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Oz Films présente
Rôde la mort

Edgard A. était assis, derrière son imposant secrétaire acajou. C’était là, face à un mur tapissé de cadres aux illustrations biologiques, qu’Edgard trouvait son inspiration, et la couchait sur le papier. Les dessins de faune et de flore en tout genre, de squelettes et de systèmes internes, le fascinaient. Un simple coup d’œil entre deux paragraphes, et le suivant déroulait aussitôt dans son esprit.  

Mais aujourd’hui, il n’y avait aucun son. La scène était figée, comme une peinture. Le temps y était absent, arrêté. Il ne produisait plus aucun effet, il était impuissant.  

Si seulement…  

Edgard aurait été jusqu’à vendre son âme au diable pour rendre possible ce fantasque phénomène. Il aurait donné tout ce qu’il pouvait, jusqu’au dernier fragment de son être. Simplement pour que le temps cesse, et que la vie demeure ainsi éternelle. Roselyne en serait guérie. Guérie de la mort qui la guettait.  

 

Il se leva et alla se porter au chevet de sa bien-aimée. Les bougies éclairaient d’une lueur douce, un visage pâli par la maladie. Elle tourna lentement la tête et, voyant Edgard s’atteler à la préparation de quelque potion miraculeuse, elle parla de sa voix fébrile.  

_ C’est tellement adorable ce que tu fais pour moi. Tu ne devrais pas te donner tant de mal.  

_ Je suis précisément là pour me donner ce mal. C’est mon rôle, auprès de toi. Tu te souviens ?  

_ Je me souviens… d’un temps d’insouciance et de naïveté. Nous étions si jeunes.  

_ Et ensemble, toi et moi, nous le resterons pour l’éternité.  

Roselyne souriait, avec une grande faiblesse. Ses lèvres trahissaient toute la douleur qui bouillonnait en elle, mais elle se taisait. Elle souffrait en silence, et se forçait à sourire. Pour que son Edgard ne retienne que ça.  

_ Tu sais… tu devrais essayer de travailler. Tu te donnes trop de mal pour moi, et tu délaisse ta plume. Ta si savoureuse, petite plume…  

_ Elle ne me répond plus, hélas ! Elle et moi, c’est… Ce n’est plus ce que c’était.  

_ J’ai entendu ta conversation l’autre jour. Avec ces messieurs de Londres…  

_ Mes éditeurs, oui…  

_ Alors tu sais ce qu’il en est. Il faut que tu finisses ce qu’ils t’ont demandé, ce que tu leur a promis, Edgard.  

_ Et ce que je t’ai promis, à toi ?  

S’en suivit un silence pesant. Le sourire, masque permanant qui couvrait le visage de Roselyne, était maintenant figé, paralysé.  

_ La vérité, c’est que je ne pourrais plus trouver les mots, plus écrire la moindre satanée ligne, si je devais te voir partir sans avoir combattu.  

_ Tu as déjà combattu… Le combat, est terminé, tu le sais…  

 

« Oui… Je le sais  

Mais ai-je envie de l’entendre ? Non, certainement pas !  

Alors, Edgard A. persévérait. Il continuer à mener un combat perdu il y a des semaines. Il versa son remède, préparé conformément aux instructions trouvées dans un autre vieux grimoire, dans la bouche de Roselyne. Il lui prit le poignet, comme pour tâter son pouls. Il la regardait droit dans les yeux, avec le mince de voir cette lueur, au fond de son regard, reprendre vie. Mais une fois de plus, il n’en fut rien.  

Le même vide demeurait dans ce regard. Le même froid enveloppait les poignets. Le même masque souriant, paralysé.  

 

Edgard se leva, heurté par son nouvel échec. Il marcha jusqu’au secrétaire et tomba littéralement sur sa chaise de bois vernis. Il saisit sa plume, trempa la pointe dans l’encrier noir, et le bruit caractéristique de papier gratté rompit un silence de mort. Il avait fini par trouver une inspiration. Funestes, désagréables, mais néanmoins des mots et des phrases. C’était sa désolation qu’il écrivait, car il avait la sensation profonde qu’aucun Homme sur cette Terre n’avait jamais eu à éprouver tel chagrin, telle injustice, telle haine.  

Il ne perdait pas seulement Roselyne, son grand amour. Il perdait aussi tous les sentiments qu’elle véhiculait, des sentiments heureux. Ils étaient remplacés par un voile de ténèbres. Des émotions dures et tristes. Une violence de l’âme, qu’il s’infligeait en partie lui-même.  

Il invoquait toutes les forces qu’il pouvait, à travers le papier, l’encre et la plume. Des plus communément admises et bienséantes, jusqu’aux plus sombres et inavouables.  

Quand l’une d’elle répondit à ce cri du fond des tripes, un épais nuage de brume descendit sur le domaine de Edgard A., et le ciel au-dessus de lui se couvrait d’orage.  

Les ténèbres rôdaient.  

Scénario :
une série Z dramatique (Fantastique) de Adam Lester

David Hoenig

Joan Hodge
Musique par Wolfgang Blakstad
Sorti le 05 août 2028 (Semaine 1231)
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