Sur la plage, une brise fraîche soufflait. Lacay regardait les amoureux qui s’attardaient sur le sable fin alors que le soleil plongeait dans la mer à l’horizon. Elle fut éprise de tremblements. non à cause du vent mais de voir l’amour dans les yeux de cette jeune black qui se faisait peloter ses petits seins par son amoureux. Lacey serra les dents pour ne pas pleurer et accéléra le pas afin de s’éloigner. Pour ne plus les voir. Pour ne plus y penser.  

Comme chaque soir, Lacey s’arrêta au bar qui faisait l’angle. Elle prenait sa dose de rhum afin que cela l’assomme pour la nuit, l’assomme pour ne plus penser. Mais, il y avait des soirs où ça ne marchait pas. Comme celui là où elle n’en pouvait plus de sa vie. La soumission de sa journée lui remontait à la gorge, comme le liquide des tiges qu’elle avait pompée toute l’après-midi… En revoyant la scène, elle se mit à pleurer. Mais la haine qu’elle avait pour ce vieux porc qui l’obligeait à se faire remplir en même temps par deux trois gus ne se transformait en aucune action valable. A part celle d’interpeller le serveur pour recommander un rhum coca.  

A son cinquième verre, Lacey était complètement dans le cirage. Elle était enfin détendue et, comme chaque soir de beuverie affirmait dans sa petite tête : « Je vais changer de vie. Je vais changer d’image. J’en suis capable. » Normalement, ça en restait là. Le besoin de dope la faisait aller chaque lendemain au turbin, le seul où on la félicitait à coups de butoirs.  

En se levant, elle titubait. Comme chaque soir, les habitués rigolaient. Les « Ah ! La salope ! » et « J’m’la ferais bien cette nègre » fusaient à la cantonade. Quand elle sortit, elle fit quelques pas pour s’appuyer contre le mur d’en face et se vider littéralement, à en arroser le bitume.  

Le lendemain, quand Lacey ouvrit les yeux, elle n’était pas dans son placard qui lui servait de piaule mais dans une chambre minimaliste, avec une étagère à gauche remplit de livre. Habillé d’un pyjama qui n’était pas à elle, Lacey se leva et ses pas furent guidé par l’odeur du café. Lorsqu’elle entra dans la cuisine, elle vit un homme d’une trentaine d’années qui lisait le quotidien du matin. Il leva les yeux, sourit et lui dit :  

« Vous êtes capable de changer d’image Lacey ».