Cinejeu.net : devenez producteur de cinéma ! (jeu en ligne gratuit de simulation économique)

Chpom Entertainment présente
We Used to Sing Freedom

 

 

Chapitre 1 : Donnie et les autres.  

 

 

Eté 1965 - Centre de San Francisco.  

 

Ses baguettes à la main, Donnie (Adrian Harland) déambule dans les rues de San Francisco. Il n’a pas pris le bus cette fois-ci. Envie de marcher. Envie de respirer. Ses parents ne l’attendront pas pour manger ce soir, il sort retrouver les autres. William (Anton Freeman), Clarence (Eti Pavipapru), Eileen (Alisa Ballard) et Nathan (Charles Freeman) l’attendent attablés au Hedge’s, un pub à l’ambiance chaude et aux nombreux habitués. Quand Donnie arrivera, il se mettront à jouer, les instruments sont prêts et installés. C’est pas la première fois qu’il est en retard, mais les autres connaissent la chanson… « Je suis venu à pieds » dira-t-il.  

 

« Je me suis engueulé avec mes parents. » s’excuse Donnie 10 minutes plus tard. Les 5 amis se lèvent et se dirigent vers la petite scène montée entre les tables. Ils sont un des quelques groupes qui jouent du rock nouveau, comme les Beatles, celui qui rythme les années 60 et qui les caractérise si bien en même temps. Beaucoup de leurs amis, de leurs fans qui écouter leurs reprises et leurs compositions se sont demandés pourquoi ils ne voulaient pas faire une carrière mondiale. Les cinq, clairvoyants, ont toujours répondu -et Donnie le premier : « Le succès nous apportera deux choses : de l’argent et de la haine. On préfère avoir l’amour, seul ».  

 

L’ambiance est bonne ce soir, les gens dansent, crient. Et Eileen aussi, au micro, donne tout ce qu’elle a. À travers ces paroles, elle extériorise ses sentiments, son envie qu’elle contient en elle sans cesse : dire combien elle les aime, eux derrière, qui l’accompagnent ; Nathan et Clarence aux guitares, William à la basse et Donnie à la batterie.  

Donnie ne la lâche pas des yeux. Ses bras effectuent les gestes tous seuls, son esprit est ailleurs. Il pense à leur chanteuse, amie d’enfance. Elle chante admirablement bien, ce soir particulièrement. Il se surprend à vouloir l’embrasser. Pourquoi elle ?  

Fin du concert. Des applaudissements, comme tous les soirs. Donnie sait que les gens applaudissent plus leurs bières que le groupe. Être leur exutoire ne le dérange pas plus que ça. Il aime se faire à l’idée qu’il représente la liberté pour tous ces gens...  

 

Un long baiser soudain. Eileen a reculé la tête par réflexe avant de se laisser faire, puis de l’enlacer, les yeux fermés. Pour eux, c’était une évidence, s’embrasser maintenant. Donnie a peur, pourquoi elle, après tant d’amitié ? Les autres ne comprennent pas. Nathan s’est éloigné le premier, Clarence et William l’ont suivi après avoir vérifié -comme pour rigoler- qu’il s’agissait bien d’Eileen et Donnie.  

 

L’amitié amène-t-elle toujours à l’amour ? L’amour détruit-il l’amitié ? Tant de questions mêlées à l’envie qui font que maintenant, il déshabille lentement Eileen qui est allongée sur son lit. Redécouverte d’une personne, d’un corps… Eileen le regarde dans les yeux, juste avant. Des yeux qu’elle n’avait jamais vu en lui, des yeux d’ange.  

 

 

Chapitre 2 : Donnie part.  

 

 

Eileen vient de partir. Un départ d’amoureux au petit matin après avoir passé la nuit avec lui. Le temps de se lever, son père va encore lui prendre la tête. Donnie sent que bientôt, le vase va déborder… Non, il ne fait pas d’études supérieures, et alors ? Comme tous les autres de toute façon, à part Eileen qui va à l’université. Non, ils ne se lancent pas dans la musique… Ses parents lui reprochent son manque d’engagement. Donnie réfute toujours mais bien sûr, il y réfléchit… Engagement.  

 

Au fond, il ne veut même pas s’engager avec Eileen, ça il le sait. Ils en ont déjà parlé cette nuit, elle lui demandait de quoi il avait peur, il a répondu directement : de l’engagement.  

24 ans, toujours chez ses parents, pas de boulot. Donnie croyait aimer sa vie…  

 

« Je pars, je m’engage dans l’armée. » répète Donnie devant sa glace en soupirant. Les autres ne comprendraient pas, ils demanderaient pourquoi.  

Puis, quand il parlerait seul avec Eileen, elle demanderait « pourquoi maintenant » ?  

