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Praxis

Quatre jours ont suffi à attiser une passion qu’il crut éteinte à jamais. Cet homme – car il s’agissait bien d’un homme qu’il vente ou qu’il neige – se prénomme Camille Closse. Dieu comme il aime sa famille, son pavillon et son chien, attaché au piquet. Découvrez-le comme il aime Dieu. Sa voiture, il la pénètre dans un garage qu’il ferme à clé. Lorsqu’il donne un tour de clé pour couper le moteur, il appuie pour ouvrir le coffre à partir de la commande de bord. Il prend de l’élan pour ouvrir la portière. Il ferme à clef le côté conducteur. Et autant qu’il aime à se protéger, il compose le code qui annule l’alarme. Il fait le tour de la voiture pour se rendre au coffre. C’est un costume encore impeccable qu’il quitte. Dans l’entretien de la propreté et de l’hygiène la plus impeccable, il change de costume et se peigne devant le coffre ouvert.  

 

A la mi-Septembre 2005, une nouvelle retentit au journal de vingt heures. Elle relate un fait au summum du sordide et de la maladie humaine. Toutefois singuliers, les rêves aussi vont de pair avec la cruauté.  

Dans le cas présent, une aide-soignante aurait refusé une boîte d’allumettes à un patient carcéral, connu pour des antécédents de pyromanie. Echappé de l’asile d’où il aurait pris la direction de la banlieue de Roubaix, il serait vêtu d’une tunique blanche de femme. Plusieurs automobilistes ont confirmé qu’une femme en blanc faisait de l’autostop sur l’autoroute, sans succès, avant de se retrouver dans la banlieue. Ici, à la place des ruines calcinées, se dressait un pavillon de lotissement. Les voisins sont prostrés depuis le feu et se sont à présent amassés dans la rue. Une équipe de télévision régionale est d’ailleurs installée. Elle recueille différents témoignages à chaud tandis que les pompiers arrosent encore un bois détrempé sans discontinuer. La vie familiale de Camille est en train de basculer. Un journaliste tente de trouver le bon moment pour lui parler et, s’il le souhaite, faire une déclaration. Camille est un homme calme et exceptionnel. Le chagrin lui donne encore tout l’espoir d’adresser quelques mots. Si ses dimensions physiques et mentales sont impressionnantes, sa chevelure jusqu’aux omoplates s’enroule, poétise et apaise ses paroles qui demeurent précises. Chaque mot est aplani, un déroulé monotone comme la bande d’un magnétophone. « C’est un jour de deuil pour moi. Je suis fatigué ». Plus tôt, dans la soirée, Camille avait sauvé deux de ses trois petites filles et sa femme. Une des filles est restée sous les premiers décombres de la chambre mansardée. Les survivants auront été affectés au service des grands brûlés de Roger Salengro CHRU Lille. Selon la dernière déclaration dépêchée de la police, une aide-soignante a été retrouvée décapitée : aucun instrument n’aurait été utilisé ; une équipe de recherche a été déployée pour retrouver la tête de la jeune femme décédée.  

Pendant ce temps, la télé ouvre certains débats farfelus et s’interroge sur la place des malades mentaux dans la société ou si le Nord est prédisposé à la naissance de faits divers et à la consanguinité.  

 

Dans un karaoké, vers quatre heures du matin, un trisomique 21 chante « Que je t’aime » à tue-tête. Camille se réveille.  

