l’ombre d’un père absent et pourtant omniprésent.  

- Elle va péter un boulon si elle te trouve là.  

Mason baissa le regard. Anny (Beverly Gilstrap) se tenait au pied de l’arbre, la tête levée vers lui. Sa frange lui cachait les yeux, et elle mâchonnait un chewing-gum aussi bruyamment qu’un camionneur. Ses genoux étaient rugueux et souillés de terre. Où était-elle encore allée trainer ?  

Mason descendit de son arbre et la rejoignit. Anny habitait quelques maisons plus loin. Elle était son meilleur « copain » dans le quartier. Pendant les vacances, ils étaient toujours fourrés ensemble. Anny n’aimait pas trainer avec les filles. Elle préférait de loin chasser les ratons-laveurs et jouer au base-ball avec Mason plutôt que de côtoyer ses semblables et de parler des garçons. Elle n’en comprenait vraiment pas l’intérêt. D’ailleurs, si elle n’avait pas sa coupe au bol, elle passerait vraiment pour un garçon. C’était aussi pour ça que Mason l’aimait bien. Elle avait un an de moins que lui, mais elle était plus téméraire que les garçons de sa classe. Elle fonçait bille en tête, qu’importent les idées que pouvait lancer Mason. Même lui avait parfois un peu peur de la suivre dans les escalades improvisées, les explorations mystérieuses ou les expéditions qui pouvaient leur venir en tête. Mais il se mordait les lèvres plutôt que de l’admettre.  

- T’es occupé ?, lui demanda-t-elle.  

- Tu vois bien que non.  

- Alors viens te baigner.  

 

 

Ils laissèrent leurs vélos dans la broussaille et foncèrent au bord de la Pearl River. A quelques mètres d’eux, des garçons noirs étaient déjà à l’eau et riaient en s’aspergeant. De l’autre côté de la rive, une vieille femme noire gardait un œil sur eux en tenant une ligne au bout d’un bâton. Le quartier noir était derrière la butte, et rares étaient les enfants blancs à venir se baigner dans cette partie où la rivière s’amincissait et où des cavités d’eau stagnante se formaient dans les renfoncements de roseaux. Mais Mason et Anny appréciaient l’endroit justement parce qu’ils n’y croisaient personne de leur connaissance. Les amis de Mason n’aimaient pas trop Anny, car elle avait trop souvent tendance à avoir le dessus quand elle s’énervait de leurs moqueries. Et Anny n’avait pas beaucoup d’amis en dehors de Mason.  

Ils se déshabillèrent et plongèrent. Depuis quelques temps, Anny gardait son T-shirt pour se baigner. Mason ne comprenait pas bien pourquoi.  

- Pour les coups de soleil, lui avait-elle répondu.  

Mais elle avait déjà la peau tannée par le soleil… Après tout, il s’en fichait.  

Comme à leur habitude, Mason s’enfonça dans l’eau et se tint immobile. Leur jeu préféré était à celui qui tiendrait le plus longtemps sans respirer. Mais Anny était là aussi presque imbattable. Il retint son souffle jusqu’à ce que ses poumons le fassent souffrir. Il tenta d’ouvrir les yeux et vit dans l’eau trouble qu’Anny n’était plus près de lui. Alors il sortit la tête de l’eau, sûr de sa victoire. C’est à ce moment qu’il entendit les cris. Les enfants noirs sortaient de l’eau en courant. Il vit la vieille femme s’éloigner de la rive en cachant sa tête dans les mains. Qu’est-ce qui leur prenait ? Il aperçut enfin Anny qui était sortie de l’eau et l’appelait en battant l’air de ses bras. Elle criait quelque chose, mais il avait de l’eau dans les oreilles.  

- Hein ?  

C’est alors qu’il perçut la déflagration et le ricochet de l’eau au milieu de la rivière, à quelques mètres de lui. Il tourna la tête vers le Johnson Bridge, à une vingtaine de mètres en amont. Deux hommes blancs s’y tenaient, une carabine dans les mains. Ils visaient dans leur direction. On leur tirait dessus ! Mason sortit de l’eau aussi vite qu’il put alors qu’une deuxième balle fila dans les airs. Il entendit l’impact sur l’eau, qui lui sembla loin de lui. Il rejoignit Anny, qui s’était terrée derrière une butte de pierres avec les autres enfants. Ils entendirent de nouveaux tirs.  

- Mais c’est qui ces types ? Qu’est-ce qu’on leur a fait ?  

C’est un des garçons qui lui répondit.  

- Y a un des deux qui habite dans la ferme pas loin. Ils viennent là, de temps en temps, pour pêcher.  

Anny se tourna vers lui, ulcérée.  

