Qu'ils sont durs ces réveils. Qu'ils sont horribles.  

Les yeux à peine ouverts qu'une profonde envie de vomir remonte du fond des tripes. Stan (Matthew Knifey) ne se demande même pas où il est. La seule question qu'il peut arriver à se poser vaguement est "qu'est ce que j'ai ?".  

Les premières secondes du réveil, on accuse une gastro carabinée. Au bout de quelques secondes, on se rappelle avoir picolé. Ho oui ! Vraiment beaucoup picolé... Et la dernière vision que l’on a de soi même, c’est d’avaler deux comprimés blancs avec un fond de vodka.  

J’ai mal à la nuque...  

Le père de famille (Vyacheslav Grinkoz) devant téléfoot, dimanche matin normal.  

Tout est flou.  

On ne sait pas si c’est à cause de l’appart de plus en plus vide que la voix de l’animateur résonne, ou si cette impression que notre cerveau plane à cinq mètres au dessus de la boite crânienne.  

Dans un bas de jogging bleu en coton, on cherche désespérément quelque chose de comestible dans des placards alimentaires tous plus déserts les uns que les autres. L’œil droit à moitié fermé, on se rend compte qu’on ouvre le même placard pour la cinquième fois consécutive. Une masse nous bouscule sur le côté. Dans ce qui ressemble à un sermon, le vieux parle en prenant des pointes à quatre-vingt décibels. Toujours en ponctuant par l’éternel«De toute façon, les tarlouzes c‘est comme les grognasses, ça peut pas picoler». Il ouvre le frigidaire pour récupérer une bière, seule denrée inépuisable de l’habitation. On perçoit le neuvième écho de ce qui ressemble à «prends au moins une bière, ça aide à redescendre...». Il a pas voulu être gentil, il prends juste son rôle de «j’te donne des leçons sur ce que les vrais mecs savent.»  

- Qui lui répond ? Toi ou moi ?  

- Vas-y Fox, ça fait dix-huit ans que je le supporte... dix-huit ans que j’en peut plus...  

Fox touche notre piercing sous la lèvre, à droite.  

«Je vais... très bien...» Le vieux retourne devant son émission de beauf. La pub se finit.  

- Facile...  

Vu de l'extérieur, on reste là. Debout, la bouche entrouverte, titubant et fixant d'un regard éteint la forme que prend le vieux devant son téléviseur.  

On sent quelque chose qui nous attrape le bras droit et qui nous entraîne ailleurs, sans savoir ni comprendre où. Puis ca s'arrête. Le bruit d'une porte qui se ferme. Il y a de la tapisserie rose. En fait c'était Julie (Carrie Frizzi). Elle est en train de nous parler. Elle est genre en train d'essayer de nous guérir encore. A nous mettre un gant de toilette mouillé et froid sur la nuque. Elle nous allonge sur son lit et nous couvre avec son drap. On ferme les yeux et la rotation de la planète s'accélère brutalement sans nous.  

Julie demande si tout va bien. Tout ne va pas parfaitement bien mais c'est sur la bonne voie. On va bien...  

"On va bien..."  

Julie plongea sa tête entre ses mains.  

Tu va pas recommencer Stan. Ce mec... ton petit copain, c'est dans ta tête tout ça.  

Effectivement, je me retourna dans le plumard de ma petite sœur pour découvrir que j'étais tout seul. Fox avait dû émerger plus tôt que moi. Et une fois de plus, ma sœur me traite ouvertement de taré.  

- Qu'est ce que tu as pris encore hier ?  

D'autres questions suivirent. Et malgré le cerveau qui tournait au ralenti, je l'entendait arriver avec le décrochage.  

Alors je lui promettrait que je décrocherait. Je resterai sur la vodka. Mais Fox ne viendra plus me voir aussi souvent.  

Alors elle viendra me faire chier pour tout arrêter et être clean.  

Alors j'essaierai.  

Un jour.  

Deux jours.  

Trois jours sans Fox.  

Alors je reprendrai.