A l’hôpital, en moins de trois jours, les trois personnes qui restaient de la famille de Camille décèdent tour à tour. Il s’était rendu à chaque chevet pour un adieu particulier à chacun de ses membres puis le médecin est venu à son encontre pour cesser tout espoir thérapeutique. Le médecin a délégué l’ultime toilette à un infirmier et une aide-soignante. L’infirmier a commandé un accompagnement psychologique et une prise en charge exemplaire pour ce père de famille dévasté. Il a beau ne pas réagir – et sa beauté fine tout autant – mais c’est ainsi qu’il a pu prendre contact avec certains de ses maisons Pompes Funèbres Générales clientes. Les PFG ont pour habitude, à présent, de sous-traiter vers des thanatopracteurs des cas particuliers lorsque les dégâts corporels se révèlent importants ou si la famille souhaite un soin spécifique, de manière, par exemple, à conserver le corps plus longtemps. Camille Closse faisait parti de ce métier et avait un respect immense pour les morts. Ils devaient reprendre assez de vie pour que la famille affectée fasse la transition entre la brutalité qui frappe et la disparition d’un être cher. Camille avait de tout temps contribué au rite de passage mortuaire comme un acte essentiel d’une œuvre, dépassant même le cadre de la vie. Et de se trouver au milieu du croisement de vie et de mort. Il se souvient ainsi de l’ordre des choses, du moment où l’on naît jusqu’au moment où l’on meurt. D’ailleurs, ce dernier lui a échappé : il a changé de costume dans le garage. Dans son apparat impeccable, se retournant, il vit cet autre homme dont les cheveux tout aussi longs que les siens perlaient de sang. Camille regarda l’heure, l’autre, plus belliqueux, craqua une allumette, la lécha et la suça.  

 

« Il est dit que la conservation d’un corps mort est optimisé par des bougies allumées et l’obscurité. Alors sois doux avec moi, mon agneau »  

 

Très calmement, Camille fut le premier à se jeter sur l’intrus. Bientôt, les bruits de quincaillerie et de pots de peinture renversés empliront le garage et donneront l’alerte à la famille attaquée dans sa chair.  

Camille n’a rien à perdre ; il se jette la tête la première. Il gère les coups et la bataille. Il ne donne pas l’impression de vouloir se battre quand, soudain, l’aliéné s’attaque au visage. Camille ne se débat pas ; il cache quelques spasmes sous sa dyspnée. Seul, un coup d’extincteur le sauve. Sa femme, Helena, reste accablée devant ce mal et ce sang mais Camille dit de ne pas s’en approcher. Il semble déterminé à tout faire pour régler la situation. Helena le suit. Et tandis qu’elle décroche le téléphone pour appeler la police, elle découvre qu’on a retiré la batterie du combiné – y compris des portables. Camille cherche un mouchoir en tissu dans la commode de l’entrée. Il se le colle sur un bout manquant de son visage. Le père veut savoir où sont ses filles. Toutes les trois, elles sont restées à observer le cadavre du fou dans le garage. Camille les détourne de leur objectif morbide et conseille au deux grandes de rester avec leur mère. La troisième et petite dernière de la charmante famille va être conduite au premier, dans sa chambre.  

 

La maison explose littéralement. Au bout de deux minutes, un homme valeureux en sort en portant deux petites filles qui, sur la pelouse, sont déposées. Ces petites-là se seront ressemblées jusqu’à l’ultime moment. Elles se regardent, couchées, comme un affreux miroir : le visage desquamé, émacié et noir. L’une tend sa main encore en feu pour attraper sa sœur. Le tissu nécrosé, la mort devient un masque. Leur mère, calcinée, vient à présent d’être déposée à leur côté. L’homme monte les escaliers, épuisé par le monoxyde de carbone, se rend dans la chambre qui ne cesse de pleurer. La petite n’a que quatre ans et elle est immobilisée par les flammes. Une poutre s’abat sur elle. Elle appelle sa mère. Elle s’approche en talon aiguille et trépane la chère enfant. Le talon enfoncé dans le tympan, la petite fille de quatre ans crève la gueule ouverte en mâchant la braise au sol.  

 

Dans la voiture de Camille, se trouve sur le siège passager, la tête de sa femme reposant sur un parpaing. Camille se réveille en sursaut. Il est à l’hôpital et est accueilli aussitôt par la police qui lui infirme qu’une infirmière et une aide-soignante ont été retrouvées dans un bain d’acide chlorhydrique. Camille ne sait rien ; il regarde l’heure. Une autopsie révèle que sa petite fille avait un trou dans la tête d’un virgule cinq centimètre de diamètre. Camille doit rejoindre la voiture pour trouver quelle pompe funèbre se chargera des soins de présentation. Maquiller un mort est le rendre présentable mais, au fond, c’est inacceptable. Le mort est supérieur au vivant par son immobilité. Le vivant est une impasse, il s’agite vainement, s’angoisse dans le néant, se fourvoie dans la matière et la reproduction. Il n’est pas possible d’opposer ces principes aux morts. Pendant toute sa vie, ou quasi-totalité, Helena a passé son temps à faire régime pour un poids qui est resté abstrait. Nul n'ignore que la putréfaction - parfois rapide dans ces régions - s'accompagne de modifications désagréables : gonflement du corps, décoloration, émissions de gaz et de liquides nauséabonds. Elle n’avait certainement pas saisi cette conception mais à présent rien n’est plus beau que son souvenir. En tous cas, c’est ce à quoi Camille doit s’accrocher lorsqu’il soumet la proposition de prise en charge à l’une de ses connaissances dans la région.  