- Tu veux dire que là, ils sont en train de pêcher ?  

Le garçon haussa les épaules.  

- Oui, c’est ça leur façon de pêcher. Mais je crois pas qu’ils attrapent beaucoup de poissons.  

- Mais ils sont fous furieux ! Il faut le dire à la police !  

- Oh, on ne veut pas d’ennuis.  

- … Parce que là, vous n’avez pas d’enn…  

Mason lui frappa l’épaule.  

- Laisse tomber, tu veux ?  

Il se redressa légèrement et passa la tête au-delà de la butte. Les deux hommes avaient terminé, ils s’éloignaient de la balustrade. Il les voyait mieux. L’un d’eux portait un chapeau blanc, mais Mason ne l’avait jamais vu. L’autre, par contre, ne lui était pas inconnu. Un visage croisé de temps à autres dans les rues de Carthage. Mais il ne connaissait pas son nom.  

 

 

Mason et Anny marchaient sur le trottoir, tenant leurs vélos à la main. Anny ne desserrait pas les dents et fixait le pavé. Il savait exactement ce qu’elle ressentait. Elle était tiraillée entre l’excitation de l’aventure qu’ils venaient de vivre (elle adorait les aventures extraordinaires) et la répulsion de ce à quoi elle venait d’assister. Mason ne voulait pas retourner sur ce sujet. Le quartier noir était un territoire où la police n’avait pas envie de se mouiller les pattes. Il le savait, elle le savait, tout Carthage le savait. C’était comme ça.  

- J’ai déjà vu un de ces types. Mais je sais plus où. Celui avec la ceinture dorée. Ca m’énerve, j’arrive pas à le remettre.  

Anny s’arrêta.  

- Tu sais vraiment pas qui c’est ?  

- Non.  

Elle le regardait fixement. Mason s’impatienta.  

- Ben vas-y, dis-moi !  

- C’était Caleb Jones.  

- Caleb qui ?  

- Tu sais VRAIMENT pas qui c’est ?  

- Tu m’énerves !  

Pourquoi hésitait-elle à lui expliquer ?  

- Ben c’est lui qui a fait de la taule pour…  

- Pour quoi ?  

- Ben pour le meurtre de… ton père !  

Mason s’arrêta de respirer. De quoi parlait-elle ? Où avait-elle vu que quelqu’un avait été en prison pour le meurtre de son père ? Personne n’avait été inculpé.  

- Tu racontes n’importe quoi.  

- Ils l’ont gardé qu’un jour ou deux. Mais il a été le principal suspect, parce qu’il avait vu ton père dans l’après-midi. Tu ne savais vraiment pas ?  

- Non.  

Ce qui ne l’étonnait qu’à moitié. On ne lui avait jamais vraiment raconté les événements. Le sujet était tabou à la maison, Amanda refusait catégoriquement d’en parler. Mais elle parlait sans arrêt de Jackson.  

- C’est un débile mental. Il a fait de la prison après, encore. Pour des vols, des bagarres, des trucs comme ça. Si tu veux mon avis, j’ai jamais compris pourquoi ils l’avaient relâché. Sûre que c’était lui. Mon père a même dit à ma mère qu’il l’avait entendu se vanter au Kikaboo’s, un soir, qu’il l’avait tué.  

 

*  

 

La nuit était tombée et Mason était avachi sur la balancelle du porche. Il regardait les moustiques et papillons de nuit se battre autour de l’ampoule. Amanda le rejoignit. Elle portait toujours son vieux peignoir.  

- Ca va ouistiti ?  

Mason dodelina de la tête.  

- Tu as mangé ?  

- Des crackers.  

Elle s’assit à côté de lui et s’alluma une cigarette. Mason hésita un instant, puis se lança.  

- Pourquoi tu ne m’as jamais parlé de Caleb Jones ?  

La fumée de la cigarette se bloqua un instant dans la gorge de sa mère. Sans le regarder, elle lui répondit.  

- Pourquoi t’aurais-je parlé de Caleb Jones ?  

- On m’a dit qu’il avait fait de la taule à cause de papa. Qu’il le connaissait.  

- Qui t’as dit ça ?  

Il se redressa et se tourna vers elle.  

- C’est vrai ?  

- Caleb Jones était un jeune que ton père s’était mis en tête d’aider. Mais c’était un pauvre type. Même s’il avait voulu le faire, il n’en aurait probablement jamais été capable.  

- Et si tu te trompais ?  

- Arrête de ressasser tout ça, tu veux ? C’est douloureux et ça sert à rien.  

Il se rassit et tous deux fixèrent la nuit en silence.  

 

*  

 

Anny arrêta son vélo brusquement, à l’angle de la rue, et Mason failli la percuter.  

- Qu’est-ce que tu fous ?  

