Ça me gratte les fesses. Ça lui gratte les yeux.  

Ça vous gratte le nez. Ça leur gratte le pouce.  

Ça te gratte la jambe. Ça nous gratte les couilles.  

Nous disons : qui deviendra à son tour semblable à un de ces parasites ?  

Je marche dans la rue. Il fait noir dehors, et il y a la gendarmette du coin de la rue Donnissan qui hurle comme un phoque. C'est qu'il lui pousse des nageoires de phoque sur les hanches. Place de la Victoire, de grandes fourmis dansent devant des murs d'enceintes. Leurs antennes tremblent comme des feuilles et moi aussi parce que j'ai peur. Le tramway qui arrive à vive allure vient de déverser, dans cette zone d'improvisation animale, des masses de cyborgs avec de l'épiderme sur les pieds.  

Je dis : quand est-ce que je deviendrai un loup à trois têtes, muté en humain puis devenu cyborg ? C'est que moi aussi, je veux toucher cette communauté véritable. La gendarmette me répond : "C'est par le désir que tu atteindras, un jour, la fiction de la communauté véritable." Quoi, le désir ? T'as cru quoi ?  

Les réverbères explosent sans raison, il fait encore plus noir dehors. Les fourmis allument leurs antennes pour nous éclairer. Remercions les fourmis. J'ai à nouveau peur : Nous voyons tous cette femme-géante qui surplombe la ville au bout de l'avenue. La terre tremble et nous tremblons avec elle. La femme-géante est fatiguée, elle veut se coucher. T'as cru quoi ?  

Je dis : Parasites ! Venez avec moi ! Vite. Je vous emmène dans un Château fort aux murs épais.  

Mais personne ne m'entend... La femme-géante baille à grande bouche, s'étire les bras et se jette sur la ville. La femme-géante dit : "Que se passe t-il ici ? Pourquoi ce grand silence ? N'y a t-il personne ?" Quelle folle... T'as cru quoi ?  

La ville est devenue rouge. Le sang des fourmis peut-être, ou bien les cyborgs qui ont vu leur système griller.  

Je suis une femme (Jenny Hereman) dans le circuit intégré de la métropole, seule survivante des tremblements du paysage, réfugiée dans un château fort. Je referme la porte derrière moi, à triple tour et en mettant une armoire devant. Je cours d'un bout à l'autre du Château en criant comme une gîvrée, ça ne sert à rien, t'as cru quoi ? Je me dis : il faut que je prenne une douche, va savoir pourquoi. L'eau est brûlante, ça réveille mes méninges. Dans le miroir de ma salle de bain, j'efface la buée avec mon poignet, j'aperçois une antenne sortant de mon crâne. Et au bout de cette antenne, un garçon (Weston Stern).  

Le garçon dit : enchanté, je suis un cyborg.  

De ses petites mains, le minuscule cyborg s'extirpe de mon crâne. Aïe ! T'as cru quoi ? Il tombe par terre, a les fesses toutes endolories, je l'enroule dans ma serviette. Il me regarde avec des larmes sur les joues, je lui mets de la pommade. Quelqu'un frappe à la porte. T'as cru quoi ? Je demande qui c'est mais personne me répond alors je n'ouvre pas.  

Par la fenêtre, dehors où il fait noir, la femme-géante se retourne et se sert du tramway comme couverture. Le cyborg saute sur le balcon, il pleure à nouveau et se réfugie dans mes seins : "T'as cru quoi ?" me dit-il...  

Ça frappe encore à la porte, cette fois-ci je l'ouvre : une fourmi s'effondre sur le paillasson. Terrifiée, je le tire jusque dans le salon et lui fait du bouche-à-bouche. Elle se réveille et me dit : "Cours, le mari de la femme-géante arrive sa maîtresse, ça va barder !!".  

Avec le petit cyborg nous courrons, t'as cru quoi ?