=== Film interdit aux moins de 12 ans ===  

Anton Freeman interprète le narrateur, Ada Proto sa femme.  

Je tire, l’homme dans mon viseur tombe, inerte.  

Mon père me frappe.  

J’allume la radio, Georges W. Bush est élu.  

Je viole une femme dans les décombres d’un immeuble à Bagdad.  

Je me réveille.  

Ma femme est à mes côtés. À force de vouloir oublier pendant le jour, ça resurgit la nuit. Je me lève et vais voir dans la chambre de ma fille. Elle est morte ? Non. Elle dort. Je l’embrasse sur la joue. Je l’aime.  

Je vais dans la salle de bain. Je trouve mes tatouages ridicules, maintenant. Peu importe. C’est moi, c’est mon passé, ça ne partira pas. « Iraq » sur l’omoplate droite ; « Brothers In Arms » sur la gauche. C’est vrai. Nous étions soudés. Et l’épée qui me traverse le dos. C’est vrai. Nous étions morts. J’avais vu le film de Kubrick, j’avais marqué Born To Kill sur mon casque, mais je ne pensais pas que c’était vrai. Je ne savais pas qu’à la guerre, on perdait son âme.  

6h08. Mon réveil sonne. J’ai encore oublié de l’éteindre et ma femme va l’entendre. Non, c’est bon. Ha… Ca aurait été bien qu’elle se réveille quand même. On aurait peut-être fait l’amour comme on aime le faire, au petit matin. Tant pis, je vais me préparer.  

Un jus d’orange, j’aime bien. Des tartines, comme toujours.  

Je sors, rentre dans ma voiture. Check des canons, blindage ? Non. C’est ma voiture. Pas d’embuscades aujourd’hui. Arrivé à la caserne. Je dois être au garde-à-vous à 7h pile. J’y suis. J’en frissonne, c’est comme là-bas, tous les matins. Sauf qu’ici, on est en paix. Si on veut.  

Quelques fois, j’ai envie d’y retourner. Irrémédiablement attiré mais dégoûté aussi. Je m’emmerde dans mon bureau. Mais c’est plus sain que dehors, que là-bas. C’est pas pour rien que j’ai été rapatrié de toute façon. J’avais une maladie, ou je sais plus quoi. Je pouvais pas rester. J’ai de la chance, ou pas.  

Certains disent que j’ai baisé avec le général pour avoir ma permission. Ils sont cons. Ils sont jaloux. Ils sont peut être morts aujourd’hui. Y en a aussi qui sont rentrés. J’ai qu’à aller les voir et on réglera ça. Comme des hommes. Comme on faisait là-bas, quand le capitaine était pas là.  

Allez, j’y vais. Je sais ou il habite ce connard de Trevor qui a lancé la rumeur. Après tout c’est à cause de lui si je passe pour un pd. On va régler ça. Ma femme a failli le croire. Elle dit qu’elle m’aime au fond je suis sûr qu’elle croit les autres. J’étais malade, c’est pas compliqué, merde. J’ai du voir des psychologues pendant des mois. Quoique, c’est vrai. Même les psychologues croyaient les autres. De toute façon c’est des connards. Je fais ce que je veux ! J’ai pas couché avec le général mais si j’avais voulu, je l’aurais fait !  

Tiens, c’est ici.  

Voilà. Maintenant je rentre chez moi, ma journée est finie. Il n’y aura plus de rumeurs et c’est tant mieux. Aaah, ma femme, quelle beauté. J’ai envie d’elle. Et ma fille aussi. Elle est belle.  

C’est vrai que j’ai du sang sur les manches, mais elle était pas obligé de le dire. Bordel. Je travaille à l’armée, j’ai du sang sur les manches, c’est normal non ?  

J’ai fait la guerre moi. Putain.  

Je vais laver ça. Je suis sûr qu’elle me croit pas. Il faut que je me calme. Ce n'est qu'une femme, elle ne peut pas comprendre. J'ai envie de lui faire comprendre. Je ne peux pas. Comment faire pour que ça lui rentre dans le tête ?  

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Script original écrit par Hubert Bairu adapté de son livre "Le Retour".