- Regarde.  

Elle attira son attention sur le carrefour. Un bar à la façade sombre et mal lavée. Le « Kikaboo’s Café ».  

- Et alors ?  

- Tu veux pas rentrer voir ? Il y est tout le temps, à ce qu’y parait.  

- T’es folle ou quoi ?  

Mason s’apprêta à redémarrer, mais Anny restait immobile.  

- Mason, dans ce bar, y a peut-être le type qui a tué ton père. Peut-être qu’il continue à s’en vanter en plus. Tu ne veux pas le voir de plus près ?  

Elle avait son regard qui l’énervait tant. Celui qui le mettait au défi. Celui qui lui disait que s’il se dégonflait, elle le descendrait bien bas dans son estime.  

- T’es vraiment une déglinguée.  

Mais il posa son vélo et traversa la rue avec de grands pas… Qui se rétrécirent alors qu’il s’approchait de l’entrée. Il pencha la tête par l’ouverture. Un ou deux types étaient assis au comptoir. Deux autres disputaient une partie de billard dans le fond, mais il ne distinguait pas leur visage. Près du juke-box qui criait une chanson folk quelconque, il aperçut une pile de bandes dessinées à vendre, disposées sur un étendoir. Il entra et s’empressa de jeter le nez dans la pile poussiéreuse. Le barman, un gros barbu, lui envoya un regard rapide et mauvais. Mason fit semblant de concentrer son attention sur les revues et dirigea son regard vers la table de billard. Il reconnut la boucle de son ceinturon. Caleb Jones (Ken Barby) sirotait une bière en regardant d’un air sombre son adversaire rentrer la dernière de ses boules dans un trou. Celui-ci se redressa en ricanant.  

- Aboule le fric, Jones.  

Caleb resta impassable.  

- On la refait.  

- J’voudrais bien voir ça ! Aboule, j’te dis.  

D’un geste rapide, Caleb lui fracassa sa bouteille de bière sur la tempe. L’homme s’écroula à terre, sonné. Les buveurs du comptoir se retournèrent. Le patron esquissa un mouvement depuis le comptoir. Caleb se retourna vers eux, menaçant, le goulot de sa bouteille brisée entre les mains.  

- C’était pas net ! J’aime pas qu’on se foute de ma gueule.  

Alors que l’homme à terre se redressait, une rigole de sang filtrant de sa main posée le long de sa joue, Caleb se pencha pour ramasser la canne posée au sol. Il la lui tendit.  

- On la refais, j’ai dit. Si tu veux voir ton fric, refais-moi ça. Mais cette fois, je t’ai à l’œil.  

L’homme hésita, puis saisi à contrecœur la canne qu’il lui tendait.  

Mason était éberlué devant la violence et la rapidité de la scène, au point de fixer les deux hommes sans discrétion, la bouche ouverte. Quand Caleb tourna le regard vers lui, il se ressaisit et se précipita vers la sortie. Mais Caleb le retint par l’épaule.  

- Qu’est-ce que tu fous là, toi ?  

Mason était transi de peur. Sans un mot, il pointa les bandes dessinées du doigt. Caleb plongeait son regard dans le sien.  

- J’te connais ?  

Mason ne répondit pas.  

- Si, j’te connais. Je sais plus d’où, mais j’te connais.  

Il relâcha son étreinte et le laissa partir. Mason fila.  

Il retrouva Anny qui l’attendait avec les vélos. A son visage étonné, il devina qu’il devait avoir une drôle de tête. Sans un mot, il saisit son vélo et l’enfourna.  

- C’est un malade mental. Il peut tuer, comme ça, en claquant des doigts. C’est le meurtrier de mon père, j’en suis certain.  

Il démarra. Anny le rattrapa. Elle ne cessait de le regarder en silence. Mason sentait son regard, mais il ne voulait pas le croiser. Il sentait une flamme lui brûler les intestins.  

- Il faut qu’on fasse quelque chose. Les flics ne feront rien, c’est à nous de le faire.  

 

*  

 

Avant de rentrer dans son mobil home, Caleb s’arrêta devant celui d’à côté. Il ouvrit la porte et posa le regard sur le sol. Des cannettes de bière, des boites de plastique vide, du liquide jaunâtre qui se répandait sur le linoléum… C’était dégueulasse. Il en avait ras-le-bol. Une voix féminine, éraillée, enivrée, s’éleva du fond de la caravane.  

- Caleb, c’est toi ?  

- Non. Démerde-toi.  

