Même si cette histoire est une fiction, pratiquement tous les détails qui l'entourent sont basés sur des faits réels.  

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Mais où est passé Kevin? Laissez un gamin de 6 ans sans surveillance pendant 2 minutes, et le voila qui disparaît. Ses parents ont comme un frisson dans le dos en s'apercevant qu'ils l'ont perdu de vue dans cette rue piétonne.  

Ah non, il est là-bas! En arrêt devant un vieux clochard qui joue de l'accordéon, l'enfant paraît comme hypnotisé par les notes qui émanent du vieil instrument délabré.  

Ses parents vont vers lui, allez, il est temps de rentrer! Mais l'enfant ne veut rien savoir, il veut rester encore un moment à écouter la musique d'un autre âge. Le père fouille dans ses poches et en tire une pièce de 2 Euros qu'il jette dans la petite gamelle posé prés du vieil homme. Puis il prend son fils par la main et l'entraine pour la suite de leurs courses. En repartant, le petit Kevin croise une dernière fois le regard triste du vieil accordéoniste.  

Qu'est-ce qui peut se cacher derrière les yeux du vieil homme?  

10 ans plus tôt.  

Matthias est tout tremblant. Dans quelle aventure a t-il pu se laisser embarquer par son oncle? Voilà à peine 1 an qu'il joue de la batterie, et il va remplacer un «vrai» batteur pour une animation dans une maison de retraite.  

Tout se passera bien lui à assuré son oncle Bernard qui joue de l'orgue «Tu ne joues pas trop fort, sinon il va y avoir deux trois pacemakers qui vont lâcher, et tu nous suis, de toute façon trois quarts de l'assistance est trop gâteuse pour comprendre quoi que ce soit à la musique!».  

Mais le problème, c'est que Mathias ne connait pas un des morceaux qu'ils s'apprêtent à jouer. Ce serait du «Greenday» ou «Franz Ferdinand», il serait à son aise, mais un boléro...  

Et ce qui inquiète par dessus tout l'adolescent, c'est qu'à l'accordéon, il y a Claude Pellegrini [Aldo Patchiglioni], une star dans la région. Le fameux Claude et son «Accordéon Magique», parcoure les routes de Normandie et de Beauce depuis une éternité. «Ah, ils en a fait valser des déambulateurs!» plaisante Bernard.  

Une fois le matériel installé dans le petit réfectoire reconverti en salle de spectacle, les trois musiciens passent dans les cuisines où les attend une petite table au milieu de laquelle trône un plat de charcuterie. Ils s'installent et s'apprêtent à manger quand Claude lève une main «Stop!». Matthias regarde l'accordéoniste avec étonnement.  

Le vieil homme interpelle une des serveuses qui passait par là. «Il manque rien sur la table? dit-il d'un air agressif. La serveuse le regarde avec de grands yeux ébahis « Le pinard bon dieu! Comment tu crois qu'on va tirer sur le soufflet si on a le gosier sec!!» Et la petite serveuse file en salle chercher un pichet de vin.  

"Et aprés le repas, tu m'amèreras une bassine de café, p'tit cul!" insiste Claude.  

Matthias est atterré par tant de dédain, mais Bernard lui glisse à l'oreille que Claude peut paraître un peu rustre au premier abord, mais qu'il a un coeur d'or. «Tu verras, quant on joue "Riquita, Jolie Fleur de Java" il verse une larme, en souvenir d'une amoureuse qu'il a eu il y a au moins 50 ans et qu'il appelait sa «Riquita». Bon, en vrai, je crois qu'elle s'appelait Jacqueline».  

Il est temps de passer «sur scène», en fait à un coin de la salle principale où ont été installées une vingtaine de chaises, sur lesquelles les retraités ont pris place.  

Et le trio entame sa «prestation», Matthias est profondément stressé. Après le repas, il est allé discrètement vomir dans les toilettes. Mais ses deux compères sont des professionnels, ce qu'il fait à la batterie n'a que peu d'importance.  

Les morceaux s'enchainent. Un homme d'au moins 80 ans s'approche à un moment des musiciens, et vient se plaindre qu'ils jouent trop vite "La Cumparsita" un célèbre Tango. « C'est ton sonotone qui est mal réglé, vieux gars! « lui répond Claude Pellegrini sans même lui jeter un regard.  

Puis vient le moment de « Riquita «. L'accordéoniste lance le morceau, et comme prévu, une larme vient perler au coin de son oeil. Puis soudain, ses yeux deviennent réellement rouges et pour la première fois, on a l'impression qu'il retient de vraies larmes.  

Bernard jette un oeil aux retraités qui sont en train d'écouter la musique, puis il aperçoit au fond une vieille dame [Margaret Wildbitch] dont les yeux sont également rougis. Il ne lui faut qu'un instant pour la reconnaître «Jacqueline», l'amour d'adolescence de l'accordéoniste.