 

« Il vaut mieux crever que de pourrir. Je t’en supplie alors charge toi d’eux.»  

 

Le thanatopracteur, chargé de redonner vie temporairement à quatre personnes d’une même famille, n’est personne d’autre qu’un concurrent et ami de la famille. Le lendemain, à peine ce dernier avait-il commencé son travail qu’un incendie s’est déclaré dans l’atelier. La police a de nouveau pris contact avec Monsieur Closse. Cette fois, ce sont les corps qui ont disparu. Camille est effondré. Il est clair que l’homme échappé de l’asile cherche à lui nuire.  

 

Un homme filiforme, presque cachectique, s’agite en allée et venue sur la banquette arrière d’une berline. Le véhicule se situe en plein milieu d’un champ de colza. Il vient après la sensation que cet homme, sur la banquette, s’agite parce qu’il est en train d’être immolé. Camille s’éveille.  

 

Camille décide de quitter la ville pour s’installer plus en campagne. Au repos depuis quelques semaines, il passe son temps à renouer contact avec la vie, comme un état suprême. A distance de six mois du drame, il esquisse à nouveau un sourire, fugace mais significatif. L’homme fou n’a pourtant été retrouvé pour ses crimes. Alors lorsqu’il gare de nouveau sa voiture, il repense au déroulement. Sa voiture, il la pénètre toujours dans un garage qu’il ferme à clé. Lorsqu’il donne un tour de clé pour couper le moteur, il appuie pour ouvrir le coffre à partir de la commande de bord. Il prend comme de coutume un élan pour ouvrir la portière. Il ferme à clef le côté conducteur. Et autant qu’il aime à se protéger, il compose le code qui annule l’alarme. Il fait le tour de la voiture pour se rendre au coffre.  

Dès qu’il l’ouvre, Camille, sans grimacer, cherche un désodorisant.  

 

« Où as-tu mis la tête de l’aide-soignante, mon cher frère ? Maman t’a si souvent évoqué lorsqu’elle pleurait dans la cuisine que tu m’en as laissé l’eau à la bouche. Je savais que tu viendrais un jour, peut-être par coïncidence – qui sait ? Je vous présente Médéric Closse. Il est oh oh oh mon frère abandonné. Je sais qu’il brûle d’impatience de faire votre connaissance... »  

 

Camille prend un cadavre méconnaissable depuis son coffre. Il le met sur son épaule et traverse ainsi la maison. Il le dépose ensuite sur une chaise. Camille allume le long de cette table trois bougies. Il veut accueillir un nouvel arrivant. Les enfants sont uniformément peignés et coquets. Plus respectueuse à présent, sa femme est rayonnante mais toujours un peu fragile émotionnellement. Une prière est entamée. Découvrez-le comme il aime Dieu. Dieu comme il aime sa famille (froide), son pavillon (austère) et son chien (empaillé).  

 

Tout le monde n’y a vu que du feu. L’histoire peut réellement commencer.  

 

« Quand mourir devient l’espoir d’une vie meilleure. Ce n’est pas une victime mais un bourreau qui vous lance le précepte. Admettez et ne soyez jamais en terre. Plutôt souffrir que de vous oublier.»  

Scénario : (3 commentaires)
une série B d'horreur de Alexandra De La Boulaye

Joshua Erotas

Demetra Hardy

Patrick Patoque

Cristina Donovan
Sorti le 28 juin 2014 (Semaine 495)
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