Et il referma la porte d’un coup sec. Non, ce soir, il n’avait pas envie de s’occuper de son ivrogne de mère. Il rejoignit son mobil home. Il était plus propre, malgré l’évier débordant de vaisselle sale et la fine couche de poussière sur les journaux en vrac. Il sortit une cannette de bière d’une vieille glacière et alla s’asseoir sur un fauteuil posé devant sa caravane. Il allongea les jambes et regarda le soleil disparaître derrière la colline.  

Il pensa à Jackson Sullivan. Pourquoi repensa-t-il à lui ? Cela faisait des lustres qu’il n’y avait pas songé. Le garçon. C’était le fils de Sullivan. Ca y est, il le remettait.  

Il pensa à Jackson Sullivan. Et il eut mal au ventre.  

 

*  

 

- Aaah !  

- Fais gaffe, lève la patte !  

- Tiens-le mieux !  

Le mocassin d’eau sifflait la gueule ouverte. Il avait manqué de planter ses crocs dans la cheville d’Anny à quelques centimètres près. Mason enfonça le râteau de toutes ses forces dans la terre pour lui bloquer la tête entre ses dents de fer.  

- Fais gaffe, tu vas lui couper la tête !  

- La boîte ! Magne, bordel. Il va s’échapper.  

Au lieu de ramasser la boîte en fer qui gisait sur le sol, Anny se pencha et attrapa la tête du serpent noir entre ses doigts.  

- Enlève !  

Mason hésita et retira le râteau du sol. Anny souleva le serpent qui s’entortilla furieusement contre son avant-bras. Elle sourit de toutes ses dents, les yeux écarquillés. Mason leva les yeux au ciel.  

- Ok, tu pourras dire que t’as choppé un mocassin venimeux…  

Elle rit de fierté et enfourna la bestiole dans la boîte en fer. Ils s’assirent sur l’herbe pour reprendre leur respiration. Anny serrait la boîte contre elle. Elle sentait le serpent frapper les parois avec sa queue.  

- Il nous en faut combien ?  

- Je sais pas. Une dizaine.  

Elle le regarda, épuisée.  

- T’es sûr ? On pourrait plutôt monter un plan, lui faire avouer et le balancer aux flics. Ce serait plus…  

- Non. Je veux le voir mort.  

 

*  

 

Le soleil tapait vraiment fort. Caleb se redressa et releva son casque. Il étouffait. Et les vapeurs de goudron qu’il répandait sur la route lui donnaient la nausée. Il regarda autour de lui. Les autres hommes du chantier paraissaient peiner comme lui. Où était le négro chargé de leur apporter de l’eau ? Une putain de feignasse, celui-là aussi.  

Son regard fut attiré par deux silhouettes de l’autre côté de la route, à l’ombre d’un arbre. Deux gamins à vélo. Le fils Sullivan. Et une fille. Quand ils se rendirent compte qu’il les regardait, ils s’enfuirent. Cela faisait la troisième fois qu’il les repérait dans les parages depuis deux jours. Qu’est-ce qu’ils lui voulaient, ces petits cons ?  

Il se remit à sa besogne. Jackson Sullivan. Il y repensait sans cesse ces jours-ci. Sans doute à cause de ce putain de gosse qu’il voyait partout. Il était encore jeune quand il avait connu Jackson. Le premier mec qui ne l’avait pas pris pour un demeuré. Il l’avait aidé. Il lui avait dit qu’il pourrait faire quelque chose de sa vie. Lui avait trouvé deux-trois petits boulots. Un après-midi, il était passé le voir chez lui. Et il ne l’avait pas chassé. Ils avaient bu deux-trois bières. Un chic type. Et le lendemain, il avait appris qu’on l’avait tué. Ca lui avait fait un mal de chien. Plus mal que quand son propre paternel s’était foutu en l’air. Et il avait pété les plombs. Barré en couille. Les flics l’avaient rendu furibard.  

Un soir de picole, il parait qu’il s’était même vanté d’avoir fait la peau à Jackson. Il ne se souvenait même plus avoir dit ça. Il pouvait devenir sacrément con, quand il avait bu. Buter Jackson… N’importe quoi. Plutôt faire la peau à l’enfoiré qui avait tué le seul type bien de cette putain de ville…  

 

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Un film de Leonard BRUMEL  

Sur un scénario du Corbeau, librement adapté du roman Le Petit copain de Donna Tartt  

 

Avec  

Gregory RENCOIN - Mason Sullivan  

Beverly GILSTRAP - Anny  

Ken BARBY - Caleb Jones  

Linda MARSHALL - Amanda Sullivan  

 

Sur une musique de Hiromi HANSON  

Scénario : (3 commentaires)
une série B dramatique de Leonard Brumel

Gregory Rencoin

Beverly Gilstrap

Ken Barby

Linda Marshall
Musique par Hiromi Hanson
Sorti le 20 avril 2035 (Semaine 1581)
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