Stuart (Adrian Yusef) est somnambule. Il se lève la nuit sans s’en rendre compte et effectue des trajets plus ou moins longs, plus ou moins précis. En témoigne sa femme Denise (Chiara Donaldson) que cela réveille à chaque fois. Le lendemain, elle lui raconte ses petites expéditions nocturnes à la cave, sur le balcon, dans leur grande forêt derrière la maison… Mais parfois il ne s’agit que de rêves que Stuart a sans bouger pour autant.  

Tous deux s’amusent à se dire qu’un jour, Stuart fera quelque chose de mal tout en dormant.  

1er Avril – 3h du matin.  

Stuart est agité dans le lit. Un coup de coude réveille sa femme. Soudain, encore une fois, l’homme à la carrure imposante se lève lentement et en grognant. Denise soupire. Comme d’habitude elle ne doit pas le réveiller, elle doit le suivre pour éviter qu’il fasse quelque chose de dangereux jusqu’à ce qu’il aille se recoucher dans 10 minutes à peu près. Comme d’habitude.  

Cette fois-ci, Stuart semble chercher quelque chose dans son sommeil. Lentement, il se dandine jusqu’au bureau, ouvre un tiroir, puis un autre, pose la main sur un étuis en mousse et en sort le tout nouvel appareil photo que lui et Denise ont acheté récemment. Il allume l’engin et le pointe fixement vers Denise qui reste immobile de stupeur. Stuart sourit. Denise l’appelle par son prénom, l’autre ne répond pas.  

Dans le noir, le flash éblouit Denise qui ferme les yeux pour essayer de retrouver la vue. Un violent coup sur la tête l’assomme.  

1er Avril – 19h.  

Stuart est allongé sur le lit. Il ouvre les yeux. Il s’est probablement assoupi comme il aime le faire en début de soirée, avant que Denise ne le rejoigne. C’est ainsi qu’ils passent la plupart de leurs soirées : au lit. Dans le silence. Ou est-elle ?  

Elle ne devrait plus tarder.  

Stuart se lève et appelle brièvement sa femme dans les pièces alentours. Aucune réponse. Il éteint les lumières et retourne s’assoupir. Elle est probablement sortie. Stuart ne sait pas, il n’a aucun souvenir. Il va se contenter de l’attendre en dormant.  

5 Avril – 1h30 du matin.  

Stuart est agité dans le lit, seul. Ses mouvements de coude tapent dans le vide. Stuart se lève lentement en grognant. Lentement, il se dandine jusqu’au bureau, ouvre le tiroir dans lequel se trouve l’appareil photo : rien. L’homme reste immobile quelques secondes puis se dirige vers la forêt. Il entend des bruits de pas, il faut qu’il les suive, qu’il trouve. Face à l’immensité des arbres et la noirceur ambiante, Stuart ne bouge plus. Son attention est soudain attirée par un petit sac en tissu déposé sur le sol. Lentement, il se penche pour le récupérer. Il découvre à l’intérieur quelques goutes de sang qui lui glacent le dos.  

Stuart se réveille en suffoquant dans son lit. Il transpire. Que voulait dire ce rêve ?! Il regarde à sa droite, le lit est vide. Denise n’est toujours pas rentrée depuis 4 jours.  

Après être allé se désaltérer, Stuart revient dans la chambre, pensif. Malgré tout, il n’est pas si inquiet. Elle finira bien par revenir, se dit-il en s’asseyant sur son lit. Il pose le regard sur l’appareil photo qui se trouve sur la table de nuit, l’écran LCD tourné vers lui. Ce même appareil photo qu’ils n’ont pas bougé du tiroir depuis le décès de leur petite fille. Une larme douloureuse à l’œil, Stuart saisit l’appareil qui semble être seulement en veille. Stuart appuie sur un bouton et tombe directement sur une photo de sa femme en robe de nuit prise dans le bureau. Denise y a un air complètement surpris. Stuart ne se rappelle pas avoir pris un tel cliché. En plissant les yeux, il regarde la date : il est indiqué 1/04/2021.  

L’homme commence à suffoquer de nouveau. Il questionne l’appareil du regard. « C’est une blague ? » Il appuie sur le bouton droite. Une vidéo s’enclenche alors. Elle est prise de nuit avec le « nightshot » qui donne un ton vert à l’image. La vidéo ne montre rien de précis : l’appareil est tenu par quelqu’un qui a la respiration lourde et qui avance lentement. Il semble tirer quelque chose. On le comprend au bruit de ses pas qui traînent sur les feuilles. Quelques râles seulement. Pas un mot. Puis la vidéo se coupe comme elle a commencé.  

Stuart reste bouche bée face à ces 25 secondes de film. Il a reconnu la forêt. Le sens de tout ça lui échappe complètement. Son cerveau est confronté à un mur, sa réflexion ne progresse plus. Pendant de longues minutes, il reste la bouche ouverte et l’appareil sur les genoux. Il bave et des larmes sortent de ses yeux vides.  

Le sommeil lui revient. Lentement, il s’allonge sur le dos et ferme les yeux.  

Dix secondes plus tard, le sommeil l’a emporté.  

Stuart s’agite puis se lève lentement en grognant. Tout en se dandinant, il se dirige vers la forêt derrière la maison, l’appareil photo en main.