 

 

Chapitre 3 : Vietnam, terre d’Apocalypse.  

 

 

2 Août 1967 – Quelque part dans le ciel d’Asie.  

 

Ce n’est qu’aujourd’hui, dans l’avion qui les mène au Vietnam, que Donnie se rend compte de l’absurdité de leur situation. William, Clarence et Nathan sont assis en face de lui et le regardent dans les yeux, comme s’ils étaient là pour lui. C’est vrai, ils se sont engagés pour ne pas briser le pacte, pour ne pas briser leur amitié. C’est douloureux de faire remonter les souvenirs à la surface, maintenant.  

 

C’est comme ça, ses amis l’ont suivi. Ils n’avaient rien d’autre que leur groupe, pas d’études, pas d’amours…  

« Pourquoi maintenant ? » Donnie se souvient. Il se souvient du long silence qui avait suivi la question d’Eileen. Peut être la première fois de sa vie qu’il n’avait pas réussi à lui répondre.  

 

Arrivée au Vietnam.  

 

Pas le temps de respirer, pris dans la tourmente de la guerre, envoyés au front. Le front au Vietnam, c’est la jungle. Terre hostile. Boue, sangsues. Serpents, pièges à loup sous les branchages, pièges à la grenade. La roulette russe version chargeur plein. Les soldats avancent aussi lentement que sur leur lit de mort. Chaque pas est réfléchi, pensé. Chaque feuille est scrutée.  

« - Contact, droit devant ! » chuchote l’homme qui ouvre la marche. Ils s’accroupissent tous, les yeux écarquillés, le souffle coupé. À l’arrière du groupe, les nouveaux : Donnie, William, Nathan. Clarence n’a pas été envoyé, aujourd’hui. Réquisitionné pour ses compétences d’infirmier autre part.  

« - Soutien aérien dans deux minutes, ouest. On contourne par ici. Assaut sur deux fronts après le napalm, comme convenu. Groupe 1, avec moi. » explique rapidement le sergent en faisant des gestes précis.  

 

Longue attente dans le silence. Les trois sont ensembles, ils ne se regardent même plus. Leurs regards se croisent. Incompréhension. Intimité du passé détruite. Avec eux dans le groupe 2, sept hommes qui viennent des Etats-Unis aussi. Du Tennessee peut être, ou de l’Ohio. On ne sait pas, mais il ne sont pas chez eux, ici.  

Le bruit des hélicoptères se fait entendre. Il est impossible de voir le ciel, trop d’arbres, de feuillages. Mais les rotors se font de plus en plus sentir. Les tripes qui vibrent. C’est bon signe, ça veut dire qu’elle sont encore là, comme disait le Colonel au campement tout à l’heure. Le Colonel il est encore au campement lui, et ses tripes ne vibrent pas.  

 

Les tripes qui vibrent, encore plus fort. Et soudain, le vide.  

 

Plus rien, l’assaut est lancé. Le cœur qui s’arrête de battre avant même de mourir. Donnie court à travers les arbres, les branches. Des coups de feu retentissent. Ennemi localisé. Le flan gauche de leur retranchement est complètement brûlé, dévasté. Donnie ne peut s’empêcher de regarder alors même qu’il court vers la droite. Des hommes sortent tels des torches, allumés d’un feu brillant et vif. Ils doivent crier, sûrement. Il ne les entend pas.  

La première tranchée est atteinte. Les balles fusent, faisant voler en éclat toutes ces branches, ces feuilles. Donnie se voit comme à l’entraînement. Une forte respiration, il se retourne, vise sa cible et presse la détente. Le M-16 est une arme efficace pour le combat rapproché, effectivement. Tir loupé, de peu. À ses cotés, Nathan tire également. William, lui, reste accroupi les mains cramponnées à son arme. Il est complètement paralysé. Il n’a pas franchi le cap. Le cap entre l’entraînement et le réel. L’écart abyssal entre fiction et réalité. L’écart abyssal entre fausse mort et mort.  

 

Rassemblement. Les forces ennemies reculent. Un assaut final va être porté pour achever l’opération. Déjà beaucoup de morts, à peu près dix fois plus chez les viets, mais ça c’est normal. Donnie sort à peine de sa bulle. Il est comme halluciné. Il continuait à tirer dans le vide. William et Nathan sont toujours là, avec lui.  

 

« Pourquoi maintenant ? » Donnie fronce les sourcils.  

 

Briefing, terminé. Dernier assaut donc. Donnie n’a rien entendu. Tant pis, il suivra les autres. Les troupes américaines sortent de leur retranchement pour avancer. Une fois tous dehors, des tirs se font entendre, venant de nulle part. Des hommes se couchent précipitamment. D’autres, qui n’ont pas eu le temps, se couchent lourdement, inertes. William s’est retourné, bloqué, les yeux fermés. Les autres lui hurlent de se coucher au sol.  

