« Le Monde ne s’arrange pas ! ».  

Telle fut la pensée du Père Daniel (Adrian Harland) lorsqu’il éteignit sa télévision après avoir regardait les informations de treize heures.  

Comme chaque jour depuis deux ans qu’il officiait à la paroisse Saint Mathieu, il se leva de table et fit sa vaisselle.  

Une fois celle-ci faites, il mit ses habits de prêtre afin d’être présent dans l’Eglise toute l’après-midi jusqu’à la messe de dix-neuf heures.  

L’ennui était son quotidien depuis ces deux ans car la paroisse, comme tant d’autres, n’attirait pas beaucoup de fidèles et il n’était pas rare que le bâtiment soit vide l’heure de la messe venue.  

A trente cinq ans, le Père Daniel avait des idées plein la tête pour relancer l’intérêt de ses offices, mais malheureusement, les fonds manquaient, alors il se cantonnait aux habituelles messes de dix-neuf heures du mardi, du jeudi et du samedi ainsi que la sacro-sainte messe du dimanche matin.  

Mais en attendant l’heure, il n’avait pas d’autres choix que de s’occuper en renseignant ça et là quelques touristes sur l’histoire de la paroisse ou en entendant les confessions de quelques paroissiens.  

Le Père Daniel avait cette obligation en horreur : claustrophobe depuis son enfance, il détestait restait assis pendant de longues minutes dans le confessionnal exigu et inconfortable qui sentait la cire d’abeille. Il n’en pouvait plus de devoir écouter patiemment les pêchés ridicules de gens qui imaginaient que se confier à un prêtre pourrait leur permettre d’en refaire d’autres sans conséquence.  

Paradoxalement, le Père Daniel reconnaissait inévitablement les confessés qui étaient en majorité de fervents pratiquants qu’il voyait au minimum tout les dimanches. Mais il se devait de jouer le jeu en essayant de ne pas s’endormir devant les aveux de Madame Gouleu qui avait encore cracher dans la soupe de son mari ou de Monsieur Brufu qui, malgré ses soixante dix ans, prenait un malin plaisir à tripoter les filles dans le bus en faisant semblant de tomber ou en se masturbant derrière son ordinateur en regardant des films porno.  

Tout ses gens ne faisaient rien de bien méchant, et le Père Daniel espérait bien ne jamais devoir faire face à jour à une situation bien plus grave… mais ce jeudi, son vœu ne serait pas exaucé.  

Après avoir entendu, pour au moins la dixième fois, Madame Fitse qui avait aguiché un homme en discothèque avant de se donner à lui dans une voiture alors que son mari était encore tout chaud dans son cercueil, le Père Daniel s’apprêtait à sortir de son « placard aux aveux », comme il aimait à l’appeler, lorsqu’il vit la silhouette de quelqu’un s’y asseoir.  

Lorsque l’homme (Ayau Lee) se mit à parler, le Père Daniel fut surpris : il ne connaissait pas cette voix.  

- Mon Père, j’ai pêché, dit l’homme d’une voix rauque qui trahit sa grande dépendance à la cigarette.  

- Je vous écoute Mon Fils, répondit le Père Daniel.  

- J’ai tué, et j’ai aimé ça ! rétorqua le confessé sans une pointe de regret dans la voix.  

Le Père Daniel dégluti difficilement sa salive, et espéra avoir mal compris.  

- C'est-à-dire ? bredouilla-t-il.  

- C’était hier soir, il était seize heure quarante. Elle devait avoir une dizaine d’années. Elle était blonde, les cheveux réunis en une superbe queue de cheval. Elle était vêtue d’un petit short et avait un cartable rose sur le dos. Je l’ai vu dans une rue déserte qui passe derrière le cimetière alors qu’elle sortait de l’école et qu’elle rentrait seule chez elle. Je me suis arrêté dix mètres devant elle, et lorsqu’elle est arrivée à ma hauteur, je l’ai forcé à monter dans ma camionnette.  

J’ai ensuite roulé jusqu’à un terrain vague. Une fois là bas, je l’ai violé ! J’ai eu le plus bel orgasme de ma vie lorsque je lui ai éjaculé dans l’anus ! Quand j’eu finis, je l’ai étranglé et je l’ai regardé mourir. J’ai ensuite jeté son cadavre dans le fleuve.  

Le Père Daniel ne pouvait pas répondre. Il tremblait d’horreur en écoutant les paroles de cet immonde personnage.  

- Mon Père, demanda l’inconnu. Dieu me pardonne-t-il ?  

- Vous devez vous rendre à la Police, dit le Père Daniel d’une voix emplie de sanglots.  

- Non, car je vais recommencer ! J’ai aimé ça, et je vais le refaire jusqu’à ce que vous me donniez l’absolution ! Allez-vous le faire ?  

Le Père Daniel remua la tête mais aucun mot ne put sortir de sa bouche.  

Il fut tiré de sa torpeur quand il entendit l’homme partir. Il tenta de le suivre, mais il ne fut pas suffisamment rapide.  

Que devait-il faire ? Prévenir la police et trahir le secret de la confession ou ne rien dire et laisser se meurtrier continuer ses crimes odieux.  

Et qui sait ? Peut-être que cet homme n’était qu’un mythomane prêt à tout pour se rendre intéressant. Le Père Daniel voulu en avoir le cœur net. Il retourna dans son bureau et alla sur le site internet des informations permanentes. Il n’eut aucun mal à tomber sur une dépêche récente d’à peine cinq minutes :  

« Le corps d’une fillette de onze ans découvert dans le fleuve. Selon les experts, elle fut sauvagement violée avant d’être tué par strangulation. Le meurtre aurait eu lieu hier dans la soirée. »  

Le Père Daniel se précipita aux toilettes et vomit son repas du midi.