Une balle vient traverser son crâne qui est propulsé en avant. Son corps suit et William s’étale par terre. Donnie se lève et court vers lui. Les tirs de riposte américaine le protègent. Les soldats au sol tirent n’importe où, devant. Donnie attrape le corps de son ami et le tire dans la tranchée. Sur son visage se mêlent sueur, boue et larmes. Il retourne William pour regarder son visage. Il n’y en a plus. La balle est passée au niveau du nez, détruisant, emportant tout avec elle. Une partie des yeux, la mâchoire. Les dents. Les sourcils. La peau, le cerveau. William.  

 

Donnie reste figé. Il ne pleure pas mais les larmes sortent toutes seules de son intérieur par ses yeux, et à grands flots. Sans qu’il ne le veuille non plus, son repas de la veille sort de son intérieur, par sa bouche. Les morceaux visqueux dégoulinent sur et dans l’autre qu’il tient dans ses bras. Donnie ne semble même plus se contrôler, il lâche le corps inerte, se relève et ressaisit son arme.  

Les autres soldats ont réussi à faire reculer les tireurs embusqués et recommencent à avancer prudemment. Ses yeux se portent sur Nathan au moment même où une explosion le fait disparaître dans un éclat de fumée opaque. Donnie se plie violemment en deux en portant la main à sa bouche, il vomit encore. Toussant, à genoux, dans la boue. Il se tient le ventre, criant de douleur et s’affale par terre, le regard vers le ciel, presque éteint.  

 

« Remercie Dieu de t’avoir épargné, fiston, et prie pour que demain il en fasse autant. »  

 

Ce sont les derniers mots que Donnie a entendus pendant le retour au camp. Il est maintenant complètement renfermé sur lui-même, comme refusant tous les événements extérieurs. Cette même bulle dans laquelle il s’enfermait quand ses parents l’engueulaient. Plus aucune communication, plus aucun extérieur. Plus rien.  

 

 

Chapitre 4 : Le viol.  

 

 

Opération Kin-Ando. 15 Août 1967.  

 

400 soldats américains vont gravir cette petite colline pour prendre possession du village qui y culmine. Peut-être plus de 2500 Viet Congs et Nord Vietnamiens feront opposition. 2nd bataillon, c’est celui de Donnie. Enfin celui dans lequel il est. Désigné pour un assaut final supplémentaire, si besoin.  

 

Donnie avance avec les autres. Seulement deux heures de combat ont eu lieu avant que le second bataillon ne soit appelé. Bon ou mauvais signe, on verra plus tard. Les hommes avancent péniblement. Des coups de feu se font entendre en haut. Arrivée aux abords du village. Des dizaines d’habitations sont brûlées et les hommes aux lance-flammes s’occupent de celles qui sont restées intactes. Spectacle incohérent, risible ? Donnie avance seul maintenant. Il est clair que la bataille est gagnée. Son regard reste fixe et droit mais sa démarche est instable, floue. Les hommes assis par terre le regardent passer. Il avance vers l’autre côté du village. Personne ne l’arrête, du moins il n’entend personne essayer de le faire.  

 

Du haut de son perchoir, la vue sur la jungle est impressionnante. Donnie regarde ses pieds un long moment. Puis il ferme les yeux. Depuis son arrivée, il n’a plus eu de nouvelles de Clarence, parti en opération à l’Est, apparemment.  

Ses yeux s’ouvrent lorsqu’il entend des bruits de pas derrière lui. Il se retourne. C’est une jeune femme (Estelle Vrana). Elle semble vouloir s’enfuir vers la forêt en boitant. Donnie lâche son arme et la prend en chasse. Courte chasse, beau butin. Il la tire violemment par le bras vers la forêt. Ses cris n’y feront rien, elle a joué sa chance, elle a perdu.  

Donnie arrache les lambeaux qui la couvrent. Elle est nue, elle se débat. Il la force, il en fait ce qu’il veut. Elle le regarde dans les yeux, juste avant. Elle suffoque, effrayée, il a le même regard que le diable.  

 

 

---  

 

Script original écrit par Hubert Bairu à partir de son livre "Terre brûlée" paru en 2014.  

 

Scénario : (2 commentaires)
une série A dramatique (psychologique, guerre) de Charles Freeman

Adrian Harland

Alisa Ballard

Anton Freeman

Estelle Vrana
Avec la participation exceptionnelle de La Cousins Movie Company
Musique par Christopher Garcia
Sorti le 03 décembre 2016 (Semaine 622)
Entrées : 21 152 314
url : http://www.cinejeu.net/index.php?page=p&id=54&unite=fenetre&section=vueFilm&idFilm=13523